Les trous noirs de masse intermédiaire, de quelques milliers de masses solaires, semblent bien exister malgré leur difficile mise en évidence. Un nouveau spécimen vient d'être découvert par des astronomes américains. C'est donc bien à une troisième famille de trous noirs que nous avons affaire.
Zone centrale de NGC 1313 où se trouve NGC1313 X-1 (ESO) |
La très grande majorité des trous noirs que nous parvenons à "voir", à détecter par leurs effets indirects sur leur environnement, sont soit petits, de quelques masses solaires, ou soit gigantesques, de quelques millions à quelques dizaines de milliards de masses solaires. Les premiers se trouvent au sein de notre galaxie dans notre voisinage proche et sont des vestiges d'étoiles explosées et les seconds se trouvent au centre de presque chaque galaxie.
Une grande question que les astrophysiciens se posent est de savoir comment on peut parvenir à de si énormes trous noirs à partir de si petits à l'origine.
Depuis quelques années, des indices de la présence de trous noirs de masse intermédiaire, de quelques milliers à quelques dizaines de milliers de masses solaires, se sont fait jour. Mais pour certains d'entre eux, il ne s'est agit que de fausse découverte, montrant seulement un trou noir classique avec une exceptionnelle émission de rayons X laissant penser à un objet de beaucoup plus grande masse. De fait, il n'existe actuellement que 6 candidats au titre de trou noir intermédiaire.
Récemment, en août 2014, une équipe d'astrophysiciens menée par Dheeraj Pasham, jeune chercheur de l'Université du Maryland, avait réussi à mettre le doigt sur un tel trou noir (M82 X-1) qui a une masse de 400 masses solaires, grâce à l'utilisation du satellite RXTE (Rossi X Ray Timing Explorer) de la NASA. Et aujourd'hui, un an plus tard, la même équipe est fière d'annoncer la découverte d'un nouveau trou noir intermédiaire, cette fois-ci ayant une masse de l'ordre de 5000 masses solaires. Cette étude effectuée grâce à l'utilisation du télescope spatial européen XMM-Newton, est parue il y a quelques jours dans Astrophysical Journal Letters et on y apprend que ce nouveau très sérieux candidat de trou noir intermédiaire, qui est nommé NGC1313X-1, se situe dans la galaxie NGC 1313 et est classé parmi les sources X dites ultra-lumineuses (les ULX).
Il s'agit de l'une des sources X les plus intenses de l'Univers proche. Comme ces sources X ultra-lumineuses sont encore aujourd'hui difficilement expliquées, certains astrophysiciens estiment qu'il pourrait tout simplement s'agir de ces fameux trous noirs intermédiaires en train d'avaler de la matière environnante.
La méthode que Pasham et ses collègues ont utilisée repose sur le fait que l'émission de rayons X en provenance de NGC1313X-1 montrent un signal d'oscillation, ce qu'on appelle des osccillations quasi périodiques (OQP).
Pour être tout à fait exact, NGC1313 X-1 possède deux oscillations périodiques différentes, la première produit des flashs 27,6 fois par minute tandis que la seconde en produit 17,4 fois par minute.
En comparant ces deux fréquences, les chercheurs se sont aperçus qu'on obtenait un ratio 3:2 presque parfait. Et chose étonnante, Pasham avait déjà trouvé le même phénomène avec le même ratio 3:2 avec le trou noir trouvé en 2014...
Les astronomes ne savent pas encore très bien d'où proviennent ces oscillations quasi-périodiques de rayons X mais ce qui est sûr, c'est que le ratio 3:2 se retrouve également avec des trous noirs beaucoup plus petits, de masse stellaire.
Ces flashs intenses de rayons X sont générés le plus probablement par une activité très proche de l'horizon du trou, là où la matière est emprisonnée avant de disparaître.
Et la masse du trou noir peut être déduite de la fréquence des oscillations des flashs de rayons X qui forment le ratio 3:2 caractéristique observé. En recherchant un tel ratio dans les oscillations diverses observées, les chercheurs parviennent à isoler certaines fréquences, qui leur fournissent ensuite une estimation de la masse du trou noir : plus la fréquence d'oscillation est basse, plus la masse du trou noir est grande.
La méthode développée par Pasham et ses collaborateurs est empirique et ne repose sur aucun modèle physique, ce qui la rend étonnamment puissante car elle fonctionne à la fois pour des petits trous noirs et des trous noirs de plusieurs milliers de masses solaires.
Dheeraj Pasham a déjà identifié plusieurs sources X qui pourrait bien être de bons candidats pour être des trous noirs intermédiaires, il souhaite maintenant pouvoir les explorer pour conforter sa méthode, notamment avec NICER (Neutron Star Interior Composition Explorer), le futur télescope à rayons X que la NASA doit lancer l'année prochaine.
Source :
Evidence for High-Frequency QPOs with a 3:2 Frequency Ratio from a 5000 Solar Mass Black Hole
Dheeraj Pasham et al.
Astrophysical Journal Letters Volume 811, Number 1 (September 21, 2015)
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