Les deux lunes de Mars, Phobos et Deimos, ont longtemps été considérées être des astéroïdes capturés par la planète rouge. Mais il se pourrait bien que leur nature et leur histoire soit bien différente...
Les satellites de Mars Phobos et Deimos, imagés par la sonde américaine Mars Reconnaissance Orbiter, échelle différente sur les deux images(NASA/JPL) |
Les premiers indices qui ont mis la puce à l'oreille des planétologues sont des observations de la composition des deux satellites ainsi que la forme de leur orbite. Des observations effectuées par la sonde européenne Mars Express ainsi que par l'américaine Mars Global Surveyor, ont montré en 2011 et en 2014 que les émissions thermiques infra-rouge de Phobos et de Deimos ne correspondaient pas à celles de matériaux riches en carbone comme le sont les chondres carbonacés formant les astéroïdes. De plus, ces mêmes missions ont mis en évidence la présence de minéraux sur Phobos, qui se retrouvent également à la surface de Mars. Enfin, l'expérience Mars Radio Science qui était embarquée sur la sonde Mars Express a permis de mesurer en 2010 la densité et la porosité de Phobos, avec pour résultats respectivement une densité de 1,87 et une porosité d'environ 30%. Une si faible densité et si forte porosité sont inconnues pour la plupart des astéroïdes... Des astronomes ont même montré qu'avec de telles caractéristiques, un astéroïde n'aurait pas survécu à une capture gravitationnelle et se serait désagrégé.
Quant à leur orbite, que ce soit celle de Phobos ou celle de Deimos, elles se trouvent quasi circulaires et presque exactement dans le plan équatorial martien. Or, s'il s'était agit d'une capture gravitationnelle, les deux petits corps auraient dû montrer des orbites aléatoires, très elliptiques, pas forcément dans le plan équatorial et même pourquoi pas rétrograde. Rien de tout ça en réalité.
Des chercheurs américains, mené par Robert Citron de l'université de Californie à Berkeley viennent de montrer à l'aide de simulations numériques qu'il se peut très bien que et Phobos et Deimos soient le produit de débris de Mars issus d'un ou plusieurs impacts géant sur Mars.
Mars |
Il se trouve qu'il existe sur Mars une très vaste zone de 7700 km de diamètre nommée le bassin Borealis, qui ressemble à s'y méprendre à un énorme bassin d'impact météoritique, et qui recouvre presque la totalité de l'hémisphère nord de Mars. Les planétologues sont donc partis de l'hypothèse qu'un corps d'une masse égale à 1% de la masse de Mars a impacté la planète au niveau du bassin Borealis, puis ont simulé ce qui se passerait.
Avec un impact produisant une énergie colossale de 3 10^29 joules, énergie nécessaire pour produire le bassin Borealis, les chercheurs trouvent qu'une énorme quantité de poussière et de débris se retrouve éjectée en orbite de Mars : pas moins de 500 millions de milliards de tonnes... correspondant à quelques pourcents de la masse du corps à l'origine de l'impact. Pour fixer les ordres de grandeur, la masse de Deimos est de 1480 milliards de tonnes et celle de Phobos de 10700 milliards de tonnes...
Une fois en orbite, ces débris sont pour certains éjectés hors de l'influence martienne ou bien se retrouvent former un disque autour de Mars, bien sûr dans le plan de l'équateur, ou enfin retombent sur la planète. S'ensuit pour les débris formant un disque ce que l'on appelle une ré-accretion : tous les grains de poussière et de débris s’agrègent les uns avec les autres en formant des corps de plus en plus gros, à l'image d'une boule de neige que l'on fait rouler, jusqu'à entièrement nettoyer l'orbite. C'est ainsi qu'auraient pu naître Phobos et Deimos.
Robert Citron et ses collègues montrent en tous cas grâce à leur code de calcul SPH (Smoothed Particle Hydrodynamics simulation) que la matière injectée en orbite est très largement suffisante pour expliquer la naissance des deux lunes de Mars à partir d'un disque et sous un régime d'effet de marée fort.
Reste maintenant à comprendre où serait passée toute la masse de débris en surplus du disque...
Source :
FORMATION OF PHOBOS AND DEIMOS VIA A GIANT IMPACT
Robert I. Citron et al.
Icarus 252 (2015) 334-338
2 commentaires :
Bonsoir,
je suis assez réfractaire à ce genre d'annonce !
" Robert Citron et ses collègues montrent en tous cas grâce à leur code de calcul SPH (Smoothed Particle Hydrodynamics simulation) que la matière injectée en orbite est très largement suffisante pour expliquer la naissance des deux lunes de Mars à partir d'un disque et sous un régime d'effet de marée fort."
Avec la simulation on .. Simule.
Quant à en déduire des théories, il y a un pas de géant.
Aujourd'hui il faut produire coute que coute, chercheur en mal de budget cherche idée lumineuse !
Il ne s'agit pas d'une annonce, mais d'un résultat publié. Ces résultats de simulation permettent de valider une hypothèse sur l'origine des satellites de Mars. On ne parle pas de théorie, mais d'une hypothèse rendue plausible au vu d'observations sur la composition desdits satellites...
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