Les
naines blanches sont des étoiles en fin de vie. Elles sont généralement très
chaudes à leur surface, mais il en est une qui vient de battre tous les records
de température dans sa catégorie avec ses 250 000 degrés, soit 50 000
degrés de plus que la précédente détentrice du record, déjà hors norme pour une
naine blanche. Elle se nomme RX J0439.8-6809, ou J0439 pour faire court.
J0439
se situe à environ 30 000 années-lumière dans la constellation de la Dorade.
Elle a été découverte il y a plus de 20 ans à l’aide de ROSAT, un satellite à
rayons X, grâce à ses émissions de rayons X de faible énergie. A l’origine, les
astronomes pensaient que J0439 se trouvait dans le Grand Nuage de Magellan
(galaxie naine satellite de notre galaxie), et qu’elle avait la particularité
de fusionner de l’hydrogène sur sa surface, ou bien encore qu’il ne s’agissait
pas d’une naine blanche mais d’une étoile à neutron en train d’accréter du gaz
échauffé à haute température.
Vue d'artiste d'une étoile naine blanche (Chandra X-Ray Observatory) |
Klaus
Werner et Thomas Rauch de l’Université de Tübingen ont réétudié finement J0439
à l’aide du télescope Hubble et parviennent à établir sa véritable position
(dans le halo de notre galaxie), sa composition (c’est bien une naine blanche)
et sa température (oh, surprise !).
Les
astronomes allemands ont exploité le spectrographe COS (Cosmic Origins Spectrograph) du télescope spatial Hubble. Ils
cherchaient en fait à expliquer l’observation antérieure d’une naine blanche
atypique montrant très peu d’hydrogène et d’hélium mais une température hors
norme de 200 000 degrés, l’étoile H1504+65.
Et c’est en analysant les spectres obtenus avec Hubble qu’ils sont tombés sur
celui de J0439 qui paraissait très
similaire à celui de l’étoile initialement étudiée. Après de plus amples
investigations en considérant une composition exotique similaire faite seulement
de carbone, d’oxygène et de néon, les chercheurs montrent que J0439 est une
sorte d’étoile jumelle de H1504+65, mais encore plus chaude, avec une
température de 250 000 degrés Kelvin.
La
position réelle de J0439 est à 9,2 kpc, soit environ 30 000 années-lumière de
nous, mais très en dessous du plan galactique, à 18 000 années-lumière
en-dessous, et elle en train de s’en écarter à la vitesse de 220 km/s. Werner
et Rauch déterminent également que J0439 est dans une phase de refroidissement
rapide et a dû atteindre un maximum de 400 000 K il y a environ seulement
1000 ans. La composition chimique visible est exotique car le carbone et
l’oxygène devraient être moins présents à sa surface et plus dans son cœur…
Par
ailleurs, J0439 a réservé une autre surprise à nos deux astrophysiciens, quand,
avec d’autres collaborateurs ils ont observé J0439 en ultra-violet cette fois-ci pour tenter de mieux la
caractériser… Le spectre UV indique la présence de gaz, mais ce gaz ne peut pas
faire partie de l’étoile. Il s’agit en fait de gaz situé dans la ligne de
visée, exactement entre l’étoile naine et le plan galactique. Des mesures du
décalage spectral montrent que ce nuage de gaz, lui, ne s’éloigne pas mais au
contraire, se dirige à grande vitesse vers le plan galactique à 150 km/s. Et la
composition chimique de ce nuage de gaz, obtenue par l’étude de son spectre,
indique qu’il ne provient pas de la Galaxie mais bien du milieu
intergalactique. Les caractéristiques de ce nuage de gaz apportent ainsi une
preuve supplémentaire, si on en doutait encore, que les galaxies peuvent
absorber du gaz du milieu intergalactique pour former plus tard des étoiles.
Klaus
Werner et Thomas Rauch ont ainsi fait deux découvertes fortuites très
intéressantes en cherchant une explication à l’existence d’une naine blanche
atypique par sa composition et sa température. Reste maintenant pour eux à
faire fructifier ces petites découvertes et trouver une explication à
l’existence de la naine blanche la plus chaude de la Galaxie.
Sources :
Analysis of
HST/COS spectra of the bare C–O stellar core H1504+65 and a high-velocity twin
in the Galactic halo
K. Werner and
T. Rauch
Astronomy &
Astrophysics Volume 584, A19 (December 2015)
High-velocity
gas toward the LMC resides in the Milky Way halo
P. Richter, K.
S. de Boer, K. Werner, T. Rauch
Astronomy
& Astrophysics, Volume 584, L6 (December 2015)
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