22/03/17

Observation de structures magnétiques de la taille d'un amas de galaxies


Des astronomes allemands et américains viennent de détecter des structures de champ magnétique ordonnées qui s'étendent sur plusieurs millions d'années lumière. Il s'agit des champs magnétiques les plus étendus connus à ce jour.

Les amas de galaxies sont les plus grandes structures liées par la gravitation. Ils peuvent atteindre une dimension de l'ordre de 10 millions d'années-lumière, soit une centaine de fois la taille de notre galaxie, et peuvent contenir jusqu'à plusieurs milliers de galaxies. Les amas de galaxies peuvent subir des collisions entre eux ce qui entraîne la création d'ondes de choc dans le gaz chaud qui les peuple et qui entoure les galaxies. Il en est de même pour les champs magnétiques. Rappelons qu'un champ magnétique apparaît lorsqu'une charge électrique est en mouvement, et les mouvements de particules chargées ne manquent pas au sein des galaxies et aux alentours. Il existe alors un champ magnétique global, somme vectorielle des champs magnétiques locaux.
Ces ondes de choc induites sur le gaz et les champs magnétiques lors des collisions d'amas produisent des structures visibles sur les bords des amas par leur émission radio qui ont la forme caractéristique d'arcs. Depuis la découverte de la première relique de collision de ce type en 1970, environ 70 arcs radio ont pu être mis en évidence dans des amas de galaxies, mais on estime que leur nombre doit être beaucoup plus élevé. La compression des champs magnétiques a pour effet d'ordonner les lignes de champ, ce qui, par la suite affecte directement les ondes radio émises dans l'amas en les polarisant linéairement.
C'est ce phénomène de polarisation que l'équipe germano-américaine menée par la jeune chercheuse Maja Kierdorf a observé sur quatre amas de galaxies avec le radiotélescope de 100 m du  Max Planck Institute für Radioastronomie de Effelsberg en Allemagne. Il s'agit des amas CIZA J2242+53 et sa relique radio surnommée "la Saucisse", 1RXS 06+42 et sa relique radio dénommée "la Brosse à dents", ZwCl 0008+52 et enfin l'amas Abell 1612.

Ils ont observé des longueurs d'onde de 3 et 6 cm, qui offrent la moindre absorption par le milieu intergalactique. La polarisation observée, très élevée (supérieure à 50%) permet aux chercheurs de quantifier la valeur du champ magnétique et son degré d'alignement. Ce haut degré de polarisation indique que les vecteurs du champ magnétique sont quasi parfaitement alignés le long de la structure relique, comme ce qui serait attendu pour un front d'onde de choc observé par la tranche.

Les auteurs de cette étude publiée dans Astronomy and Astrophysics, ont également élaboré une méthode pour déterminer, à partir du degré de polarisation, le rapport entre la vitesse des nuages de gaz en collision et la vitesse du son locale, ce qu'on appelle le nombre de Mach, et ils trouvent une valeur supérieure à 2,2 pour les reliques de la Saucisse et de la Brosse à dents, ce qui indique que la vitesse de collision devait être de l'ordre de 2000 km/s, une vitesse plus élevée que ce qui avait pu être inféré à partir d'observations de l'émission de rayons X.
Mais les astrophysiciens observent également un phénomène qu'on appelle la "rotation de Faraday" : le plan de polarisation de l'émission radio des reliques de collision tourne en fonction de sa longueur d'onde. Cela signifie que des champ magnétiques alignés existent dans tout le volume de l'amas et c'est son association avec le gaz chaud intergalactique qui produit la rotation de Faraday observée. Cela en ferait ainsi les plus vastes structures magnétiques (champs magnétique aligné) connues. Les astrophysiciens estiment même que ces champs magnétiques doivent s'étendre au delà des amas de galaxies eux-mêmes...


Référence

Relics in galaxy clusters at high radio frequencies
M. Kierdorf et al.,
Astronomy & Astrophysics 600, A18 (april 2017)


Illustrations

Cartographie de la relique radio de l'amas CIZA J2242+53 distant de 2 milliards d'années-lumière, cette relique est surnommée "la Saucisse" du fait de sa forme. Image crée avec le radiotélescope de 100 m de Effelsberg. Les couleurs indiquent l'intensité de la polarisation linéaire. (Kierdorf et al.)

Aucun commentaire :