La revue scientifique Science met cette semaine Curiosity
en couverture. Un supplément spécial retrace les premiers résultats des
analyses chimiques du sol martien dans le cratère
Gale. C’est le 6 aout 2012, lorsque
que le rover est arrivé sur la surface de la planète rouge, que Mars a reçu son
laboratoire de géochimie le plus évolué.
Stolper et al. précisent que Jake_M
a été rencontré à 282 m du site d’arrivée. C’est un gros caillou sombre,
d’apparence homogène, et qui représente un type de magma martien jusqu’alors
inconnu. A contrario des basaltes tholeiitiques typiques de Mars, qui sont
riches en fer et pauvres an aluminium et peu fractionnés, Jake_M est apparu très alcalin et fractionné. En fait Jake_M est très similaire à certaines
roches rencontrées sur Terre, quoique assez rarement, les mugearites, que l’on peut trouver dans des îles océaniques et des
zones de rift. Les géophysiciens estiment qu’il provient probablement de magmas
issus de la fonte partielle à haute pression de basaltes riches en eau.
Leshin et al. se sont penchés eux aussi sur le matériau de Rocknest par l’utilisation de la
pyrolyse grâce au SAM (Sample Analysis on Mars). De nombreux composés volatiles
ont pu être observés, provenant probablement de la composante amorphe. Par
ordre décroissant d’abondance, ils ont trouvé les molécules suivantes : H2O,
SO2, CO2 et O2. Du beau monde…
Il est très probable, selon les spécialistes que l’eau (H2O) est contenue dans le composé amorphe et que le CO2 a été libéré via la décomposition de carbonates de fer et de magnésium que n’avait pas réussi à voir CheMin de par leur faible abondance (inférieure à 2%).
Ses 10 instruments ont été
déployés et exploités sur différents types de matériaux durant les 100 premiers
jours martiens de la mission, incluant des analyses de roches, de sol et
d’atmosphère. Curiosity a été envoyé pour étudier prioritairement une zone
appelée le cratère Gale, où une grande diversité de matériaux avait été
observée depuis les instruments en orbite.
Bien évidemment, un focus avait
été fait sur les matériaux montrant des interactions avec un environnement
aqueux. Mais la mission devait également
caractériser la diversité géologique du site d’amarsissage à différentes
échelles : des ejecta d’impact, des éléments de sols et des accumulations
de sédiments fins transportés par les vents.
Deux points d’arrêt notables se
sont trouvés sur les 500 premiers mètres parcourus par le rover, le premier est
un gros rocher, qui a reçu le nom de Jake_M,
et le second est un amoncellement de sable et de poussière, dénommé Rocknest.
Poudre de sol prête à l'analyse par CheMin (NASA/JPL-Caltech) |
Durant les 100 premiers jours de
la mission, l’instrument ChemCam à produit plus de 10000 spectres grâce à son
laser qui lui permet ainsi de caractériser la diversité des matériaux par leur
surface. Le ChemCam peut également distinguer les composants du sol en fonction
de la taille de grains. Ce que montrent Meslin
et al. dans ce supplément de Science, c’est que les gros grains du
sol sont plutôt des grains de type « felsique », riches en silicium
et en aluminium, très similaires à la composition des fragments de roches plus
gros rencontrés par Curiosity sur son chemin. Cela les amène à conclure qu’une
grande partie du sol est constituée de tout petits morceaux de roches, des
grains de sable issus de la fragmentation. En revanche, les grains plus petits
qu’un millimètre, eux, sont différents, de type « mafique », très
similaires à ce qui avait été observé il y a quelques années par les missions
de rovers précédentes.
Le tas de sable et de poussière Rocknest, lui, a été analysé par
l’instrument CheMin par diffraction
de rayons X, ainsi que par le APXS (Alpha Particle X-Ray spectrometer). Les
résultats diffèrent quelque peu en fonction des techniques d’analyse utilisées,
mais il apparaît que la majorité du
dépôt est de composition cristalline d’origine basaltique (entre 55% et 71%) et
l’autre part composée de matériaux amorphes, probablement des oxydes de fer.
SAM avant son installation sur le rover (NASA) |
Il est très probable, selon les spécialistes que l’eau (H2O) est contenue dans le composé amorphe et que le CO2 a été libéré via la décomposition de carbonates de fer et de magnésium que n’avait pas réussi à voir CheMin de par leur faible abondance (inférieure à 2%).
Une analyse isotopique de l’eau
et du CO2 a par ailleurs montré que ces molécules étaient semblables
à celles rencontrées dans l’atmosphère martienne.
SAM a également mis en évidence
la présence d’autres composés chimiques comme des chlorures oxygénés, tout à
fait similaires à d’autres composés du même type trouvés par des missions
antérieures très éloignées du cratère Gale, ce qui suggère que leur
accumulation reflète un processus global au niveau de la planète…
Références :
The Petrochemistry of
Jake_M: A Martian Mugearite
E. M. Stolper et al.
Science (27 September
2013) Vol. 341 no. 6153
Soil Diversity and
Hydration as Observed by ChemCam at Gale Crater, Mars
P.-Y. Meslin et al.
Science (27 September
2013) Vol. 341 no. 6153
X-ray Diffraction
Results from Mars Science Laboratory: Mineralogy of Rocknest at Gale Crater
D. L. Bish et al.
Science (27 September
2013) Vol. 341 no. 6153
Curiosity at Gale
Crater, Mars: Characterization and Analysis of the Rocknest Sand Shadow
D. F. Blake et al.
Science (27 September
2013) Vol. 341 no. 6153
Volatile, Isotope,
and Organic Analysis of Martian Fines with the Mars Curiosity Rover
L. A.
Leshin et al.
Science (27 September
2013) Vol. 341 no. 6153
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