Une équipe d'astrophysiciens a découvert un halo radio situé à 10 milliards d'années-lumière, il révèle que les amas de galaxies de l'univers primordial étaient déjà imprégnés de particules de haute énergie. Cette découverte suggère une activité ancienne de trous noirs ou bien des collisions de particules cosmiques énergétiques. L'étude est publiée dans The Astrophysical Journal Letters.
Ces vastes nuages de particules énergétiques sont appelés des « mini halos ». Ils entourent généralement des amas de galaxies. Celui que Julie Hlavacek-Larrondo (université de Montréal) et ses collaborateurs internationaux ont découvert est le plus éloigné jamais observé : 10 milliards d'années-lumière, doublant le précédent record.
Cette découverte démontre que des amas de galaxies, parmi les plus grandes structures de l’univers, ont été immergés dans des particules de haute énergie pendant la majeure partie de leur existence. Un tel mini-halo est constitué de particules chargées et hautement énergétiques dans le vide entre les galaxies d'un amas, qui émettent ensemble des ondes radio qui peuvent être détectées depuis la Terre. Les résultats montrent que même dans l'univers primitif, les amas de galaxies étaient déjà façonnés par des processus énergétiques.
Les chercheurs ont analysé les données du radiotélescope Low Frequency Array (LOFAR), un vaste réseau de plus de 100 000 petites antennes couvrant huit pays européens, dans la bande de fréquences entre 120 et 168 MHz.
En étudiant l'amas de galaxies nommé SpARCS 1049+5640, qui est l'amas de galaxies à cœur froid le plus éloigné identifié à ce jour (z=1,7), ils ont détecté un signal radio faible et étendu et ont déterminé qu'il ne provenait pas de galaxies individuelles, mais d'une vaste région remplie de particules de haute énergie et de champs magnétiques. La zone s'étend sur plus d'un million d'années-lumière et les chercheurs montrent que l'émission radio diffuse coïncide spatialement avec l'émission X du milieu chaud intra-amas. Il possède une puissance radio de 49,8 1024 W.Hz-1, présentant des similitudes frappantes avec les minihalos radio à faible décalage vers le rouge. Cette découverte double le record de décalage vers le rouge des minihalos précédemment connus. Selon Hlavacek-Larrondo et ses collaborateurs, cette découverte remet en question les modèles de pertes par processus Compton inverse et indique la présence de champs magnétiques intenses, d'une turbulence accrue dans les amas à fort décalage vers le rouge, ou bien de processus hadroniques actifs nécessitant un rapport énergie des rayons cosmiques / énergie thermique de 0,07 sur une distance de 200 kpc.
Cela implique en outre que les champs magnétiques sont efficacement amplifiés jusqu'à 10 µG dans un volume de 1 Mpc3 pendant l'époque de formation des amas avant z=2.
Selon Hlavacek-Larrondo et ses collaborateurs, il y a deux explications probables derrière la formation de ce mini-halo.
La première met en scène des trous noirs supermassifs au cœur des galaxies de l'amas, qui sont capables d'éjecter des flux de particules de haute énergie dans le milieu intergalactique. Mais cette hypothèse se heurte à la question de savoir comment ces particules pourraient s'éloigner du trou noir pour créer un nuage de particules aussi gigantesque, tout en conservant une telle quantité d'énergie.
La deuxième explication fait intervenir des collisions de particules cosmiques. Il s'agit de collisions de particules chargées au sein du plasma chaud de l'amas de galaxies à des vitesses proches de celles de la lumière, interagissant entre elles pour former des particules hautement énergétiques qui émettent au final des ondes radio par effet Synchrotron dans les champs magnétiques.
Étant donné la nature de cet amas (sa masse élevée pour son décalage vers le rouge, ses caractéristiques de noyau froid prononcé et le fait que le noyau froid soit déplacé par rapport à la BCG (la galaxie la plus brillante de l'amas), il n'est peut-être pas surprenant de détecter une telle structure dans ce système, pour les astrophysiciens qui ont fait cette découverte. Ils ajoutent dans la conclusion de leur article que leurs résultats suggèrent que de telles structures pourraient s'être formées très tôt dans la vie des amas de galaxies. Et donc, cela implique que des particules relativistes et des champs magnétiques puissants étaient déjà présents dès z∼1.7 (c'est-à-dire quand l'Univers n'était âgé que de 3,8 Gigannées), et que des processus de réaccélération ou des mécanismes hadroniques étaient actifs à l'époque de la formation des amas.
Par conséquent, les amas de galaxies, y compris leurs progéniteurs (les proto-amas), pourraient avoir été immergés dans des particules relativistes pendant la majeure partie de leur existence. Cet environnement pourrait influencer les galaxies qui y résident, et potentiellement façonner leur évolution. Cette étude apporte ainsi de nouvelles perspectives sur l'évolution des structures à grande échelle et le rôle de l'émission radio diffuse au cours du temps cosmique.
L'avènement d'installations de nouvelle génération, notamment les relevés à haute sensibilité et haute résolution du SKA et du ngVLA, fera sans aucun doute progresser ce domaine, permettant l'exploration de ces phénomènes avec une précision sans précédent.
Source
Discovery of Diffuse Radio Emission in a Massive z = 1.709 Cool Core Cluster: A Candidate Radio Mini-Halo
Julie Hlavacek-Larrondo et al.
à paraître dans The Astrophysical Journal Letters
Illustrations
1. L'amas SpARCS 1049+5640 et son mini halo imagés dans différentes longueurs d'ondes (visible, rayons X et radio) (HLavacek-Larrondo et al.)
2. Julie Hlavacek-Larrondo
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