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vendredi 1 février 2019

Curiosity dévoile un sous-sol martien poreux dans le cratère Gale


Le sous-sol du cratère Gale, où évolue le rover Curiosity est moins dense que ce qu'on attendait. La densité des roches y a été mesurée grâce à une technique très originale consistant à mesurer les effets gravitationnels infimes produits par la variation des roches du sous-sol avec les données des accéléromètres du rover qui sont utilisés normalement pour contrôler les mouvements du robot.




L'équipe de planétologues américains menée par Kevin Lewis (Johns Hopkins University, Baltimore) publie ses résultats aujourd'hui dans Science. On le sait, Curiosity depuis son arrivée sur Mars il y a plus de 6 ans, n'a pas cessé de se déplacer dans le grand cratère Gale où il a atterri, passant du fond du cratère jusqu'aux aux flans de la proéminence qui le domine, le Mont Sharp (Aeolis Mons de son vrai nom). Pour se déplacer, Curiosity est muni d'accéléromètres et de gyroscopes, qui permettent de déterminer précisément son orientation et sa vitesse. Mais lorsque le rover fait des arrêts, ces senseurs peuvent encore être utilisés pour faire de la science, de la gravimétrie en l’occurrence.
Lewis et ses collaborateurs montrent comment ils ont exploité les données des accéléromètres enregistrées pendant les 5 premières années de voyage du robot dans le cratère Gale et sur les pentes de Aeolis Mons. Les chercheurs ont pu mesurer avec une très bonne précision le champ gravitationnel agissant sur le rover sur plus de 700 points le long de son trajet, depuis la plaine du fond du cratère Gale jusque sur ses pentes. Et des variations de champ gravitationnel, les planétologues en déduisent la densité de la roche sous-jacente. La valeur qu'ils trouvent est faible : seulement 1680 kg.m-3, alors qu'une mesure déduite des abondances minérales mesurées par l'instrument CMI (Chemistry and Mineralogy Instrument) de Curiosity indique une densité des grains présents à la surface du cratère d'environ 2810 g.cm-3. 

Cette mesure inédite et innovante indique donc que le sous-sol du cratère Gale et la base de Aeolis Mons est poreux, selon les chercheurs. Or les spécialistes pensaient jusqu'alors que les couches basses du Mont Sharp avaient été ensevelies depuis très longtemps par des sédiments, érodés au cours du temps. Des couches sédimentaires ont en effet été observées en 2009 sur Aeolis Mons par l'instrument HiRISE de Mars Reconnaissance Orbiter.

Un tel enfouissement sédimentaire aurait eu pour effet de compacter les couches basses, et donc de les rendre plus denses. Ce scénario ne serait visiblement pas tout à fait correct au vu de la porosité mesurée indirectement. Les sédiments n'auraient alors pas rempli tout le cratère, mais tout au plus seulement 1 à 2 kilomètres sur les 3 kilomètres de profondeur du grand cratère de 154 km de diamètre.

Il y a encore de nombreuses questions sur la formation de cette proéminence située presqu'au centre du cratère Gale qu'est le Mont Sharp. Cette nouvelle étude apporte une nouvelle pièce à l'édifice, qui ne sera peut-être pas la dernière si l'inventivité des ingénieurs et scientifiques du Jet Propulsion Laboratory trouvent encore d'autres moyens pour exploiter tous les instruments à leur disposition sur Curiosity, cette fois-ci pour sonder le sommet de Aeolis Mons.


Source

A surface gravity traverse on Mars indicates low bedrock density at Gale crater
Kevin W. Lewis et al.
Science  Vol. 363, Issue 6426, (01 Feb 2019)


Illustration

1) Le cratère Gale (NASA/JPL-Caltech/ASU/UA)

2) Visualisation du trajet de Curiosity au niveau du flanc nord du Mont Sharp (en bleu), les nombres correspondent aux sols écoulés depuis l’atterrissage du rover (NASA/JPL-Caltech/ASU/UA).

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