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14/01/20

Une étoile donne l'âge d'une ancienne collision galactique


L'observation fine d'une seule étoile, nu Indi, a permis la datation d'une très ancienne collision de notre Galaxie avec la galaxie naine satellite Gaia-Enceladus. Une étude parue dans Nature Astronomy.



11,6 milliards d'années, c'est l'âge de cette collision entre galaxies obtenu par William Chaplin (University of Birmingham) et ses collaborateurs en étudiant l'étoile nu Indi. Nu Indi est une étoile sous-géante pauvre en métaux, quasi visible à l'oeil nu dans l'hémisphère sud (constellation de l'Indien). On sait qu'elle a été affectée par la collision entre Gaia-Enceladus et la Voie Lactée de par sa position et sa composition relative en métaux.  Lors de telles collisions entre une grosse galaxie et une plus petite, la petite apporte des étoiles qui ont une composition chimique un peu différente, de plus, le mouvement de nombreuses étoiles se trouve modifié, et une grande quantité de nouvelles étoiles apparaissent par condensation de nuages de gaz qui ont été fortement perturbés.  
Gaia-Enceladus n'est qu'une parmi plusieurs galaxies qui ont rencontré la Voie lactée depuis sa naissance il y a environ 13 milliards d'années. 
C'est le télescope spatial TESS (Transiting Exoplanet Survey Satellite) chasseur d'exoplanètes qui a été utilisé pour étudier 𝜈 Indi, durant son premier mois d'activité. TESS est adapté pour détecter de très faibles variations de luminosité des étoiles, comme le passage récurrent de planètes devant leur étoile. Mais il peut aussi étudier comment oscillent naturellement les étoiles et faire ce qu'on appelle de l'astérosismologie. Mais Chaplin et ses collaborateurs ne se sont pas contenté des données de TESS, ils ont aussi étudié l'étoile avec des données archivées des télescopes terrestres de l'ESO de 3,6 m et 2,2 m de l'Observatoire de La Silla (en spectroscopie) ainsi qu'avec le télescope spatial astrométrique Gaia, pour déterminer précisément la vitesse de l'étoile en plus de sa position. Les mesures d'astérosismologie leur ont permis de déterminer précisément la composition chimique des couches internes de l'étoile. La conclusion des chercheurs est claire : 𝜈 Indi faisait jadis partie du halo de notre galaxie, mais sa trajectoire semble avoir brutalement été modifiée puisque sa vitesse actuelle ne la ramène pas vers le halo lorsqu'on la déroule en arrière. Si la trajectoire a bien été modifiée par la collision galactique, cela signifie que l'étoile existait déjà à cette époque. Il suffit alors de trouver l'âge de l'étoile pour fixer un âge minimal pour la collision entre Voie Lactée et Gaia-Enceladus.  
Pour déterminer l'âge de 𝜈 Indi, Chaplin et ses collaborateurs exploitent les données astérosismologiques, ses vibrations (ou oscillations) naturelles. Elles offrent la possibilité de déterminer la composition des couches internes de l'étoile et par là même son âge. 
Le résultat de la datation de Nu Indi est qu'elle est âgée de 11 ± 0,8 milliards d'années. Les astrophysiciens en déduisent alors que la collision galactique a pu se produire au plus tôt il y a 13,2 milliards d'années (avec un niveau de confiance de 95%) et il y a 11,6 milliards d'années (avec un niveau de confiance de 68%). 
L'âge précédemment estimé par les astrophysiciens pour la collision avec Gaia-Enceladus était de 10 milliards d'années (voir ici).
Des calculs théoriques, fondés sur des modèles cosmologiques "hiérarchiques" de formation galactiques, indiquent quant à eux qu'il est peu probable que la collision entre Voie Lactée et Gaia-Enceladus ait eu lieu avant la formation de ν Indi.

Il est important de connaître l'histoire exacte du passé mouvementé de notre galaxie, d'autant que de nombreuses étoiles résiduelles de Gaia-Enceladus sont toujours visibles aujourd'hui, et les spécialistes pensent que la collision a dû avoir un impact important sur l'évolution de la Voie Lactée. Le télescope TESS, par ces résultats, prouve que sa puissance va bien au-delà de la simple recherche d'exoplanètes.


Source 

Age dating of an early Milky Way merger via asteroseismology of the naked-eye star ν Indi
William J. Chaplin et al.
Nature Astronomy (13 january 2020)


Illustration

Vues d'artiste des traces de la fusion ancienne entre la Voie Lactée et Gaïa-Enceladus, les flèches jaunes indiques les positions et vitesses des étoiles  (ESA; Koppelman, Villalobos and Helmi; NASA/ESA/Hubble)

2 commentaires:

  1. Bonjour Eric,
    Vous dites:
    "... 𝜈 Indi faisait jadis partie du halo de notre galaxie, mais sa trajectoire semble avoir brutalement été modifiée puisque sa vitesse actuelle ne la ramène pas vers le halo lorsqu'on la déroule en arrière..."
    Je n'imagine pas comment on peut remonter en arrière la trajectoire d'une étoile sur 11 milliards d'années!
    Alors que par comparaison, sur le même temps, les étoiles de la galaxie ont fait quelque chose comme 45 tours complets...

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  2. @ Youx

    Si j'ai bien compris (Eric pourra confirmer), il n'est pas question de suivre précisément la trajectoire de nu indi, mais d’inférer, de sa cinématique actuelle, de son age, et de sa région d'origine du halo (elle-même déduite de ses caractéristiques chimiques) qu'elle a été perturbée (cinématiquement réchauffée) par la fusion galactique : "The asteroseismic age is consistent with the claim that stars in the region of [Mg/Fe]-[Fe/H]
    space that includes ν Indi were heated kinematically by the Gaia-Enceladus merger". Le but de l'article étant de contraindre la limite supérieure d'age de la fusion par la mesure asterosismologique de l'age de l'étoile.

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Merci !