Certains objets ne brillent pas
suffisamment pour être observables facilement. C’est le cas des galaxies dites
naines ou satellites, très petites et très peu lumineuses. On ne peut voir la
lumière de leurs étoiles que lorsqu’elles se trouvent à proximité de nous.
Dans le groupe Local auquel notre
galaxie appartient, nous n’avons pas pu observer autant de galaxies naines que
ce qu’on aurait dû d’après les modèles de formation des galaxies. Cette non observation commençait à mettre un
doute dans l’esprit des astrophysiciens spécialistes des galaxies.
Il fallait donc pouvoir en
observer ailleurs, plus loin autour de galaxies plus distantes de nous. Oui,
mais comment faire étant donné leur très faible luminosité ?
Vegetti et al ont eu l’idée
d’utiliser à nouveau le phénomène de lentille gravitationnelle pour trouver des
galaxies naines lointaines, et plus exactement leur masse. Cette équipe s’est
attelée à observer une galaxie distante appelée JVAS B1938+666, qui se trouve
produire un bel effet de lentille gravitationnel sous la forme d’un anneau
d’Einstein produit par la déformation complète de l’image d’une autre galaxie
encore plus lointaine, située en arrière-plan de cette galaxie lentille.
C’est grâce au télescope Keck de
10 m et son optique adaptative qu’ils ont pu parvenir à déterminer la
distribution de masse de la galaxie-lentille, par l’utilisation d’algorithmes
numériques très avancés. Ils en déduisent également quelle est la forme
réelle ainsi que la luminosité de la galaxie déformée.
Et que dit la distribution de
masse ? Elle montre qu’il existe un excès de masse - et elle permet de le
cartographier – qui ne peut pas appartenir à la galaxie-lentille. Ils
attribuent cet excès à une galaxie naine satellite, invisible car trop faible,
mais bien là.
C’est la première fois qu’une
galaxie naine peut être mise en évidence à une distance si lointaine (10 milliards d'années lumières). Cette
galaxie satellite est estimée faire 113 millions de masses solaires pour un
diamètre de 2000 années-lumière, ce qui la place définitivement dans la
catégorie des galaxies satellite, même si sa masse est beaucoup plus faible que
d’autres galaxies satellites (plus proches) découvertes récemment.
Cette galaxie satellite doit être
mise en regard avec la petite cinquantaine que l’on connaît déjà dans votre
voisinage du groupe Local et qu’on peut observer visuellement. A partir des
mesures de vitesse de leurs étoiles, ces galaxies naines montrent qu’elles sont
largement dominées par une composante massive non visible, de la matière noire.
Et c’est aussi à cause de cette forte masse (vraiment invisible) que la galaxie
satellite de JVAS B1938+666 a pu être
détectée par la modification de son effet de lentille gravitationnelle…
Mais les simulations qui sont basées
sur les modèles de formation de galaxies impliquant une grande quantité de
matière noire dite « froide », montrent qu’il devrait exister bien
d’avantage de galaxies satellites dominées par la matière noire dans le groupe
Local, que ce qui est actuellement observé. Le modèle est –il erroné ? Le
groupe Local est-il particulier ?
C’est dans ce questionnement que
la découverte de Vangetti et al. apparaît importante puisqu’elle permet de fournir
des informations sur un autre environnement que celui des
galaxies proches du groupe Local, et permet d’ores et déjà de conforter le
modèle impliquant la matière noire froide.
Elle montre également que de
telles mises en évidence – pas si évidentes- sont possibles, ce qui permet
d’envisager, si des observations de ce type se multiplient, d’améliorer
grandement notre connaissance sur l’origine de la prédominance de la matière
noire dans les galaxies, quelle que soit leur taille.
C'est assez fou que les travaux d'Einstein nous servent encore aujourd'hui à découvrir de nouvelles galaxies.
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