dimanche 5 février 2012

Symétrie Matière/Anti-Matière et masse négative, une clé pour l'élégance ?

Et si le retour à la symétrie matière-antimatière était une clé du puzzle incompris de l'Univers actuel ?

Quels sont ces problèmes ?
- L'Univers semble peuplé presque exclusivement de matière, alors que l'antimatière (particules de charges opposées) existe bel et bien; pourquoi cette asymétrie ? Est-elle naturelle ?
- Quelle est la nature de cette hypothétique Énergie Noire (qui devrait représenter 73% de l'Univers si son expansion est bien accélérée) ?
- Quelle est la nature du phénomène physique à l'origine de la phase d'inflation dans l'Univers jeune, concept introduit pour permettre de coller aux observations d'homogénéité du fond cosmologique ?
- Quelle est la nature de la Matière Noire non baryonique, représentant 23% du contenu de l'Univers et 85% de la matière ?

Ces quatre questions sont des éléments totalement incompris actuellement. 
Découverte de l'anti-électron (positron) en 1932.

Pour essayer de littéralement se débarasser de ces questions et retrouver une vision beaucoup plus élégante de l'Univers, les physiciens français Aurélien Benoit-Lévy et Gabriel Chardin, proposent de changer d'Univers!

Pour cela, ils font seulement deux hypothèses qui peuvent paraitre à la fois simples et élégantes : 

1) matière et antimatière sont symétriques : il en existe autant l'une que l'autre dans l'Univers
2) l'antimatière possède une masse gravitationnelle active négative : il y a répulsion entre matière et antimatière et aussi entre antimatière et antimatière, comme il y a attraction gravitationnelle entre matière et matière.

Le deuxième point est certainement le point le plus audacieux, mais il peut être fondé simplement par des concepts de symétrie. Et il faut savoir que c'est quelque chose qui n'a encore jamais été  testé expérimentalement (une expérience est actuellement en cours au CERN pour regarder ça, l'expérience AEGIS).

Quelles sont les conséquences de ces deux hypothèses ? Elles sont énormes car le modèle d'Univers s'en trouve complètement changé. 

Introduire autant de masse "positive" que de masse "négative" dans l'Univers au sens de la force de gravitation revient à créer (à grande échelle) un Univers vide de masse (les deux composantes s'annulent). Et ce type d'Univers à déjà été inventé il y a bien longtemps par un cosmologiste anglais du nom de Edward Arthur Milne en 1933, comme une alternative à vision de la Relativité Générale einsteinienne.

Il se trouve que cet univers de Milne (ou de Dirac-Milne comme l'appellent les auteurs) reste régit par une métrique de type Friedman-Lemaître-Robertson-Walker comme le modèle standard actuel, mais avec des paramètres différents.
Le fait essentiel de cette cosmologie est que le facteur d'échelle (que l'on note a(t)) est linéaire et cette linéarité reste identique tout au long de l'évolution de l'expansion. 

Car il s'agit toujours d'un univers en expansion, dont on peut calculer l'âge (le calcul donne 13.9 milliards au lieu de 13.8 milliard dans le modèle "standard"), mais cette expansion est constante : elle n'est ni accélérée, ni ralentie.
Pas d'expansion accélérée, vous avez bien lu. Ce qui implique tout de suite la non-nécessité de recourir à une hypothétique énergie noire.

Comment expliquer alors les observations de luminosité des supernovae Ia de 1998 qui ont conduit au concept d'expansion accélérée ? 
Et bien Benoit-Lévy et Chardin ont réanalysé les données des supernovae Ia avec leur modèle d'Univers et ils trouvent un accord pas trop mauvais, en tout cas bien plus proche du modèle "standard" avec ajout de constante cosmologique que de celui d'avant 1998 sans énergie noire (constante cosmologique)...

En d'autres termes, les observations des supernovae (moyennant quelques ajustements) pourraient très bien être compatibles avec un univers en expansion non accélérée de type Milne.

Une autre énorme implication de ce facteur d'échelle linéaire apparaissant dans l'univers de Dirac-Milne est qu'il n'y a plus de problème d'horizon : chaque point de l'espace a pu être en relation causale avec un autre point de l'espace dans les temps anciens, il n'y a donc plus aucun besoin de recourir à l'Inflation!. L'inflation, introduite au début des années 1980 permettait de résoudre de manière ad hoc l'apparente impossibilité que des directions opposées de l'espace aient pu être en contact causal dans le passé, ce qui est observé.

Et où serait cette antimatière ? Et bien tout simplement là où n'est pas la matière! Il faut se rappeler que lorsqu'une particule rencontre son antiparticule, ça se passe mal : elle s'annihile en produisant deux photons dont l'énergie est égale à la somme des masses (valeurs absolues ?) desdites particules.

Vous allez dire : il devrait donc exister des galaxies entières d'antimatière! Et bien non, puisque nous avons dit que l'antimatière repousse l'antimatière. Elle ne peut donc pas s'agglomérer comme le fait la matière : point de concentration d'anti-hydrogène, point d'anti-étoiles, point d'anti-galaxies, point d'anti-amas... Les anti-électrons, anti-protons, anti-neutrons sont voués à errer seuls dans les interstices matériels de l'Univers de Dirac-Milne, formant peut-être des halos diffus de (anti-)matière bien sombre...


Introducing the Dirac-Milne Universe
A. Benoît-Lévy, G. Chardin
Astronomy&Astrophysics Vol 537, 11 janvier 2012

version preprint en libre accès :
http://arxiv.org/pdf/1110.3054.pdf

 

26 commentaires :

2494hm a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Anonyme a dit…

Hello
piste de réflexion très interressante...
cependant il y a quand même 2 "hics" => expansion constante c-a-d pas d'inflation? possible mais cela reste à prouver
et surtout le problème des supernovae plus lointaines que prévues balayé d'un revers de manche "quelques biais de mesure" là cela me parait un peu léger et celà demanderait un peu plus d'argumentation
à suivre...
Moondaka :)

Dr Eric Simon a dit…

J'ai un peu raccourci l'argumentaire en parlant de "biais de mesure", il est vrai. Les auteurs évoquent l'existence d'erreurs systématiques pour les SN Ia à bas redshift, le modèle Dirac-Milne collant bien mieux à haut redshift semble-t-il. Pour vous faire une idée exacte de l'argumentaire des auteurs du papier, je renvoie directement à la source, papier en libre accès, version preprint, similaire à l'article de A&A, c'est ici :

http://arxiv.org/pdf/1110.3054.pdf

2494hm a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
2494hm a dit…

Bonjour,

Je ne comprends pas bien en quoi cette hypothétique répulsion "matière/antimatière" aurait pu empêcher la création d' "anti" inhomogénéités dans des régions peu dense en matière?

De plus pourquoi cette répulsion a t-elle bénéficié à la matière et non l'inverse ce que ce modèle n'explique pas...

Dr Eric Simon a dit…

je suis désolé, votre commentaire a été effacé sans que je n'y aie rien fait... Il doit y avoir un problème avec blogspot... Ou bien l'avez vous supprimé par mégarde ?

Je peux essayer de répondre à votre question de ce dernier commentaire (qui est bien visible, ouf):
Pourquoi la répulsion bénéficie à la matière ? Si par bénéficier à la matière vous entendez qu'elle produit des structures : étoiles, galaxies, amas, etc... c'est tout simplement que les particules ne s'attirant pas, elles ne forment pas d'entités liées gravitationnellement.
Le modèle proposé dans l'article dont je parle part du principe que ni matière ni antimétière ne dominent : elles sont en quantité égales, mais leurs propriétés étant différentes (attraction pour l'un, répulsion pour l'autre), elles ne forment pas les mêmes structures dans l'Univers : structures compactes pour la matière et particules "isolées" pour l'antimatière...

J'espère avoir répondu à votre question.

2494hm a dit…

Donc en faite, si je comprends bien, dans ce modèle, l'anti-matière en présence d'un champ gravitationnel aurait tendance à se disperser (donc pas d'inhomogénéités)... Mais comment alors expliquer celles détectées dans les rayonnements cosmiques ? En effet en présence du champ terrestre ces dernières ne devraient-elles pas modifier leur trajectoire et devenir ainsi inaccessible à la détection ?

Dr Eric Simon a dit…

Intéressante remarque. Mais il faut regarder l'ordre de grandeur de la force d'attraction (ou répulsion dans ce cas là) gravitationnelle de la Terre (6. 10^24 kg) sur un positron par exemple (de masse 9.11 10^-31 kg).
On se rend compte que cette force est minuscule, et en tout cas très très inférieure à la force produite par le champ magnétique terrestre (force qui est proportionnelle à la vitesse de l'antiparticule, qui peut être très élevée, avec des énergies cinétiques de l'ordre du GeV ou du TeV).

2494hm a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Dr Eric Simon a dit…

Je ne connais pas ce nuage d'antimatière, si vous pouvez m'en dire plus, je suis preneur! Si il s'agit vraiment d'un nuage au sens nuage d'antihydrogène, oui, ça semble contradictoire. Mais si il s'agit d'un halo d'antiparticules, ça pourrait être en cohérence. Je ne peux pas en dire beaucoup plus...

2494hm a dit…

Le mot nuage n'était peut être pas le plus approprié. Il ne s'agit en effet vraisemblablement pas d'anti-hydrogène mais bien plutôt d'anti-particules... Quoiqu'il en soit je vous mets le lien :

http://smsc.cnes.fr/INTEGRAL/Fr/lien3_res.htm

Dr Eric Simon a dit…

Merci pour ce lien.
Dans ces données de Integral, il s'agit d'antiparticules créée au sein des galaxies par des phénomènes violents (accrétion de trous noirs...). C'est tout à fait autre chose que l'antimatière "relique" qui peuplerait de vastes zones de l'Univers sans contact avec la matière, qui est l'objet de la théorie de Benoit-Lévy et al.

2494hm a dit…

Bonjour,

Bon après une petite nuit de repos les choses me semble un peu plus claire. (Rajoutons à ma décharge que je ne suis pas physicien, alors bon des bêtises forcément j'en dis... Beaucoup)

Effectivement hier cette concentration d'antimatière au centre de la galaxie me semblait contradictoire dans la mesure où, placée en tenaille entre 2 puissants champs gravitationnels « répulsifs » (la masse de la galaxie et le trou noir super massif ), ces anti-particules auraient dû condenser. Revisitées dans un cadre relativiste, en les imaginant remontant le puits gravitationnel les choses deviennent un peu plus limpides ce matin.

Toutefois n'avez-vous pas là un bon moyen d'étayer votre hypothèse par le calcul ? En effet si le champ gravitationnel de la galaxie participe à l'éjection de ces anti-particules alors il doit être possible de modéliser le flux reçu et de vérifier s'il colle à la réalité (Vous pouvez aussi m'envoyer promener, c'est une solution envisageable).

Autre chose, on sait que des anti-particules sont générées lors de certains orages, est-ce- qu'une étude visant à vérifier si ces dernières ont une trajectoire privilégiée vers l'espace ou le sol est concevable?

Dr Eric Simon a dit…

Je précise que je ne suis pas forcément en accord avec cette théorie moi-même. Ce n'est pas mon hypothèse, je relate simplement une idée qui a été publiée très récemment et qui me semble intéressante par ce qu'elle implique. Il est tout à fait possible que cette idée soit complètement fausse. Il ne faut surtout pas s'emballer.
Le problème des tests sur des observations c'est qu'il y a trop de paramètres qu'on ne maîtrise pas. C'est le problème de l'Univers utilisé comme un laboratoire, la limite c'est qu'on ne peut rien contrôler, on peut juste observer ce qui se passe. Pour faire de la "vraie" physique (je ne dit pas que l'astrophysique n'est pas de la physique, mais elle est juste différente!), il faut pouvoir contrôler l'expérience, modifier les paramètres de mesure et voir comment ça ce comporte.
Rien de mieux qu'un laboratoire pour étudier si l'antimatière est répulsive en gravitation.
C'est ce qui est en train d'être fait notamment au CERN avec l'expérience AEGIS que je citais.
Elle permettra de vraiment voir ce qui se passe quand un anti-atome d'hydrogène (antiproton+antiélectron) est lâché dans le vide dans le champ gravitationnel terrestre. Les résultats à venir seront passionnants, il faut suivre cette expérience (et d'autres) de près!..

2494hm a dit…

Hum, sauf que... S'ils obtenaient des résultats amenant à cette découverte, ne seraient-ils pas dans la même situation que les physiciens d'OPERA ? En effet l'expérience bien que menée en laboratoire avec des paramètres bien maitrisés, c'est pourtant les observations d'ICECUBE et de SN1987A que la communauté scientifique aurait tendance à créditer (j'ai même lu quelque part, si je me souviens bien, que « ça sentait le sapin pour les neutrinos supraluminiques » ). Or SN1987A a aussi montrée, si je ne me trompe pas, qu'il n'y avait pas de différence entre matière et antimatière du faite qu'il n'y ait eu réception que d'un seul flux de neutrinos...

Dr Eric Simon a dit…

Pour les neutrinos "supra"luminiques, le juge de paix sera l'expérience MINOS, qui est complètement similaire à OPERA (mais sur un autre continent), plus que les résultats astro. Même si les résultats astro donnent la réponse ;-))

Concernant le flux unique de neutrinos de 1987A, je ne connais pas ce truc, et je ne sais pas si ça peut avoir un lien avec la masse active gravitationnelle...

2494hm a dit…

Bonjour, les hypothèses suivantes sont-elles plausibles :

Les neutrinos sont des particules de DIRAC.
Les SN produisent autant de neutrinos que d'antineutrinos
Même si leur sensibilité aux champs gravitationnels est très faible, sur une durée de 168 000 ans cette interaction pourrait, tout de même, devenir significative.

Si oui et si la gravité est répulsive pour les anti-particules, est il alors déraisonnable de penser que les neutrinos et anti-neutrinos aurait dû être détectés à deux moments différents ? Or un seul flux d'une durée de 13 secondes l'a été ce jour là...

Dr Eric Simon a dit…

particules de Dirac : pour l'instant on n'a pas pu prouver le contraire.
SN produisant autant de neutrinos que d'anti : peut-être.

Différence de vitesse dûe à la différence de force gravitationnelle ? euh. Faut voir la masse du neutrino. Ouh. La masse du neutrino électronique est vraiment minuscule!... On connait non pas sa masse exacte mais une limite supérieure qu'on est sûr qu'il ne dépasse pas, et c'est de l'ordre de 2.5 eV, soit 200000 fois moins qu'un électron.
Les neutrinos émis lors d'une explosion de supernova le sont avec une certaine énergie (presque purement cinétique), qui est assez importante (10 à 30 MeV). Leur vitesse est d'environ 99.9999999% de c (oui oui, pas plus ;-)) J'ai l'impression que si il devait y avoir une accélération gravitationnelle des antiparticules par l'étoile source, son effet serait microscopique sur leur vitesse.

Attention au sujet des neutrinos SN1987A, le détecteur Kamiokande II qui avait détecté à l'époque 20 événements "neutrinos" a en fait détecté des antineutrinos électroniques essentiellement. Il n'était sensible qu'à ce type de particules ! (réaction antinu_e + p -> n + e+ puis le positron émet de la lumière Cerenkov dans l'eau, qui est mesurée.

2494hm a dit…

Merci pour ces précisions...

Mathieu a dit…

Merci pour cet article exceptionnel. Je suis très favorable à ce modèle. Il semble bien qu'il puisse presque tout expliquer. Si le big bang a produit autant de matière que d'antimatière, l'antimatière pourrait bien être le tissu qui maintient nos galaxies en place. L'observation de la non décroissance de la vitesse de rotation des étoiles à l'extérieur des galaxies effectuée par Vera Rubin dans les années 1970 pourrait aussi être expliquée par ce modèle non ? L'extérieur des galaxies se trouverait pris "en sandwich" entre matière et antimatière puisqu'à la frontière de l'interaction. L'expansion de l'univers pourrait aussi être expliqué par ce modèle. Si matière et antimatière se repoussent, il est naturel que l'univers soit en expansion. L'effet de lentille gravitationnelle pourrait aussi être un effet de la présence d'antimatière tout autour de nos galaxies. Ainsi la déviation de la lumière ne serait pas le fait de l'effet gravitationnel d'un hypothétique matière noire mais de l'effet antigravitationnel de l'antimatière. Les photons sont repoussés par l'antimatière et non attirés par la matière noire.
Je dis peut-être de grosses bêtises car je ne suis nullement astrophysicien mais que pensez-vous de ces possibles corrélations ? Est-ce plausible selon vous ?

Unknown a dit…

Bonjour,

Merci pour cet article très intéressant. Je suis quelque peu néophyte, mais une question me taraude tout de même sur les implications théoriques que cette hypothèse pourrait avoir (univers de Milne).
En fait j'ai même deux questions :
- Si la symétrie matière / antimatière est finalement respectée dans notre univers et que l'antimatière disposait d'une masse grave répulsive, comment se fait-il que l'univers reste en expansion ?
Dans la globalité, en cas de symétrie, la gravitation répulsive de l'antimatière ne devrait-elle pas finalement compenser exactement la gravitation attractive de la matière ? Et donc conduire à un univers statique ?
- Si la matière et l'antimatière ne se sont pas annihilées dans les phases primordiales de l'Univers, avec le ratio asymétrique qu'on lui prête, comment explique-t-on le ratio entre photons et matière qu'on observe actuellement dans l'Univers ? En fait je ne maîtrise pas forcément les concepts de création de matière et d'antimatière à partir de l'énergie du vide quantique (si c'est bien comme ça que ça opère d'ailleurs) et peut-être (surement) mes questions sont idiotes mais j'aimerais bien comprendre et cet article pique ma curiosité.
Si vous pouviez "éclairer ma lanterne", je vous en serais reconnaissant. Merci. Cdt.

Dr Eric Simon a dit…

Bonjour,

je vais tenter d'apporter des réponses à vos questions :
1) Pourquoi l'Univers serait toujours en expansion dans le cas d'une symétrie parfaite matière-antimatière ?
La solution de l'équation de la relativité générale qui donne une expansion à l'univers revient à Friedmann, il l'a trouvé en cherchant à expliquer pourquoi l'univers ne s'était pas déjà effondré sur lui-même à cause de l'attraction gravitationnelle de la matière. Einstein, qui croyait dur comme fer à un univers statique, avait ajouté sa fameuse constante cosmologique qui permettait de contrer l'effondrement gravitationnel en produisant un terme expansif accéléré pour atteindre l'équilibre.
Pour essayer de faire simple, l'équation de la relativité générale qui lie géométrie et matière s'écrit Gmn = 8piG.Tmn (Gmn et Tmn sont des tenseurs). Le fait que la quantité de matière de masse positive et de masse négative soient égale fait que Tmn=0. On a donc du coup Gmn =0.
Or Gmn s'exprime en fonction du facteur d'échelle a(t), de sa dérivée temporelle et de la courbure k. Avec Gmn = 0, on obtient a(t)~t (expansion linéaire en fontion du temps) et k=-1 (courbure spatiale négative)

2) Ratio photons/matière
On n'a pas besoin d'asymétrie particules/antiparticules dans l'univers primordial pour avoir des photons dans la quantité qui est celle que l'on estime à partir du CMB. Les deux sont en quelque sorte décorrélés. Ce n'est pas l'asymétrie qui compte ici mais la quantité totale de leptons et quarks (et leur anti correspondants).


Unknown a dit…

Bonsoir,

Merci pour cette réponse pleine de diligence !
Votre réponse au 1) appelle toutefois d'autres questions de ma part, mais c'est essentiellement lié au fait que je ne maitrise pas suffisamment (voir pas du tout) la théorie de la relativité générale. J'ai notamment du mal à distinguer clairement les différences entre la constante cosmologique, la densité d'énergie critique et le taux d'expansion et leurs liens dans l'équation. Corrigez moi si je me trompe :
- Einstein a introduit sa constante cosmologique de manière à ce qu'elle compense exactement la densité d'énergie critique, de manière à éviter que la gravitation attractive ne conduise à l’effondrement de l'univers. Ce qui donne un modèle cosmologique, solution de l'équation de la relativité, qui soit statique et courbé positivement. Mais cette constante cosmologique n'est pas liée à la matière.
- Le modèle cosmologique standard est une autre solution de l'équation de la relativité ou finalement la constante cosmologique serait cette fois "supérieure", dans ses effets répulsifs, à la densité d'énergie critique. L'excès de cette constante cosmologique pourrait alors correspondre à l'énergie sombre ou encore à l'énergie du vide
Cette fois, la solution à l'équation est un Univers de courbure nulle et à expansion accélérée
- La symétrie matière anti-matière avec antimatière de masse grave négative, correspondrait alors à un Univers courbé négativement, en expansion constante et avec une constante cosmologique nulle (donc sans énergie sombre, les effets répulsifs mettant l'univers en mouvement seraient liés à la matière)
Mais dans ce dernier cas de figure, nos observations de l'Univers ne tendent-elles pas plutôt à montrer une courbure nulle ?
D'autre part, n'est-ce pas aussi l'observation des mouvements des galaxies et des planètes qui ont conduits à l'hypothèse de la "masse manquante" et de l'introduction de la matière noire, qui se trouverait en quantité plus importante que la matière classique.
Si l'antimatière est en fait la matière noire, le ratio devrait être 50/50 en cas de symétrie matière / antimatière, non ?
Cdt,

Dr Eric Simon a dit…

et bien, pour vos trois points, je dirais ceci :

a) exact

b) oui, l'introduction de Lambda induit une expansion accélérée, dont l'origine exacte reste inconnue, mais ce traduit par ce terme dans les équations.

c) dans le cas de la solution Dirac-Milne, l'expansion n'est pas accélérée, donc pas besoin de recourir à l'ajout d'un terme Lambda.
Attention au terme courbure, c'est ici le terme de courbure spatiale k, il vaut 1, 0 ou -1, représentant respectivement un univers fermé (géométrie sphérique dans laquelle la somme des angles d'un triangle est supérieure à 180°), un univers plat (géométrie euclidienne) et un univers ouvert (géométrie hyperbolique où la somme des angles du triangle est inférieure à 180°).
Ca se traduit sur la valeur de la densité d'énergie Omega par une valeur inférieure à 1 (quand k=-1), 1 (k=0) ou supérieure à 1 (quand k=1). Et il se trouve que Omega a été mesuré par le satellite Planck cette année grâce aux mesures du CMB et on ne peut toujours pas dire si on est inférieur ou supérieur à 1, ou pile égal à 1 : à un niveau de confiance de 95%, on a : 0,9992 < Omega < 1,0029. Difficile de conclure... on peut très bien être dans l'une des trois possibilités...
Concernant la matière noire, non, l'antimatière résiduelle ne permet pas d'expliquer la masse manquante. On sait que la matière noire doit être non baryonique en très grande partie (or un antiproton est toujours un baryon). La ratio matière noire/matière est plutôt de l'ordre de 83/17, bien loin des 50/50 effectivement.
J'espère avoir éclairé votre lanterne. ;-)

Unknown a dit…

Oui merci ! Lanterne éclairée, à la lumière de vos connaissance :-)
Je pense maintenant avoir compris.
Je vais creuser et poursuivre mes investigations de mon côté sur toutes ces questions, mais sans vous embêter d'avantage car je pourrais vous bombarder de questions à n'en plus finir !

Pour l’anecdote, initialement je me documentais sur ces sujets pour un projet de livre de SF, histoire d'avoir un contexte réaliste et des idées d'intrigue.
Mais je trouve que la cosmologie est très riche et intéressant et je me rends compte que je n'en maitrisais que peu d'aspects en termes de connaissances.

Résultat, je n'avance pas d'un pouce le roman mais je dévore tous les ouvrages de vulgarisation qui me passent sous la main ! :-)
... Reeves, Hawking, Trinh Xuan Thuan, Greene, Bagot ...
Autant vous dire que votre site vient d'être épinglé dans mon marque à page firefox:-).
Il est vraiment très intéressant mais parfois je m'y perds un peu car je ne maitrise pas encore suffisamment les bases.
Je pense me mettre sur de vrais cours et des exo appliqués sur la relativité générale (mais il faut que je ré apprenne les calculs tensoriels - pas fait depuis 12 ans et c'était en mécanique des système déformable), sur la physique quantique, voir sur des théories des cordes.
A ce rythme, mon bouquin risque pas de sortir avant un moment !
Enfin bref, fin de l’anecdote,
Merci encore et passez de très bonnes fêtes de fin d'année.
Cdt,

Giudecca a dit…

intéressant et je pense qu'on peut même résumé à : Matière attire tout et Antimatière repousse tout ... c'est assez clair quand on se représente la gravité (comme on nous la tous décrit car c'est très parlant visuellement) avec la déformation des boules posées sur un tissus tendu... et comme l'antimatière serait l'exact contraire, il faut se représenter une déformation inverse (la boule ne s'enfonce pas dans le tissu mais se retrouve "soulevée" par celui-ci)... on comprend aisément que l'antimatière repousse tout, même l'antimatière... tout le reste (où est l'antimatière, pourquoi il n'y a pas de composés structurés d'antimatière) découle de ces deux propriétés... et même, on peut y voir des pistes concernant l'expansion en accélération de l'Univers