Une grosse galaxie formant énormément d'étoiles mais qui est quasi invisible vient d'être mise en évidence dans l'Univers âgé de seulement de 1,3 milliards d'années uniquement grâce à ALMA. Cela ressemble fortement avec une autre découverte publiée au début du mois d'août (voir là) à propos de galaxies massives situées 2 milliards d'années après le Big Bang. Une étude parue dans The Astrophysical Journal.
C'est par sérendipité que Christina Williams (Université de l'Arizona) et ses collaborateurs ont trouvé cette source rayonnant à une longueur d'onde de 3 mm, ainsi qu'une autre un peu plus proche. Ce qui est surprenant avec ce qui s'avère bien être une galaxie mais très obscurcie par de très grandes quantités de poussière (comme dans le cas des galaxies trouvées dans l'étude du mois d'août), c'est qu'elle n'est pas détectée par d'autres télescopes que ALMA. Aucune contrepartie dans d'autres longueurs d"ondes n'est observée, ni en optique, ni en proche infra-rouge. Christina Williams et ses collaborateurs l'ont nommée 3MM-1.
Le spectre en énergie est bien reproduit selon les chercheurs si on considère qu'il s'agit d'une galaxie contenant 63 milliards de masses solaires en étoiles et 100 milliards de masses solaires en gaz, mais avec un taux de formation d'étoiles de 300 étoiles/an ! Ce taux de formation est énorme, environ 300 fois plus intense que celui de notre bonne vieille Voie Lactée. Si cette galaxie a connu le même taux de formation stellaire depuis sa naissance, cela signifierait qu'elle aurait grossi jusqu'à son état actuel en seulement 210 millions d'années...
Cette classe de galaxies très difficilement détectables car fortement obscurcies par la poussière sont appelées des Dust-obscured Star-Forming Galaxies (DSFG). C'est la poussière échauffée qui rayonne et qui les rend visibles par ALMA.
Les astrophysiciens commencent maintenant à se dire qu'ils ont mis à jour une toute nouvelle population de galaxies : des galaxies qui grossissent très vite et qui ont déjà une dimension proche de celle des galaxies de l'Univers local dans l'Univers âgé de moins de 2 milliards d'années. Ils confortent leur idée par le fait que le relevé qui leur a permis de découvrir cette DSFG couvre une très petite portion du ciel : 8 minutes d'arc carré (environ un centième du disque lunaire). Il pourrait donc logiquement exister une quantité énorme de telles galaxies réparties un peu partout selon eux. La majorité des galaxies massives pourraient même être composée par ces galaxies très difficilement détectables pour les astrophysiciens américains et australiens.
Christina Williams et ses collègues calculent quel serait le taux de formation stellaire moyen, à cette époque reculée (un redshift de 5, soit un Univers âgé de 2 milliards d'années), ils obtiennent une valeur de 0,009 masses solaires produites par an dans un volume cubique de 3,26 millions d'années-lumière de côté (1 Mpc3). Ainsi, en 100 millions d'années à cette époque, il se formerait en moyenne 90 000 masses solaires d'étoiles dans un tel volume d'Univers. C'est une moyenne sur tout l'espace, sachant que les galaxies sont concentrées et qu'il y en a beaucoup moins en moyenne d'une dans 1 Mpc3.
Les astrophysiciens attendent maintenant avec de plus en plus d'impatience le lancement et la mise en service du télescope spatial Webb (lancement prévu en mars 2021) parce qu'il pourra "voir" à travers la poussière et révéler à quoi ressemble vraiment ces déjà grosses galaxies qui sont en train de grossir toujours plus, dans le but de comprendre pourquoi nos modèles théoriques ne les expliquent pas à cette époque encore précoce de l'Univers.
Source
Discovery of a Dark, Massive, ALMA-only Galaxy at z ~ 5–6 in a Tiny 3 mm Survey
Christina C. Williams et al.
The Astrophysical Journal, Volume 884, Number 2 (22 october 2019)
Illustration
Images de 3MM-1 en ondes millimétrique par ALMA (cercle rouge, à gauche) et en infra-rouge (à droite)
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