jeudi 17 novembre 2016

75% des planètes circumbinaires (Tatooine) ne sont pas détectées


Les planètes qui sont en orbite de deux étoiles en même temps sont différentes de celles que l'on connaît autour d'étoiles uniques. Elles se sont formées dans des circonstances très différentes et sont à ce titre très intéressantes à étudier, sauf qu'il est beaucoup plus difficile de les trouver, tellement difficile que des astronomes viennent d'estimer qu'on en ratait pas moins de 75%.  




La détection d'exoplanètes orbitant autour d'un couple d'étoiles par la méthode classique du transit est rendue très difficile du fait de la géométrie et de la dynamique de tels systèmes à trois corps (ou plus). Cette spécificité implique qu'elles possèdent des trajectoires très variables, qui peuvent changer complètement en l'espace de quelques mois ou années. Le télescope Kepler a pu trouver une dizaine de planètes circumbinaires de cette manière.
Lorsqu'il n'y a qu'une étoile, c'est très simple. Une fois que la période orbitale de la planète est déterminée à partir de la durée du transit observé, il est aisé de renouveler l'observation après une "année" de l'exoplanète pour confirmer l'observation et valider la candidate. Mais lorsqu'il s'agit d'un couple d'étoiles, tout se complique. La planète peut parcourir son orbite dans le même plan que celui formé par les deux étoiles ou dans un autre plan. Et l'angle de son plan orbital par rapport au plan de rotation des deux étoiles varie à chaque orbite. Il s'ensuit qu'à chaque révolution, la planète peut produire un transit devant l'une des deux étoiles, devant les deux ou même aucun.
La seule façon de pouvoir prédire quel est le bon moment pour observer une planète transitant devant un couple binaire est de faire tourner des simulations numériques très gourmandes sur des gros ordinateurs. Mais en 2015, David Martin à l'Observatoire de Genève, avec des collègues, ont commencé à chercher une nouvelle méthode plus simple. Ils ont trouvé des équations permettant de calculer si une planète circumbinaire pouvait transiter ou non devant ses étoiles. Ils trouvèrent que de nombreux transits devaient avoir lieu, mais qu'on ne pouvait pas prédire leur date précise. David Martin a alors amélioré ses calculs et parvient à déterminer maintenant quand l'orbite d'une planète croise le plan orbital de ses étoiles, ce qui donne désormais aux observateurs des fenêtres dans lesquelles ils auront plus de chance de voir un transit.
Martin a également quantifié la probabilité qui était celle du télescope Kepler d'avoir vu de telles planètes circumbinaires dans les 10 systèmes où il avait identifié des planètes de type Tatooine par transit durant sa mission initiale de 4 ans. La majorité de ces planètes passent moins de 50% du temps dans une position de transit, et certaines moins de 20%. Et il trouve que Kepler aurait pu en trouver entre 17 et 30 autres du même type. En d'autres termes, les astronomes, jusqu'à aujourd'hui, auraient raté 75% des planètes en orbite d'étoiles doubles. La bonne nouvelle, c'est que l'on sait maintenant qu'elles devraient transiter un jour ou l'autre, pourquoi pas durant les relevés des futurs télescopes TESS et PLATO qui viendront remplacer Kepler dans quelques années pour traquer les planètes où qu'elles se trouvent.

Source :

Circumbinary planets II - when transits come and go
David. V. Martin
Monthly Notices of the Royal Astronomical Society online (November 5, 2016)


Illustration :

Vue d'artiste d'un transit de planète circumbinaire (NASA/JPL-Caltech/R. Hurt)

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