Les rayons cosmiques "galactiques", provenant de notre galaxie, peuvent atteindre des énergies de l'ordre de quelques Peta-electronvolts (1015 eV). Ces particules ne sont pas nées avec cette énergie colossale, elles ont subi un mécanisme d'accélération. Un ou des grands accélérateurs existent donc quelque part dans notre Galaxie... mais leur nature est encore controversée.
Les chercheurs de la collaboration HESS (High Energy Stereoscopic System) qui recherchent des rayons cosmiques ultra-énergétiques en observant les traces qu'ils laissent dans l'atmosphère terrestre, viennent de publier une étude dans la revue Nature, dans laquelle ils montrent la présence de protons ultra-énergétiques en provenance directe du noyau de notre Galaxie, avec une énergie de l'ordre du PeV. Ils en déduisent, après avoir éliminé toutes les autres sources possibles, que ces particules seraient produites par le trou noir supermassif Sgr A* qui se trouve au centre de la Galaxie.
Les astrophysiciens des particules de HESS se sont intéressés à la partie centrale de la Voie Lactée, qu'on appelle la "zone moléculaire centrale", une région qui entoure le centre galactique sur quelques centaines d'années-lumière et qui contient de grandes quantités de gaz moléculaire (de l'hydrogène).
La cartographie des rayons gamma de très haute énergie (supérieure à 1013 eV) qu'ils ont produite pour cette région de la galaxie à partir de données accumulées durant 10 ans, indique l'existence d'une forte corrélation entre la luminosité et la position de complexes denses de gaz. Cette information mène les chercheurs sur la piste d'une source hadronique pour ces rayons gamma : ils seraient produits par des interactions de protons de très haute énergie avec le gaz environnant.
L'autre possibilité aurait été le mécanisme de la diffusion Compton inverse, où des photons sont impactés par des électrons ultra-énergétiques qui leur transfèrent une grande partie de leur énergie, mais cette solution s'avère impossible car des électrons de ce type auraient perdu trop d'énergie au sein du gaz et n'auraient pas pu atteindre toute la zone moléculaire centrale où sont observés les rayons gamma. L'origine hadronique (des protons) semble donc la plus robuste.
La position et l'historique d'injection de particules du grand accélérateur qui est à l'origine de ces rayons cosmiques ultra-relativistes déterminent la distribution spatiale des protons, qui à leur tour, avec la distribution spatiale de la zone gazeuse, façonnent la morphologie de la zone moléculaire centrale telle qu'elle est vue en rayons gamma par HESS.
Les astrophysiciens en concluent à la nécessaire présence d'un ou de plusieurs grands accélérateurs, qu'ils nomment "PeVatron" et qu'ils cherchent à identifier en éliminant les différentes solutions possibles. Parmi celles-ci on trouve des résidus de supernovas, notamment lorsque ces explosions d'étoiles sont entourées initialement d'une coquille de gaz. On trouve également des amas d'étoiles expulsant des vents de particules particulièrement intenses, ainsi que des structures appelées "filaments radio" qui sont des zones du centre galactique à forte émission radio, associée à l'existence de flux intenses de particules chargées énergétiques. Mais finalement, la seule solution qui résiste à l'analyse est, selon les chercheurs de HESS, une origine liée au trou noir supermassif Sgr A*.
Les protons pourraient être accélérés dans la zone d'accrétion, au plus près du trou noir. Les chercheurs relèvent que le taux d’accélération nécessaire pour produire les protons observés indirectement est environ 100 à 1000 fois plus élevé que ce qui est déduit aujourd'hui des observations de Sgr A*. L'énergie nécessaire représenterait environ 1% de l'énergie produite aujourd'hui par le phénomène d'accrétion de matière autour du trou noir.
Etant donné que le taux d'accrétion actuel de SgrA* est faible et qu'il a très probablement été plus important dans le passé, les chercheurs de la collaboration HESS spéculent qu'un taux d'accrétion plus élevé dans le passé a pu produire plus de protons ultra énergétiques. Ils font le calcul qu'avec un taux d'accélération 100 fois plus élevé que la valeur actuelle durant les 10 derniers millions d'années, on parvient a expliquer complètement la quantité de rayons cosmiques observés aujourd'hui aux environs de 1 PeV.
Si cette explication s'avère correcte, la longue controverse sur l'origine des rayons cosmiques galactiques pourrait enfin arriver à son terme.
Source :
Acceleration of petaelectronvolt protons in the Galactic Centre
HESS Collaboration
Nature online (16 March 2016)
http://dx.doi.org/10.1038/nature17147
L'autre possibilité aurait été le mécanisme de la diffusion Compton inverse, où des photons sont impactés par des électrons ultra-énergétiques qui leur transfèrent une grande partie de leur énergie, mais cette solution s'avère impossible car des électrons de ce type auraient perdu trop d'énergie au sein du gaz et n'auraient pas pu atteindre toute la zone moléculaire centrale où sont observés les rayons gamma. L'origine hadronique (des protons) semble donc la plus robuste.
La position et l'historique d'injection de particules du grand accélérateur qui est à l'origine de ces rayons cosmiques ultra-relativistes déterminent la distribution spatiale des protons, qui à leur tour, avec la distribution spatiale de la zone gazeuse, façonnent la morphologie de la zone moléculaire centrale telle qu'elle est vue en rayons gamma par HESS.
Les protons ultra-relativistes ne produisent pas seulement des photons gamma de haute énergie au cours de leurs interactions, ils produisent également des neutrinos et des électrons, via la production et la désintégration consécutive de mésons π0, π+ et π− . Les particules secondaires (photons gamma, électrons et neutrinos), emportent environ 10% de l'énergie initiale des protons. Les photons gamma de plusieurs TeV détectés par les télescopes Cherenkov de HESS fournissent à eux seuls, grâce aux propriétés morphologiques des sources et à leurs propriétés spectrales, une très bonne idée des sites d’accélération et permettent d'étudier la propagation des protons accélérés jusque 1 PeV.
Les protons pourraient être accélérés dans la zone d'accrétion, au plus près du trou noir. Les chercheurs relèvent que le taux d’accélération nécessaire pour produire les protons observés indirectement est environ 100 à 1000 fois plus élevé que ce qui est déduit aujourd'hui des observations de Sgr A*. L'énergie nécessaire représenterait environ 1% de l'énergie produite aujourd'hui par le phénomène d'accrétion de matière autour du trou noir.
Etant donné que le taux d'accrétion actuel de SgrA* est faible et qu'il a très probablement été plus important dans le passé, les chercheurs de la collaboration HESS spéculent qu'un taux d'accrétion plus élevé dans le passé a pu produire plus de protons ultra énergétiques. Ils font le calcul qu'avec un taux d'accélération 100 fois plus élevé que la valeur actuelle durant les 10 derniers millions d'années, on parvient a expliquer complètement la quantité de rayons cosmiques observés aujourd'hui aux environs de 1 PeV.
Si cette explication s'avère correcte, la longue controverse sur l'origine des rayons cosmiques galactiques pourrait enfin arriver à son terme.
Source :
Acceleration of petaelectronvolt protons in the Galactic Centre
HESS Collaboration
Nature online (16 March 2016)
http://dx.doi.org/10.1038/nature17147
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