07/02/19

Découverte d'un disque salé autour d'une jeune étoile

Une équipe d'astronomes vient de détecter la présence de sel (du chlorure de sodium), et d'autres composés salés dans le disque de poussières qui entoure une jeune étoile massive, Orion Source I, située derrière la Nébuleuse d'Orion. C'est la première fois que ces molécules inorganiques sont observées dans un tel environnement, alors qu'elles ont toujours été observées dans les couches externes d'étoiles mourantes. 




Adam Ginsburg (National Radio Astronomy Observatory (NRAO)) et ses collaborateurs publient leur découverte dans The Astrophysical Journal. Ils montrent que la présence étonnante de NaCl autour de Orion Source I  est peut-être dûe à la nature très spéciale de cette zone. En effet, en analysant les spectres enregistrés par ALMA, les chercheurs ont trouvé près de 60 transitions différentes (correspondant à des raies d'émission de molécules de chlorure de sodium ou de chlorure de potassium, dont la position dans le spectre peut varier en fonction de la température du milieu). 
Pour expliquer l'abondance de ces sels dans ce disque circumstellaire, les astronomes évoquent des collisions de grains de poussière, qui auraient pu libérer les molécules de sel dans le disque. Ce qui est intéressant pour les chercheurs si cette hypothèse est juste, c'est que le signal formé par les raies caractéristiques du sel permettrait de visualiser le comportement du disque circumstellaire seul, sans trop de signal parasite venant de l'étoile. Ils pourraient ainsi évaluer sa vitesse de rotation ainsi que sa masse par exemple, et en déduire certaines informations sur l'étoile autour duquel il est en rotation.

Pour tenter d'expliquer pourquoi les grains de poussière du disque seraient entrés en collision les uns avec les autres, il faut savoir que l'étoile Orion Source I s'est formée dans une région de formation d'étoiles explosive située dans une nurserie stellaire nommée Orion Molecular Cloud I. Mais cette étoile a une vitesse de 10 km/s et paraît avoir été éjectée de son nuage de naissance il y a 550 ans environ. L'origine de cette éjection pourrait avoir un lien avec la collision des grains de poussière. Les chercheurs évoquent la possibilité que l'étoile (et son disque de poussière avec elle) ait été brutalement accélérée par la rencontre ou la collision avec une autre étoile, ce qui aurait pu produire une onde de choc dans le disque circumstellaire et produire alors les collisions entre grains vaporisant les molécules de chlorures de sodium et de potassium au passage.

Le fait que des métaux comme le sodium et le potassium soient présents autour d'une jeune étoile indique aussi que d'autres métaux ou molécules contenant des métaux pourraient être présents dans ce type d'environnement. Or la détection des composés métalliques est quasi impossible en radioastronomie. Détecter le sel pourrait ainsi devenir un outil indirect pour la détection de métaux autour des étoiles jeunes.
Ginsburg et ses collaborateurs montrent dans leur étude que le sel dont ils observent la signature se trouve à une distance comprise entre 30 et 60 unités astronomiques de l'étoile et aurait une masse totale de 1 milliard de milliards de tonnes (1021 kg), ce qui correspond environ à la masse des océans terrestres.

Il reste maintenant à vérifier si il existe d'autres cas où de telles quantités de sel sont présentes autour d'étoiles massives jeunes, ou bien si Orion Source I est un cas particulier plutôt rare, ou bien si la présence de sel peut être utilisée comme un signe d'événements violents se déroulant dans les nurseries stellaires.


Source

Orion SrcI’s disk is salty
A. Ginsburg, et al., 
Accepté pour publication dans The Astrophysical Journal 

Illustration

Image du disque salé entourant Orion Source I (anneau bleu) par ALMA. En fond : le nuage Orion Molecular Cloud I imagé par le télescope Gemini (ALMA (NRAO/ESO/NAOJ); NRAO/AUI/NSF; Gemini Observatory/AURA)

1 commentaire :

jean-paul a dit…

Si je puis mettre mon grain de sel, c'est une histoire à raconter à l'apéritif.