Une équipe américaine a réussi à observer dans le détail les galaxies hôtes de 8 sursauts rapides d'ondes radio (FRB, Fast Radio Bursts) et les ont localisés à moins de 1 seconde d'arc au sein de leur galaxie respective. Les chercheurs peuvent ainsi étudier l'environnement proche des FRB et le comparer avec celui d'autres événements transitoires comme les GRB et les supernovas. Une étude à paraître dans The Astrophysical Journal intitulée A High-Resolution View of Fast Radio Burst Host Environments.
Alexandra Mannings (Université de Californie, Santa Cruz) et ses collaborateurs ont utilisé le vénérable télescope spatial Hubble pour tenter de caractériser l'environnement immédiat de plusieurs FRB dont trois sont des FRB répétitifs, et parmi eux le premier du genre et resté célèbre FRB 121102. Ils ont étudié en tout 8 galaxies hôtes de FRB et ont pu quantifier la distribution spatiale moyenne des FRB grâce à leur localisation par rapport à la distribution de la lumière UV et infra-rouge de leur galaxie.
Les astrophysiciens trouvent que les FRB ne suivent pas la distribution spatiale qui est celle des GRB longs (associés aux supernovas), à celle des supernovas superlumineuses, ou encore à celle des GRB courts (associés aux fusions d'étoiles à neutrons). Et les chercheurs constatent également que la plupart des FRBs de l'échantillon ne se trouvent pas dans des régions où le taux de formation d'étoiles et la densité de surface de la masse stellaire sont élevés par rapport aux valeurs moyennes globales de leurs hôtes. 5 parmi les 8 se trouvent très clairement dans un bras spiral de leur galaxie hôte, vu en infra-rouge, et les 3 autres FRB bien localisés ont des positions qui sont cohérentes avec des bras spiraux même si les zones ne peuvent pas être nettement définies comme telles.
Le fait de trouver que les FRB se trouvent principalement dans les bras spiraux des galaxies donne des indications sur la nature de l'objet qui est à l'origine du phénomène Fast Radio Burst, au moins statistiquement. En effet, cela exclut certaines étoiles comme les plus jeunes et massives à enveloppe dépouillée ou encore les phénomènes du type fusion d'étoiles à neutrons, qui impliquent des progéniteurs ressemblant à des vestiges de vieilles étoiles, qu'on ne s'attend pas, pour les deux cas, à trouver avec une grande probabilité dans les bras spiraux galactiques. Au contraire on doit trouver dans les bras spiraux une grande quantité de jeunes, voire très jeunes étoiles promptes à exploser pour produire des magnétars qui ont une durée de "vie" active relativement courte.
Sur la base des observations disponibles à ce jour, la meilleure hypothèse concernant l'origine des FRB est qu'ils sont créés par des explosions provenant de magnétars. En avril 2020, un FRB dans notre galaxie a pu être attribué à un magnétar connu, apportant à l'hypothèse des preuves solides qui faisaient défaut jusqu'alors. Les résultats de Mannings et son équipe viennent donc conforter cette idée du magnétar, qui a l'avantage de pouvoir tout à fait exister en grand nombre au sein des bras spiraux galactique.
L'étude de Mannings et ses collaborateurs américains a de plus permis de confirmer le type de galaxie d'où proviennent les FRB, qui restait en débat. La plupart des grandes galaxies sont accompagnées de galaxies naines plus petites (la Voie Lactée, par exemple, est entourée d'une cinquantaine de galaxies naines, comme le Petit et le Grand Nuage de Magellan). Les précédentes tentatives d'observation des sources de FRB par des télescopes terrestres n'avaient pas permis de résoudre les images assez clairement pour déterminer si les FRB provenaient de la galaxie principale ou d'une galaxie naine cachée derrière elle. Cette nouvelle étude avec le télescope Hubble conclut que les FRB proviennent bien des galaxies principales et non des galaxies naines. Les FRB ont donc tendance à naître dans des galaxies jeunes, massives et en train de former des étoiles.
La promesse d'une localisation des FRB précise à la seconde d'arc pour résoudre la question des progéniteurs est en train de se réaliser, en partie, avec les premières études de leur environnement local et de leur galaxie hôte. Les FRB localisés avec précision vont continuer à être détectés à un rythme croissant dans les mois et années qui viennent. L'échantillon actuel des FRB bien localisés est encore petit (une quinzaine), et ceux bénéficiant d'une imagerie à haute résolution encore plus petit, et avec peut-être des biais de sélection. Avec un plus grand échantillon de FRB associés à une imagerie à haute résolution, les astrophysiciens seront en mesure d'identifier par exemple les tendances qui existent entre les emplacements des FRB uniques et des FRB répétitifs dans des galaxies hôtes de différents types morphologiques, et pourront les comparer avec d'autres phénomènes transitoires.
Un échantillon plus grand permettra également de comprendre si les FRB proviennent d'un canal unique et dominant ou bien de multiples canaux contributeurs. Il permettra enfin d'imposer des contraintes plus strictes sur les contributions locales aux mesures de dispersion des signaux radio qui sont utilisées dans les études de la matière noire et du milieu intergalactique. Les FRB pourront alors devenir des sondes cosmologiques optimisées.
Source
A High-Resolution View of Fast Radio Burst Host Environments
Alexandra G. Mannings et al.
accepté pour publication dans The Astrophysical Journal
Illustration
Localisation de 4 FRB parmi les 8 étudiés : de gauche à droite et de haut en bas : FRB 190714, FRB 191001, FRB 180924, et FRB 190608 (NASA, ESA, Alexandra Mannings (UC Santa Cruz), Wen-fai Fong (Northwestern), Alyssa Pagan (STScI))
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