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mercredi 12 octobre 2016

La plus vaste carte des vides et des superamas de galaxies résout un mystère cosmologique

Une équipe d'astrophysiciens vient de produire la plus vaste carte des vides et des superamas de galaxies de l'Univers observable, ce qui permet de résoudre un mystère cosmologique apparu il y a 10 ans.




L'équipe de l'Université de Portsmouth menée par Seshadri Nadathur ont exploité un effet appelé l'effet intégré Sachs-Wolfe (ISW). L'effet ISW est dérivé de la Relativité Générale, il implique que l'effet de la constante cosmologique (énergie noire) agit légèrement différemment sur la lumière provenant du fond diffus cosmologique selon qu'elle a traversé une zone vide de matière ou au contraire une zone très fournie, typiquement là où se trouvent des superamas de galaxies. Pour faire court, l'effet ISW prédit que les zones de vide doivent apparaître très légèrement plus froides et les zones peuplées de matière très légèrement  plus chaudes que la normale. 
Les astrophysiciens ont utilisé une nouvelle technique permettant de faire des mesures très précises de cet effet. Une  mesure du même type avait été effectuée en 2008 par une équipe de l'Université de Hawaï et avait obtenu des résultats très étonnants : l'effet semblait être 5 fois plus fort que ce que prévoyait la Relativité Générale... C'est pour creuser cette problématique que Seshadri Nadathur et ses collaborateurs se sont lancés dans une nouvelle mesure de l'effet ISW, avec cette fois-ci une carte des vides et des superamas entièrement refaite.
Pour cela, les astronomes anglais ont utilisé plus de 750 000 galaxies identifiées dans le grand relevé  Sloan Digital Sky Survey. Le catalogue qu'ils ont exploité est ainsi plus de 300 fois plus gros que celui de l'étude de 2008.
Seshadri Nadathur et ses collègues ont ensuite utilisé des grandes simulations numériques de l'Univers pour prédire la force de l'effet ISW correspondant. Il faut préciser qu'il s'agit d'un effet très faible, et donc très délicat à mettre en évidence. En appliquant ensuite les valeurs obtenues sur les données du CMB du satellite Planck, ils parviennent à faire une mesure très précise de l'effet ISW des vides et des superamas. Et ce qu'ils trouvent, c'est, contrairement à l'étude de 2008, un très bon accord avec les prédictions de la Relativité Générale.

Mais ces mesures ont aussi renforcé un autre petit mystère : celui dit du Point Froid du CMB. Le Point Froid du CMB est une zone dans la carte du fond diffus cosmologique qui apparaît anormalement froide, elle est située en bas à droite de la carte. Or il avait été suggéré que le Point Froid pourrait être dû à l'effet ISW, par exemple à cause de la présence d'un vide géant, qui a été observé dans cette région du ciel justement. Mais ces nouveaux résultats sur l'effet ISW montrent que le vide géant observé n'est pas assez grand pour expliquer le Point Froid du CMB.
Il avait même été imaginé l'existence d'effets gravitationnels exotiques qui expliquaient à la fois le Point Froid et les résultats anormaux de 2008 sur l'ISW. Ces idées doivent être maintenant jetées à la poubelle : le mystère de l'effet ISW  est résolu, mais le mystère du Point Froid, lui, persiste.


Source : 

A Detection of the Integrated Sachs-Wolfe imprint of Cosmic Superstructures using a matched-filter approach 
Seshadri Nadathur et al.
The Astrophysical Journal, 2016; 830 (1): L19 (11 october 2016)


Illustration :

La carte du fond diffus cosmologique (CMB). Le Point Froid est indiqué par le cercle (University of Portsmouth)

3 commentaires:

  1. Ils sont formidables ces astrophysiciens. Ça valait le coup de vérifier avec les grands moyens

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  2. J'ai un peu de mal avec les effets SW et ISW. Si j'ai bien compris,

    Sur place, les zones + denses sont + chaudes

    Pour un observateur extérieur, dans les grandes zones dont sont originaires les photons, l'effet SW fait paraître + froides les zones + denses

    En revanche c'est l'inverse pour l'effet ISW, mais il concerne les zones traversées par le photon, pas celle dont il est originaire, et contrairement au précédent il dépend de l'accélération de l'expansion

    Finalement, quel est l'effet prédominant dans l'aspect du CMB ? Par exemple la zone anormalement "froide" correspond-elle à un hypo ou à une hyper densité de la surface de dernière diffusion ?

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  3. Vous avez tout à fait bien compris la différence entre effets SW et ISW. Concernant le Cold Spot du CMB, les auteurs de cette étude montrent que l'ISW ne permet pas de l'expliquer par le vide de cette région. L'hypothèse à retenir pour le moment est donc une surdensité de la surface de dernière diffusion dans cette région. La surdensité produit un décalage vers le rouge gravitationnel (effet SW), donc une zone plus "froide".

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Merci !