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24/05/23

Découverte d'un cyclone polaire sur Uranus


Des observations d'Uranus dans le domaine radio avec le Very Large Array apportent des preuves solides de l'existence d'un vortex polaire sur Uranus, à l'instar de ce qui existe sur les autres planètes gazeuses Jupiter et Saturne en premier. L'étude est publiée dans Geophysical Research Letters.

Les images de la sonde Voyager 2, qui avait survolé Uranus en 1986 avaient indiqué que les sommets des nuages ​​de méthane étaient agités par des vents qui tournaient plus vite au centre polaire que sur le reste de l'hémisphère. Les mesures infrarouges de Voyager 2 n'avaient en revanche observé aucun changement de température. Les nouvelles observations effectuées depuis le sol par Alex Akins (Jet Propulsion Laboratory/NASA) et ses collaborateurs avec le VLA, des données collectées en 2015, 2021 et 2022, sont allées plus loin dans l'atmosphère d'Uranus que jamais auparavant. Les chercheurs parviennent à déterminer que l'atmosphère circulant au pôle nord est plus chaud et plus sec, ce qui est caractéristique d'un cyclone puissant. 
Les images du Very Large Array obtenues à des longueurs d'ondes de 0,7 à 5 cm révèlent des détails non seulement dans l'émission thermique du pôle nord d'Uranus mais aussi la présence d'un collier sombre près de 80°N (qui avait déjà été aperçu et décrit par Molter et al. en 2021, et qui est donc confirmé ici), et surtout une tache lumineuse, inédite celle-ci,  située exactement au centre polaire. Cette tache centrale brillante ressemble aux observations d'émission polaire de Saturne et Neptune à des pressions plus faibles selon les chercheurs. Ils constatent que la température de brillance de la tache polaire peut être recréée par des gradients de température de 5 K et/ou un appauvrissement d'un facteur 10 de la vapeur de NH3 ou de H2S entre 10 et 20 bars. Ces deux phénomènes sont tous les deux compatibles avec la présence d'un vortex polaire cyclonique. 
Et Akins et son équipe remarquent que le contraste de la tache polaire aurait augmenté entre les observations de 2015 et celles de 2022, ce qui suggérerait une évolution saisonnière de la circulation polaire d'Uranus en profondeur. Ils constatent aussi que tandis que le contraste du point lumineux polaire central diminue avec la profondeur, le contraste du collier sombre, lui, augmente avec la profondeur. Les planétologues montrent que dans le cas où toutes les variations de luminosité polaire seraient le résultat de changements de température, les estimations des vents zonaux suggèrent une circulation cyclonique au pôle, alors que l'explication alternative, dans laquelle les variations de luminosité ne sont causées que par des changements de composition chimique, cela nécessiterait un appauvrissement en gaz au moins au-dessus du nuage de NH4SH dans l'atmosphère d'Uranus. Pour les chercheurs, il est tout de même plausible que les deux processus se produisent, par analogie avec les observations de Cassini du cyclone polaire de Saturne (publiées par Fletcher et al. en 2018) et celles du vortex polaire de Neptune (également par Fletcher et al., en 2014 puis plus récemment par Roman et al. en 2022).
Comme Uranus parcourt son orbite en 84 ans, au cours des dernières décennies, son pôle n'était pas pointé vers la Terre. Mais depuis 2015 environ, on a une meilleure vue et on peut commencer à regarder plus profondément dans l'atmosphère polaire d'Uranus.
Alors qu'Uranus se dirige vers le solstice d'été, Akins et ses collaborateurs encouragent maintenant la communauté des planétologues à effectuer de nombreuses autres observations à plusieurs longueurs d'onde, des micro-ondes au visible, afin de surveiller l'évolution de l'état atmosphérique polaire d'Uranus, dans le but avoué de mieux comprendre les processus de circulation atmosphérique des planètes géantes. Une modélisation 2D ou 3D supplémentaire de la circulation polaire d'Uranus est également encouragée pour contraindre davantage la formation d'une telle caractéristique, dont l'origine reste encore à découvrir.
Avec cette observation sous forme de découverte, des cyclones (qui tournent dans le même sens que leur planète) ou des anticyclones (qui tournent dans le sens opposé) ont maintenant été identifiés aux pôles de toutes les planètes de notre système solaire, à l'exception de Mercure, qui n'a pas d'atmosphère... Et ce cyclone polaire d'Uranus, comme sur Saturne et Jupiter, ne dérive pas : ils semble bloqué au pôle, un point commun qui semble bien être la règle chez les géantes gazeuses. 

Source

Evidence of a Polar Cyclone on Uranus From VLA Observations
Alex Akins et al.
Geophysical Research Letters (23 May 2023)

Illustration

Image d'Uranus obtenues par le Very Large Array à différentes longueurs d'ondes radio entre 0,7 cm et 5 cm. (Atkins et al.)

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