Makémaké, cette planète naine de
notre système solaire, assez peu connue depuis sa découverte en 2005, vient de
se découvrir un peu plus grâce à une opportunité observationnelle assez rare
sur laquelle se sont rués une grande équipe d’astronomes à l’aide de nombreux
télescopes : une occultation d’étoile.
Makémaké, qui doit son nom à une
divinité du peuple de lîle de Pâques (et qui fut découverte le jour de Pâques
2005, il n’y a pas de hasard), est la troisième plus grosse planète naine du
système solaire, derrière Pluton et Eris (dont la découverte fut annoncée le
même jour).
Makémaké vue par Hubble |
Alors que Pluton et Eris sont
très similaires en termes de taille, de densité et de composition de surface,
Pluton possède une petite atmosphère alors que Eris en est dépourvue, probablement
à cause de leur différence de distance au Soleil. Makémaké se situe quant à
elle entre Pluton et Eris, avec une composition, connue par spectroscopie,
assez semblable à ses compagnes glaciales, mais dont on ignorait jusqu’à
présent totalement sa densité et si elle possédait une atmosphère.
C’est pour répondre à ces
questions que de nombreux astronomes de partout dans le monde se sont associés en
profitant d’un phénomène, courant avec les grosses planètes, mais rare pour des
planètes naines très éloignées : l’occultation d’une étoile.
Cette occultation d’une très
faible étoile (nommée NOMAD 1181-0235723, montrant une magnitude de 18.22) a eu
lieu le 23 avril 2011. Le suivi de ce qu’on appelle la courbe de luminosité de
cette étoile se faisant masquer par Makémaké durant un temps très court, a
permis aux astronomes d’enregistrer un grand nombre d’informations, comme par
exemple la présence ou non d’atmosphère, sa composition, et surtout la taille
de la planète naine. Connaissant la taille et une estimation de la masse via la
quantité d’atmosphère présente, ils peuvent ainsi évaluer sa densité.
Courbe de luminosité de l'occultation par Makémaké (Nature) |
L’occultation avait été calculée
dès 2010, ce qui laissait un peu de temps aux astronomes pour se préparer. Pas
moins de 16 télescopes partout dans le monde ont alors été réquisitionnés et le
jour J, seulement 7 télescopes répartis sur cinq sites ont pu être exploités
pour suivre l’occultation tant attendue. Mais le résultat est à la hauteur des
attentes.
Les différentes courbes de
luminosités obtenues avec les 7 télescopes permettent de décrire un objet
ellipsoïde avec un petit-axe de 1430 ± 9 km et un grand axe de 1502 ± 45 km.
L’albédo mesuré (le pouvoir de réflexion de la lumière) est de 0,77 ± 0,03,
soit plus grand que celui de Pluton (0,52) mais bien plus faible que celui de
Eris (0,96). Une des données les plus intéressantes est obtenue par la forme
très abrupte de l’apparition et la réapparition de l’étoile occultée, indiquant
sans aucun doute l’absence d’atmosphère globale sur Makémaké (ou en tous cas
avec une pression atmosphérique inférieure à 12 nanobars de méthane, excusez du
peu…).
A partir des dimensions de la
planète naine, de la contrainte de gravitation associée à l’absence
d’atmosphère (le pouvoir de rétention des gaz volatils), et connaissant par ailleurs
sa période de rotation (7,77 heures), les astronomes en déduisent sa masse et
donc sa densité, qui était jusqu’alors inconnue, et qui vaut 1,7 ± 0.3…
On voit ainsi se dessiner trois
planètes naines qui ont quelques points communs et beaucoup de différences. Le
très fort albédo de Eris et son absence d’atmosphère est expliqué par le fait
que l’atmosphère s’est entièrement condensée en glace très réfléchissante.
Makémaké montre un autre cas avec une absence d’atmosphère globale mais un
albédo moyen. L’explication avancée par les auteurs de cette étude serait
l’existence d’une atmosphère localisée, avec des zones de condensation et de
sublimation gazeuses elles-aussi localisées sur la surface… Étonnant,
non ?
Encore une curiosité de plus pas si loin de chez nous, dont il reste à découvrir
si les processus sont dirigés essentiellement par la chaleur du soleil ou par
d’autres mécanismes.
Source :
Albedo and
atmospheric constraints of dwarf planet Makemake from a stellar occultation
J. L. Ortiz, et al.
Nature 491, 566–569 (22
November 2012)
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