jeudi 31 mai 2018

Un trou noir serait né de la fusion des deux étoiles à neutrons dans l'événement gravitationnel GW170817


La fusion des deux étoiles à neutrons à l'origine de l'événement gravitationnel GW170817 de l'été dernier a très probablement produit un trou noir. Cette conclusion est le résultat de l'analyse de données en rayons X obtenues avec le télescope spatial Chandra dans les mois qui ont suivi l'événement cataclysmique.




La question s'est posée dès le lendemain de la découverte de cette fusion d'étoiles à neutrons via des ondes gravitationnelles et des signaux électromagnétiques : la fusion a-t-elle généré une grosse étoile à neutrons ou bien un petit trou noir ? Une observation avec le télescope Chandra dédié à l'astronomie X avait été effectuée deux à trois jours après le 17 août 2017, mais sans détecter de source de rayons X. Mais des observations ultérieures, 9, 15 et 16 jours après la fusion ont produit des résultats. La région du ciel fut ensuite inobservable pendant plusieurs longues semaines pour Chandra à cause du Soleil. Mais 110 jours et 160 jours plus tard (en décembre et janvier dernier), de nouvelles observations ont pu être effectuées sur ce nouvel objet du ciel. Si la fusion avait produit une grosse étoile à neutrons, celle-ci aurait généré un champ magnétique très intense, avec une rotation importante, créant par là même un vent de pulsar (des particules énergétiques) à même de produire une émission de rayons X intense. Mais les observations de Chandra montrent au contraire une émission de rayons X qui est inférieure de plusieurs centaines de fois à ce qu'elle aurait été dans ce cas. 
Les seules hypothèses que font les astrophysiciens américains est que l'énergie de ralentissement du potentiel pulsar résiduel aurait une efficacité de 0,001 dans sa conversion en émission X de vent de pulsar, pour un champ magnétique B compris entre 3 1011 G et 1014 G.
En comparant avec des données en ondes radio obtenues avec le Karl Jansky Very Large Array, les chercheurs parviennent à expliquer que l'émission X peut être dûe uniquement à l'onde de choc résultante sur le gaz environnant. Il n'y a aucun signe de rayons X provenant d'une étoile à neutrons, selon David Pooley (Trinity University, San Antonio, Texas) et ses collaborateurs qui publient leurs résultats dans The Astrophysical Journal Letters. Ils en concluent donc naturellement que si il n'y a pas d'étoile à neutron résultante, il doit s'agir d'un trou noir.

Indépendamment d'hypothèses sur l'efficacité de conversion d'énergie de rotation en rayons X, si le résidu était en fait une étoile à neutrons magnétisée en rotation rapide, l'énergie totale dans le choc externe devrait augmenter d'un facteur 100 après quelques années seulement. Le suivi de l'intensité X dans les deux ans qui viennent devrait donc montrer clairement la nature du résidu.

Connaître la nature du résidu compact de l'événement GW 170817 est bien sûr extrêmement important. Comme on connaît sa masse (2,7 masses solaires), s'il s'agit d'une étoile à neutron, ce serait l'étoile à neutrons la plus massive jamais observée et pourrait remettre en questions certains modèles, et s'il s'agit bien d'un trou noir, c'est tout simplement le plus petit trou noir que nous connaissons, le précédent record de faible masse étant d'environ 4 masses solaires.


Source

GW170817 Most Likely Made a Black Hole
David Pooley, Pawan Kumar, J. Craig Wheeler, Bruce Grossan
à paraître dans The Astrophysical Journal Letters


Illustration

Vue d'artiste de l'événement GW170817 et signal mesuré par Chandra en août/septembre puis en décembre 2017
(NASA/CXC/Trinity University/D. Pooley et al.; NASA/CXC/M.Weiss)

1 commentaire :

Pascal a dit…

Bonjour,

Selon vos 2 derniers posts, la limite d'Oppenheimer-Volkoff semble donc en passe d'être plus précisément encadrée, entre 2.3 et 2.7 Mo, et avec elle nos idées sur la structure des étoiles à neutrons. Sait-on si cette limite dépend du mode de formation (fusion ou effondrement) ?