jeudi 26 janvier 2012

Découvertes de deux nouvelles Tatooine (exoplanètes circumbinaires)

Les découvertes s'enchaînent vite. L'année 2011 avait vu la découverte de la première exoplanète orbitant autour d'un couple d'étoile, à l'image de la célèbre planète Tatooine de Star Wars, qui fut appelée Kepler-16b, du nom du télescope spatial Kepler qui l'a découverte, lui-même nommé d'après Johannes Kepler, grand astronome du 16ème siècle.
Voilà que Kepler (le télescope !) remet ça, avec la découverte de deux nouvelles « Tatooine » : Kepler-34b et Kepler-35b. C'est ce que nous apprennent William Welsh et ses collègues dans le numéro de cette semaine de Nature.
Le suffixe « b » ici est astucieusement utilisé pour rappeler que l'exoplanète en question tourne autour d'une étoile binaire (deux étoiles tournant l'une autour de l'autre).
Toutes les deux, Kepler-34b et Kepler-35b sont des planètes gazeuses géantes du genre de Jupiter. La première tourne autour d'un couple d'étoiles serrées en 289 jours et la seconde en 131 jours.

Vue d'artiste d'une planète circumbinaire
Les deux méthodes les plus efficaces pour la détection des exoplanètes sont fondées d'une part sur la mesure de la vitesse des étoiles, une planète massive perturbant très légèrement le mouvement de son étoile. Cette méthode a permis jusqu'à présent de découvrir environ 400 exoplanètes, et notamment la première d'entre elles en 1995, la célèbre 51 Pegasi, planète de 0.47 fois la masse de Jupiter mais orbitant à une distance de seulement 0.052 fois la distance Soleil-Terre…

La seconde méthode, en plein essor grâce à l'utilisation de télescopes spatiaux, seuls capables de détecter d'infimes variations de luminosité, est fondée sur l'observation de transits des planètes devant leur étoile : la planète obscurcit très faiblement l'étoile en passant devant. Et quand il y a non pas une mais deux étoiles comme dans le cas des systèmes binaires, il y a un double transit, à la fois de l'étoile compagnon et de la planète….

Environ 200 exoplanètes ont pu être mises en évidence par cette méthode. Requérant une précision extrême sur la mesure de la variation de luminosité détectée, les télescopes terrestres ont du mal à détecter d'autres planètes que de grosses planètes proches de leur étoile(s). En revanche, au-dessus de l'atmosphère, tout est plus facile, et le télescope Kepler s'est fait une spécialité dans la découverte d'exoplanètes de petite taille (petite masse) et moins proches de leur étoile (en zone dite habitable ») par la méthode des transits. Il exploite si bien la méthode qu'il a déjà engrangé pas loin de 2000 candidates exoplanètes, actuellement en attente de validation…
Le taux de planètes circumbinaires observé permet ainsi de faire des calculs statistiques et ils indiquent que ces planètes doivent exister autour de 1% de toutes les étoiles binaires proches à courte période. Sachant que le nombre d'étoiles binaires à courte période dans notre galaxie par exemple est tout à fait considérable – les étoiles de la taille de notre soleil vivent généralement en couple de ce type -, le nombre de telles planètes calculé par Welsh et al. est de l'ordre de plusieurs millions ! (et rien que pour notre galaxie, en gardant à l'esprit que les binaires à longues période ne sont pas prises en compte ici et qu'elles sont au moins aussi nombreuses que celles à courte période).
Rappelons enfin que le nombre de galaxies observables est de l'ordre de plusieurs milliards… 
couple d’étoiles Principe d'une étoile binaire (animation interactive par http://astronomia.fr/) : cliquez sur M/A

Ces trois planètes circumbinaires (les deux nouvelles plus Kepler-16b) ont toutes quelques points en commun (mais qui semblent liés  à la façon de les détecter par Kepler) : elles se situent à une distance proche de 1 UA de leurs étoiles et les couples d'étoiles sont séparés d'environ 0.2 UA. Elles se trouvent ainsi très proches de la plus petite orbite stable possible. 
Mais Kepler en poursuivant sa quête va devenir de plus en plus sensible aux plus longues périodes, et ces trois premières sont loin d'être les dernières et peuvent être vues comme le sommet d'un immense iceberg. Un an après avoir découvert la première planète circumbinaire, qui pouvait paraître une étrangeté de science-fiction, nous savons maintenant qu'elles sont légion…

source:
Transiting circumbinary planets Kepler-34 b and Kepler-35 b
W.F Welsh et al.  Nature  481, 475–479   (26 January 2012)

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