Le débat a longtemps fait rage
pour savoir quelle est l’origine exacte des supenovae de type Ia. Deux
principaux modèles s’affrontent, tous les deux ont en commun la présence d’un
système binaire. Mais c’est dans la nature des deux composantes et les processus
d’interaction entre les deux étoiles que les modèles divergent.
Le premier propose l’explosion
d’une étoile par effondrement suite à l’accrétion de matière provenant de sa
compagne : la naine blanche absorbe de la matière de sa compagne, qi peut être
une géante ou même une étoile « normale ». Lorsque la naine blanche
qui gagne ainsi de la masse dépasse la barre fatidique des 1,4 masses
solaires, l’effondrement irréversible a lieu, l’étoile explose.
Le résidu de SN 1572, vu en rayons X (Chandra X Ray Observatory), la supernova observée par Tycho Brahe en 1572 était une SN Ia |
Le second modèle, dit
« double dégénéré » propose un couple de naines blanches. Elles vont
se rapprocher inéluctablement au fil du temps pour finir par se rencontrer et
fusionner. Bien évidemment, la fusion réelle n’arrive jamais, puisque la masse
de Chandrasekhar est immédiatement dépassée et l’explosion a lieu assez vite.
Des astronomes américains
viennent d’annoncer lors du 223ème meeting de l’American Astronomical Society qu’ils ont pu observer deux
supernovae Ia avec des détails encore jamais atteints, et peuvent en conclure
sans se tromper qu’elles sont issues d’une fusion de deux naines blanches.
Le plus étonnant dans cette
découverte est peut-être la façon que ces astronomes ont utilisée pour détecter
et étudier l’évolution temporelle de la luminosité de ces supernovae. C’est
avec le télescope Kepler, dédié à la chasse aux explanètes (lorsqu’il
fonctionnait encore correctement) qu’ils ont observé ces explosions stellaires.
Le télescope de la NASA scrutait
environ 150000 étoiles de notre galaxie avec la possibilité de prendre des
clichés du même champ toutes les trente minutes. Or, derrière les étoiles que
Kepler pointait se trouvaient une multitude de galaxies lointaines.
Les données de Kepler fournissent
ainsi une image de très nombreuses galaxies toutes les demi-heures, avec une
performance pour la détection de très faibles variations de luminosité (adaptée
pour la découverte d’exoplanètes effectuant des transits devant les étoiles).
Il n’en fallait pas plus pour
donner un outil fantastique pour la découverte et le suivi dans le temps de
nouvelles supernovae lointaines, situées
dans d’autres galaxies. Rappelons qu’une supernova lors de son explosion, peut
devenir aussi brillante, voire plus, que la galaxie qui l’abrite…
Le télescope Kepler (NASA) |
C’est grâce à la précision
obtenue par le télescope Kepler que l’origine de ces supernovae a pu être déterminée
avec une grande confiance. En effet, s’il s’agissait d’un couple formé d’une
naine blanche et d’une étoile normale, le souffle de l’étoile explosant devrait
impacter sa compagne en produisant un échauffement qui produirait un surcroît
de luminosité qui serait visible dans les premiers jours suivant l’explosion.
Oiling et ses collaborateurs n’observent aucun sursaut de luminosité de ce type
dans leur deux supernovae. Ces observations éliminent définitivement la
possibilité que l’étoile compagne soit une étoile normale de type géante.
Depuis longtemps, le modèle de
fusion de deux naines n’était pas très apprécié dans la communauté des
spécialistes des supernovae, on pensait que l’étape finale de coalescence des
deux étoiles devait durer très longtemps, ce qui militait plus pour la
formation d’une étoile à neutrons (pour la plus massive des deux).
Mais le vent commença à tourner
vers 2010 où des astrophysiciens ont produit des simulations montrant que la
coalescence finale de deux naines blanches pouvait se passer en l’espace de
quelques minutes seulement, permettant le brusque changement de pression,
véritable étincelle à la poudrière stellaire.
Mais Craig Wheeler, un
astrophysicien de l’université du Texas, précise tout de même que le modèle de
fusion de deux naines blanches comporte tout de même quelques problèmes :
les simulations montrent des explosions d’étoiles par fusion de deux naines
blanches qui sont souvent asymétriques. Or les SN Ia ont toutes une symétrie
très sphérique. D’autre part, les mesures spectrales qui ont été faites sur ces
supernovae montrent une abondance en fer trop faible par rapport aux
simulations de fusion de naines blanches.
Le satellite Kepler a connu une
grosse défaillance mécanique en mai 2013 (sur ces roues gyroscopiques), suite à
laquelle il ne peut plus être orienté avec précision. Mais il pourrait toujours
fonctionner pour collecter la lumière. Et comme la recherche de supernovae
lointaines ne requiert pas un pointage précis comme celui de la recherche
d’exoplanètes, Oiling évoque l’idée de donner une seconde vie à ce merveilleux
outil pour observer des nouvelles supernovae.
La NASA doit annoncer ce qu’elle
décide de faire avec Kepler à l’été 2014…
Source :
Kepler clue to
supernova puzzle
Ron Cowen
Nature 505, 274–275 (16 January 2014)
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