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dimanche 16 octobre 2022

3 super-Terres et 2 super-Mercures identifiées autour d'une étoile naine


Un système stellaire a été découvert contenant trois super-Terres et deux planètes semblables à Mercure. Ce cas encore très rare pourrait donner des indices sur la façon dont se forment les petites planètes denses. L'étude est parue dans Astronomy&Astrophysics.

Susana Barros (Université de Porto), et ses collègues ont étudié les minuscules mouvements de l'étoile HD 23472, provoqués par l'attraction gravitationnelle de ses planètes. La comparaison des propriétés des planètes orbitant autour de la même étoile hôte, et donc formées à partir du même disque d'accrétion, permet de contraindre les théories de formation et d'évolution des exoplanètes. L'intérêt scientifique pour les systèmes multi-planétaires augmente donc avec le nombre croissant de détections de planètes autour d'une même étoile. Et ici, c'est pas moins de 5 planètes telluriques qui sont caractérisées autour de l'étoile naine HD 23472 (0,67 M⊙ pour 0,71 R⊙), située à 39 pc.
Deux super-Terres avaient déjà été confirmées précédemment autour de cette étoile, mais aujourd'hui, Barros et son équipe confirment et caractérisent trois planètes de taille terrestre dans le système en utilisant des observations de vitesse radiale obtenues avec l'instrument ESPRESSO (Echelle Spectrograph for Rocky Exoplanet- and Stable Spectroscopic Observations) sur le Very Large Telescope de l'ESO au Chili. Les planètes de ce système compact ont des périodes dans l'ordre croissant :  d : ~ 3,98 jours, e : ~ 7,90 jours,  f :  ~ 12,16 jours , b : ~ 17,67, et c : ~ 29,80 jours et des rayons de d : 0,75 R⊕ , e :  0,82 R⊕ , f : 1,13 R⊕ , b : 2,01 R⊕ , et, c : 1,85 R⊕. La planète e, a un transit très proche de celui de la planète d, et est en résonance étroite avec elle.
Barros et son équipe ont ensuite pu calculer la masse de chacune des cinq planètes : Md = 0,54 [± 0,22] M⊕, Me = 0,76 [± 0,30] M⊕, Mf = 0,64 [-0,39+0,46] M⊕, Mb = 8,42 [-0,84+0,83] M⊕, et Mc = 3,37 [-0,87+0,92] M⊕. Ces planètes sont parmi les planètes les plus légères mesurées par la méthode des vitesses radiales, ce qui démontre la très haute précision du spectrographe ESPRESSO. Les chercheurs ont estimé la composition des cinq planètes du système et constaté que leurs fractions de masse de gaz et d'eau augmentent avec la distance stellaire, ce qui suggère que le système a été façonné par irradiation. La densité élevée des deux planètes intérieures (ρd = 7.5 [-3.1+3.9] et ρe = 7.5 [-3.0+3.9] g.cm-3) indique qu'elles sont probablement des super-Mercures, avec une composition majoritairement de fer. La modélisation des structures internes des planètes que font les chercheurs soutiennent cette hypothèse et suggère également que les trois planètes les plus externes ont un contenu significatif en eau ou en gaz.
Mercure est inhabituelle dans le système solaire car elle possède un grand noyau de fer et un manteau mince. Si d'autres études confirment que HD 23472 possède deux planètes similaires, il sera moins probable que les corps semblables à Mercure soient apparus à la suite d'un événement fortuit, comme une collision avec un autre corps céleste, et plus probable qu'ils soient un héritage du nuage de gaz qui les a créés, selon les auteurs. Si l'existence de deux super-Mercures dans ce système est confirmée, il sera le seul connu à présenter deux super-Mercures, ce qui en fera un excellent banc d'essai pour les théories de formation des super-Mercures. 
L'irradiation à haute énergie reçue par les planètes à courte période (proches de leur étoile) provoque l'évaporation des enveloppes riches en H/He. Une évaporation atmosphérique a été par exemple observée pour la planète de faible masse GJ 436b en 2014 et en 2015 par Kulow et al. et Ehrenreich et al. En raison de l'irradiation, les planètes proches deviennent donc plus denses et plus petites. La théorie de l'évaporation prédisait l'existence d'un écart dans la distribution des rayons des planètes comme l'avaient montré Owen et Wu en 2013. Un tel écart a été découvert quatre ans plus tard en utilisant le grand échantillon d'exoplanètes du télescope Kepler. Le relevé de Kepler (California Kepler Survey) a révélé que la distribution des tailles des planètes est bien bimodal et qu'il existe un gap sur le rayon planétaire qui se situe entre 1,6 et 1,8 R⊕. Les planètes qui ont un rayon inférieur à ~ 2 R⊕ sont des noyaux "secs" tandis que celles qui ont un rayon supérieur à 2 R⊕ ont un noyau de glace et une atmosphère gazeuse.
Certains de ces noyaux secs sont extrêmement denses et contiennent probablement un excès de fer, similaire à celui de Mercure. Depuis la découverte de la première super-Mercure, K2-229 b, (Santerne et al. 2018), d'autres exoplanètes présentant un excès de fer ont été mises au jour : K2-38 b (Toledo-Padrón et al. 2020), K2-106 b (Guenther et al. 2017), Kepler-107 c (Bonomo et al. 2019), Kepler-406 b (Marcy et al. 2014), et HD 137496 b (Azevedo Silva et al. 2022). Ces planètes, à l'exception de Kepler-107 c, ont des points communs : elles sont toutes les planètes internes de leur système exoplanétaire et font toutes partie de systèmes multi-planétaires, et elles ont des températures effectives élevées (> 1200 K). 
Par ailleurs, Barros et son équipe remarquent que le système HD 23472 est proche d'une résonance de Laplace, et une surveillance plus poussée pourrait permettre de comprendre comment il s'est formé. Son caractère unique et son emplacement dans la zone d'observation continue du télescope spatial James Webb en feront une pierre angulaire des futures caractérisations approfondies.

Source

HD 23472: a multi-planetary system with three super-Earths and two potential super-Mercuries
S. Barros et al.
Astronomy&Astrophysics Volume 665, A154 (27 September 2022)


Illustration

Vue d'artiste du système de HD 23472 (NASA/JPL-Caltech)

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