08/03/17

Observation des plus lointaines poussières d'étoiles


Le réseau de radiotélescopes ALMA de l'ESO vient de battre un nouveau record avec l'observation d'une galaxie dans l'Univers âgé de seulement 600 millions d'années. Cette galaxie de 2 milliards de masses solaires en étoiles est constituée de poussières produites par la première génération d'étoiles, la poussière la plus lointaine observée à ce jour.




Nicolas Laporte (College University, Londres) et ses collaborateurs ont observé cette toute petite galaxie distante de 13,2 milliards d'années-lumière grâce à l'amplification produite par la lentille gravitationnelle du désormais célèbre amas de galaxies Abell 4427 qui se révèle être un véritable outil d'observation primaire pour les astronomes. La prouesse tient non pas dans la distance de cette galaxie qui ne bat pas le record, mais dans le fait d'y détecter de la poussière, faisant de cette détection la poussière la plus lointaine observée dans l'espace et dans le temps. Cette galaxie, dénommée A2744_YD4 est observée dans l'Univers âgé de seulement 600 millions d'années et produit des étoiles à raison de 20 par an (notre galaxie aujourd'hui produit en moyenne une seule étoile par an). Mais les astronomes ont pu détecter dans les spectres infrarouges acquis par ALMA la présence de raies caractéristiques de l'oxygène, du carbone et du silicium. Ces atomes proviennent des toutes premières étoiles qui ont dû se former 400 millions d'années après la singularité initiale, leur masse se monterait à environ 6 millions de masses solaire d'après les chercheurs qui publient leurs observations dans The Astrophysical Journal Letters. Il a donc suffi de seulement 200 millions d'années pour que des supernovas, phases finales des toutes premières étoiles, dispersent de grandes quantités d'atomes "lourds" dans le milieu. Ces premières étoiles étaient pour la plupart très massives et donc avec une durée de vie de l'ordre de la dizaine de millions d'années. 

Laporte et ses collègues ont également détecté des signatures d'atomes d'oxygène ionisé, ce qui indique que le gaz de cette galaxie était ionisé, fournissant par là même une réponse à la question de la date de la réionisation du milieu intergalactique par l'activité des premières galaxies.


La possibilité désormais entre les mains des astronomes de pouvoir quantifier et caractériser la nature des poussières des galaxies les plus lointaines va leur permettre de mieux évaluer le moment crucial où les premières galaxies se sont formées. Plus la poussière observée est constituée d'éléments légers, plus la galaxie est jeune.
Les chercheurs indiquent en outre que l'oxygène ionisé qu'ils observent dans les longueurs d'ondes millimétriques pourrait avoir une autre origine que l'ionisation due à l'émission UV des jeunes étoiles nouvellement formées. Il pourrait avoir pour origine la présence d'un trou noir, mais les données sont encore insuffisantes pour trancher entre les deux hypothèses.

Référence

N. Laporte et al.
Dust in the reionization era: ALMA observations of a z = 8.38 gravitationally-lensed galaxy. Astrophysical Journal Letters en ligne (March 8, 2017)
http://www.eso.org/public/archives/releases/sciencepapers/eso1708/eso1708a.pdf


Illustrations

1) Localisation de la galaxie A2744_YD4 (ALMA (ESO/NAOJ/NRAO), NASA, ESA, ESO and D. Coe (STScI)/J. Merten (Heidelberg/Bologna))

2) Vidéo Credit: ALMA (ESO/NAOJ/NRAO), NASA, ESA, ESO and D. Coe (STScI)/J. Merten (Heidelberg/Bologna)/spaceengine.org/Digitized Sky Survey 2
Music: Astral Electronic

1 commentaire :

Anonyme a dit…

Bonjour,

un petite question concernant la distance de A2744_YD4.
On nous dit qu'elle est âgée de 13.2 milliards d'années et que sa distance est "donc" de 13.2 milliards d'al.
Il me semble que c'est faux, dans un Univers en expansion on ne peut pas assimiler l'âge avec la distance exprimée en al.
Merci pour vos éclaircissements.