mercredi 20 septembre 2017

Découverte d'un couple de trous noirs supermassifs séparés de seulement 1 année-lumière


La galaxie NGC 7674 est une belle galaxie spirale barrée vue presque entièrement de face. C'est une galaxie connue pour être très lumineuse en infra-rouge, pour avoir un noyau actif, et accessoirement être en train de fusionner avec une petite galaxie voisine. Elle fait partie des galaxies dites de Seyfert. Mais NGC 7674 vient de révéler un autre secret : elle possède deux trous noirs supermassifs, qui forment le couple le plus resserré jamais observé à ce jour.



Ce sont deux astrophysiciens indiens du Tata Institute of Fundamental Research de l'Université de Pune et un astronome américain du Rochester Institute of Technology, qui viennent de mettre en évidence la présence de ces deux trous noirs supermassifs au centre de NGC 7674 (qui est aussi dénommée Markarian 533). 
Ils ont observé la galaxie (située à environ 400 millions d'années-lumière) dans le domaine des ondes radio par la technique de l'interférométrie à très longue base, de manière à produire une image très résolue de la double source radio qui avait déjà été mise en évidence il y a plusieurs années, mais qui avait été considérée être deux lobes émanant d'un trou noir unique central. 

L'analyse détaillée que les auteurs présentent dans leur article paru il y a deux jours dans Nature Astronomy semble formelle : les deux sources radio de la région centrale de NGC 7674 observées aux alentours de 15 GHz par le réseau de radiotélescopes du Very Long Baseline Array (VLBA) ont chacune un spectre radio qui est cohérent avec ce qu'on attendrait de l'émission de matière en accrétion autour d'un trou noir. 
La masse totale des deux trous noirs a été calculée par Preeti Kharb et ses collaborateurs, elle vaut 36 millions de masses solaires et des poussières. Il s'agit donc de trous noirs supermassifs relativement petits, mais quand même cinq fois plus gros que notre Sgr A*. Malgré leur distance réciproque qui paraît très faible : 0,35 pc, soit 1 année-lumière, leur période de rotation l'un autour de l'autre est de l'ordre de 100 000 ans tout de même. On est encore loin de la coalescence. 
Un élément intéressant est que NGC 7674 a également la particularité de montrer une morphologie "tordue" de son jet radio de 700 pc de long, en forme de Z.  Et justement, il avait été montré il y a quelques années que de telles émissions radio en forme de Z devaient être associées aux effets combinés de la fusion de deux galaxies suivie de l'apparition d'un couple de trous noirs. Cette observation vient donc confirmer cette prédiction théorique. Non seulement NGC 7674 est en train d'avaler sa petite galaxie voisine comme on peut le voir sur cette très belle image du télescope Hubble, mais elle l'a donc déjà fait avec une autre galaxie il y a déjà pas mal de temps.

Les chercheurs indiens et américain mesurent la vitesse du jet expulsé par le couple de trous noirs et obtiennent la valeur de 28% de la vitesse de la lumière. Il faut savoir que le précédent record de proximité d'un couple de trous noirs supermassifs, trouvé en 2006, était de 7 parsecs (24 années-lumière), pour un couple situé deux fois plus loin de nous.

Kharb et ses collaborateurs, à la fin de leur article, calculent si ce nouveau couple supermassif rapproché pourrait être détecté par les futurs détecteurs d'ondes gravitationnelles en orbite. Malheureusement, la réponse est négative, le grand détecteur eLISA destiné à détecter des fusions de trous noirs très massifs, ne pourrait pas isoler les ondes gravitationnelles produites par le couple supermassif de NGC 7674. Ce dernier est trois fois trop léger et pas encore assez rapproché.

Source

A candidate sub-parsec binary black hole in the Seyfert galaxy NGC 7674
P. Kharb, D. V. Lal & D. Merritt
Nature Astronomy (18 september 2017)


Illustrations

1) NGC 7674 imagée par Hubble (NASA/ESA)

2) Distribution de l'émission radio à 15 GHz provenant du centre de NGC 7674 (Kharb et al.)


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