Des planétologues ont reconstruit la collision géante qui a produit l'un des plus gros cratères de la Lune il y a 3,8 milliards d'années. Ils l'ont observé via le champ gravitationnel lunaire, puis ont simulé les premières heures qui ont suivi l'impact et identifient les processus à l'origine de ce bassin d'impact à multiples anneaux.
Les chercheurs de l'équipe de Maria Zuber (MIT) ont exploité les données des sondes américaines GRAIL (Gravity Recovery and Interior Laboratory) et parviennent à montrer que ce bassin vieux de 3,8 milliards d'années a été créé par un impact géant qui a produit un premier cratère de plus de 450 km de diamètre. Les calculs montrent que l'impact aurait projeté 3,4 millions de kilomètres cube de croûte lunaire. Ce matériau éjecté, d'après la simulation, s'est propagé à la manière d'une grande vague qui s'est par la suite écrasée sur la surface lunaire, en produisant au passage de grandes failles sur toute la croûte et deux murs de roches concentriques, s'élevant à plusieurs kilomètres d'altitude. Ces événements se seraient déroulés en seulement quelques heures.
Dans la simulation ci-dessous du bassin Orientale vu de profil créée par Brandon Johnson et ses collaborateurs, montrant l'impact et la formation des structures annulaires, les couleurs indiquent la température. Cette simulation en accéléré retrace un peu plus de deux heures suivant l'impact.
L'énergie de la collision échauffe instantanément la croûte lunaire dans les zones proches du cratère, et la matière s’élève à plus de 100 km d'altitude avant de retomber à la surface. Le matériau pulvérisé continue à osciller durant plusieurs heures avant de prendre la forme qu'il a toujours aujourd'hui. Les planétologues ont cherché à retrouver les observations de GRAIL en variant les paramètres de leur simulation, ce qui leur permet de remonter à la taille de l'objet qui a produit ce cataclysme. Il aurait fait une diamètre de 60 kilomètres et aurait frappé la Lune à une vitesse de 15 km/s (54 000 km/h).
Les deux sondes GRAIL sont passées au dessus du bassin Orientale à très basse altitude en 2012, à peine à 2000 mètres d'altitude, ce qui a permis d'obtenir des mesures du champs gravitationnel lunaire de cette zone avec une grande résolution. Le bassin Orientale avait été choisi pour être le bassin d'impact semblant le mieux préservé depuis sa formation.
Ce qui est intéressant, c'est la date de cet impact: il y a 3,8 milliards d'années. C'est l'époque où les premières formes de vie émergeaient sur la Terre. Si un tel impact catastrophique a eu lieu sur la Lune, on peut logiquement penser qu'il devait y en avoir des similaires sur la Terre à la même époque. La vie sur Terre a-t-elle connu plusieurs départs ? L'environnement était en tous cas pour le moins hostile, et c'est peut-être une raison pour laquelle la vie est si résistante aujourd'hui.
Sources :
Gravity field of the Orientale basin from the Gravity Recovery and Interior Laboratory Mission
Maria T. Zuber et al.
Science Vol. 354, Issue 6311, pp. 438-441 (28 Oct 2016)
Formation of the Orientale lunar multiring basin
Brandon C. Johnson et al.
Science Vol. 354, Issue 6311, pp. 441-444 (28 Oct 2016)
Illustrations :
1) Le bassin d'impact Orientale (Ernest Wright/NASA/GSFC Scientific Visualization Studio)
2) Simulation de l'impact à l'origine du bassin Orientale (Brandon Johnson et al.)
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