Les supernovae de type Ia sont des explosions d'étoiles qui ont la particularité de ne pas contenir d'hydrogène, l'élément chimique le plus abondant dans l'Univers. La grande majorité des astrophysiciens s'accorde à expliquer leur origine par des naines blanches dans des systèmes à deux étoiles (systèmes binaires).
Mais le type de l'étoile compagnon de la naine blanche reste une question ouverte. À ce jour, aucun progéniteur d'une supernova de type Ia n'a encore pu être directement observé avant son explosion. La récente supernova SN 2011fe découverte cette année dans la galaxie M101 qui est à une distance de "seulement" 6,4 millions de parsecs (20,9 millions d'années lumière) de la Terre, est la plus proche et l'une des plus brillantes que l'on a pu observer dans les derniers 25 ans.
Du coup, elle a offert une occasion unique pour la recherche dans les données d'archives sur la présence d'un système binaire progéniteur à l'emplacement de cette supernova. Deux articles sont consacrés à
cette recherche dans le numéro de Nature de cette semaine (Nugent et al. et Li et al. Nature 480, 344–347 et 348-350 (15 December 2011)).
Il faut savoir qu'une supernova de type Ia est si lumineuse qu'elle peut complètement éblouir une galaxie comme la nôtre pourtant remplie de 200 milliards d'étoiles, et ce durant plusieurs semaines, avant de s'éteindre inexorablement en quelques mois...
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M101 avec SN 2011fe |
Les naines blanches sont l'état final de l'évolution d'une étoile comme notre Soleil (il lui reste environ 5 milliards d'années avant ce stade, rassurez-vous).
Ces étoiles sont extrêment petites (d'où leur nom de naines) : de taille de la Terre et sont constituées essentiellement de carbone et d'oxygène, ayant fusionné (consommé) tout leur hydrogène et tout leur hélium.
En fait, pour être plus exact, la pression dans le coeur y est telle que le carbone s'y trouve probablement sous forme de diamant... Pour imaginer la densité de ces objets, on peut considérer qu'une cuillère à soupe de naine blanche pèse 10 tonnes...
Dans des circonstances normales, les naines blanches ne peuvent pas exploser. Elles vont se reforoidir lentement en libérant leur chaleur interne sur des milliards d'années. Cependant un résultat radicalement différent peut se produire si jamais la naine blanche "prend du poids" en volant de la matière à une étoile compagnon proche.
C'est alors que la naine blanche se met à se réchauffer, en grossissant d'avantage. Mais il existe pour ce type d'étoile une limite à ne pas dépasser... On appelle cette masse la masse critique, et elle vaut 1.4 fois la masse du soleil exactement. Lorsque cette masse critique est atteinte, de nouvelles réactions nucléaires commencent à apparaître, favorisées par l'augmentation de la température, et ces réactions s'amplifient à une vitesse exponentielle. Il ne suffit alors que d'une seule seconde pour que toute l'étoile explose littéralement en transformant brutalement son oxygène et son carbone, en nickel, en cobalt puis en fer. Une telle explosion libère autant d'énergie que 1028 mégatonnes de TNT, difficilement imaginable.
Selon les modèles théoriques, il existe trois types possibles pour l'étoile compagnon d'une naine blanche :
- une géante rouge, qui est environ 100 fois plus lumineuse que le Soleil;
- une étoile sous-géante ou une étoile de la séquence principale, qui sont quelques fois plus lumineuses que le Soleil,
- une autre naine blanche, qui est 10.000 fois moins lumineuse que le Soleil.
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Vues d'artiste des trois hypothèses (ESO, NASA) |
Comme ces étoiles-compagnon possibles couvrent un éventail de luminosité très large, l'examen du lieu de l'explosion sur les images d'archives de supernovae de type Ia devrait, en principe, permettre aux chercheurs de distinguer entre ces différentes possibilités et pouvoir déterminer la nature exacte de l'ancêtre.
Dans leur étude, Li et al. ont examiné des images antérieures à l'explosion de SN 2011fe, obtenues par le télescope spatial Hubble et n'ont trouvé aucune preuve d'un objet vu avant l'explosion.
Si une géante rouge avait été l'étoile compagnon, elle aurait dû être détectée. Cette observation a permis aux auteurs d'exclure un ancêtre de type géante rouge - du moins dans ce cas. Malheureusement, la finesse des images n'a pas été suffisante pour leur permettre d'exclure une sous-géante, une étoile de la séquence principale, ou une naine blanche compagnon.
Néanmoins, ce résultat représente une avancée importante dans la compréhension des étoiles progénitrices des supernovae de type Ia.
La supernova 2011fe a été découverte le 24 août 2011 avec le télescope de 1,2 mètre Samuel Oschin à l'observatoire de Palomar, en Californie (collaboration FTC).
Les membres de l'équipe du FTC ont repéré cette supernova seulement un peu plus de 11 heures après l'explosion - la détection la plus précoce jamais obtenue pour une supernova de type Ia. Leur réaction rapide à la découverte leur a permis d'analyser la lumière de l'objet en utilisant un spectrographe monté sur le télescope robotisé de Liverpool (îles Canaries) à peine 16 heures après la détection, une vraie prouesse.
Le spectre de SN 2011fe fut ainsi révélé seulement environ 28 heures après l'explosion, comme le relatent Nugent et al. dans Nature révélant le spectacle insaisissable des couches ultrapériphériques de l'étoile qui explose avant qu'elles ne deviennent invisibles à cause de la dilution causée par leur expansion très rapide (à 7% de la vitesse de la lumière, excusez du peu!).
L'analyse du spectre révèle la lumière émergeant de nuages d'oxygène et de carbone de la surface de la supernova. Ce résultat confirme la conviction théorique que l'étoile qui explose est bien une naine blanche carbone-oxygène. A partir de ces données, on parvient également à déterminer qu'une petite quantité de matériau ultrapériphérique de la naine blanche a réussi à s'échapper de la combustion phénoménale provenant du centre.
Bien que des traces de carbone avaient été déjà observées dans d'autres supernovae de type Ia, la détection de l'oxygène est ici sans précédent. En outre, l'étude de la luminosité croissante dans la première phase de la supernova indique que l'étoile secondaire est très certainement une étoile "normale" (de la séquence principale).
Les supernovae de type Ia sont non seulement des objets astrophysiques importants en tant que tels, mais ils fournissent aussi le moyen le plus précis de mesurer les distances des galaxies éloignées au sein desquelles elles se trouvent.
Le calibrage de leurs luminosités au début des années 1990 à travers le projet Calán / Tololo a permis à deux groupes d'astronomes, dirigés par Brian Schmidt et Saul Perlmutter, de découvrir en 1998-99 que, contrairement aux attentes, l'Univers est l'objet d'une expansion accélérée.
Cette découverte étonnante a été reconnue par le prix Nobel de physique en 2011. Mais il s'avère quelque peu embarrassant de ne pas connaître la nature exacte de ces objets qui prennent maintenant une place si importante en cosmologie, non ?
Bien que les études de Nugent et al. et Li et al. sur SN 2011fe ne fournissent pas encore de réponse définitive à cette question, elles permettent de se rassurer en confortant certaines idées sur la nature des supernovae de type Ia .
Bien sûr, pour répondre de façon concluante, il nous faut une autre supernova Ia proche, et si possible plus proche que M101... Et pourquoi pas dans notre propre galaxie, ça, ça serait idoine! Le problème, c'est que ces événements violents sont aussi des événement rares. On estime qu'il s'en produit un tous les 200 ans dans une galaxie typique comme la nôtre. Et comme il n'y a qu'une poignée de galaxies plus proches que M101, cela signifie qu'il faudrait statistiquement attendre une trentaine d'années pour voir une autre supernova comme cette SN 2011fe !...
Soyons patients et laissons la chance nous sourire.
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