Des astrophysiciens viennent de découvrir un deuxième pulsar milliseconde dans NGC 6397, l'un des amas globulaires les plus proches de la Terre. Ces nouvelles observations pourraient contribuer à expliquer la rareté surprenante des pulsars millisecondes découverts dans les amas globulaires denses. Ils publient leur étude dans The Astrophysical Journal Letters.
Au cœur des amas globulaires, les rencontres gravitationnelles entre étoiles sont fréquentes. Les restes compacts d'étoiles massives peuvent former des systèmes binaires aux propriétés très diverses, notamment des pulsars millisecondes : des étoiles à neutrons qui font plusieurs centaines de tours sur elles-mêmes en une seconde. Tous les pulsars tournent vite, mais les pulsars millisecondes sont les plus rapides de tous. On pense que la plupart des pulsars millisecondes ont commencé en tournant plus lentement, mais qu'après avoir trouvé une compagne stellaire, ils ont accumulé de la matière qui a accéléré leur rotation, et sont alors passés au statut de "pulsars millisecondes".
L'amas globulaire NGC 6397 qui contient 400 000 étoiles, et qui se trouve à 2,3 kpc, abrite un curieux système binaire qui avait été détecté en 2010 en rayons X, en visible et en ultraviolet et qui avait été baptisé U18. Son émission de rayons X apparaissait pulsée avec la période de l'orbite du système binaire, et les observations dans le visible montraient une étoile rouge au même endroit. Des recherches ultérieures ont suggéré que ce système contenait un pulsar milliseconde, mais les impulsions radio caractéristiques sont restées insaisissables jusqu'à présent.
L'équipe internationale dirigée par Lei Zhang (Académie chinoise des sciences) rapporte les résultats de ses observations du système effectuées entre 2019 et 2022 à l'aide du radiotélescope Parkes en Australie et du réseau MeerKAT en Afrique du Sud. Zhang et ses collaborateurs ont réussi a discerner des impulsions radio faibles mais détectables toutes les 5,8 millisecondes, et ses impulsions étaient modulées avec une période de 1,97 jour, la même période que la période orbitale du système binaire émettant des rayons X au même endroit.
Ces observations confirment donc que le système contient bien un pulsar milliseconde, qui a été baptisé NGC 6397B. NGC 6397A étant le premier pulsar milliseconde de cet amas, un pulsar de type "redback" aussi nommé PSR J1740−5340A qui avait été découvert en 2001.
Et d'après leur analyse plus poussée de la chronologie des impulsions, les chercheurs suggèrent que le pulsar NGC 6397B est également la source de l'émission de rayons X qui avait été détectée précédemment. Mais peu de temps après que l'équipe a retrouvé l'insaisissable pulsar en ondes radio, celui-ci a disparu à nouveau : les impulsions radio sont devenues indétectables pendant 14 mois, avant de réapparaître au début de 2022. Cette émission radio intermittente du système pourrait indiquer deux possibilités suivantes selon Zhang et ses collaborateurs : soit le gaz chaud et ionisé qui s'échappe de l'étoile compagne empêche l'émission radio de nous parvenir lorsque le système binaire prend certaines orientations, soit c'est l'accrétion de matière de l'étoile compagne (le processus qui génère les rayons X) qui interrompt temporairement l'émission radio du pulsar.
On pensait que les pulsars dans les systèmes binaires devaient être communs dans les amas globulaires qui ont des noyaux exceptionnellement denses, comme NGC 6397, propices aux rencontres gravitationnelles entre étoiles et objets compacts. On estime qu'il y aurait plusieurs centaines de résidus de supernovas dans NGC 6397, donc aussi plusieurs centaines de pulsars. Mais il se trouve que la plupart des pulsars connus dans ce type d'amas globulaires sont des pulsars seuls. L'observation de NGC 6397B pourrait donc indiquer que les pulsars existent bien en grand nombre dans des systèmes binaires au sein des amas globulaires, mais qu'ils seraient relativement insaisissables dans de tels environnements : ils auraient une émission radio trop faible ou intermittente, ce qui les rendrait difficiles à détecter.
Zhang et son équipe constatent que NGC 6397B a la plus longue période orbitale, 1,97 jours, pour les binaires à éclipses d'amas globulaires (des systèmes de type dos rouge ou veuve noire). Ils en concluent qu'il doit s'agir soit d'un pulsar milliseconde transitoire, soit plus probablement d'une binaire à éclipses dans sa phase initiale de transfert de masse après que l'étoile compagne a quitté la séquence principale.
NGC 6397 est l'amas globulaire à noyau effondré le plus proche et possède une composante centrale sombre représentant 2% de la masse de l'amas, comme l'ont montré Vitral et Mamon en 2021. Il est donc surprenant que les études passées n'aient confirmé qu'un seul pulsar, ainsi que quelques sources de rayons X non identifiées qui présentent des signes de résidus de supernova. La découverte de NGC 6397B laisse ainsi la source de rayons X non identifiée U97 comme la seule candidate restante pour être un trou noir dans le noyau de l'amas, ce qui fournit une contrainte supplémentaire critique sur l'évolution de cet amas globulaire et de sa population d'objets compacts.
Source
Radio Detection of an Elusive Millisecond Pulsar in the Globular Cluster NGC 6397
Lei Zhang et al.
The Astrophysical Journal Letters, Volume 934, Number 2 (28 July 2022 )
Illustration
L'amas globulaire NGC 6397 (NASA, ESA, and T. Brown and S. Casertano (STScI))
2 commentaires :
Bonjour, j'ai découvert votre blog il y a peu de temps et j'adore ce ir vous lire! Je découvre de nouvelles choses à chaque fois! J'avais déjà entendu parle des pulsars sans savoir exactement ce que c'était ! Et là je découvre que certains d'entre eux tournent sur eux en quelques millisecondes! C'est incroyable ! L'univers nous offre des merveilles!
Merci. En parlant de pulsars, ce sera le sujet central de mon prochain roman (que je suis en train de finir d'écrire !), Un mélange historico-scientifique avec un peu d'action... Dans la veine de mes précédents. J'espère que ça vous plaira.
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