mardi 4 février 2020

Solar Orbiter : la nouvelle sonde d'exploration du Soleil


Au moment où les premiers (très nombreux) résultats de la sonde Parker Solar Probe sont publiés dans un supplément spécial de Astrophysical Journal (plus de 50 articles d'un coup consacrés aux seulement deux premières orbites de la sonde sur ses 24 prévus! nous y reviendrons...), c'est une autre sonde d'exploration du Soleil qui va prendre son envol dans quelques jours, lancée par une fusée Atlas V depuis Cap Canaveral :  une sonde conjointe entre les agences spatiales européenne et américaine, Solar Orbiter. Après une série de rebonds autour de Vénus et de la Terre, la sonde aura pour objectif d'étudier le Soleil à l'aide de nombreux instruments, dans une orbite très elliptique et hors écliptique. La mission est présentée cette semaine dans Nature Astronomy.



Cela fait plus de quatre siècles que les taches solaires sont observées au télescope, et plus de 60 ans que le vent solaire a été découvert. Mais de nombreux mystères sur la machinerie du Soleil et de son atmosphère sont toujours là. Le but principal de Solar Orbiter sera d'apporter des données multiples pour mieux comprendre le couplage existant entre le Soleil et l'héliosphère. Les scientifiques de l'ESA et de la NASA ont prévu une combinaison de 6 instruments pour observer le Soleil et la couronne, et quatre autres instruments pour mesurer le vent solaire impactant la sonde. Solar Orbiter va permettre en même temps d'analyser le plasma qui forme le vent solaire (sa composition, sa propagation), et son origine à la surface du Soleil. L'instrument SWA (Solar Wind Analyser) va mesurer les propriétés des électrons, des protons et des ions lourds. MAG est un magnétomètre pour mesurer les champs magnétiques. RPW (Radio and Plasma Waves) est quant à lui un radiomètre dédié à l'analyse du plasma, et EPD (Energetic Particle Detector), comme son nom l'indique détectera des particules dans la bande des hautes énergies. Du côté des imageurs, Solar Orbiter est doté d'un imageur UV à haute résolution, EUI (Extreme-Ultraviolet full-Sun and high-resolution Imager), d'un coronographe (Metis), d'un imageur polarimétrique et sismique (PHI), d'un imageur héliosphérique (SoloHI), d'un spectro-imageur UV (SPICE) et enfin d'un télescope spectromètre X (STIX). 

Les quatre questions fondamentales auxquelles les astrophysiciens espèrent obtenir des réponses avec ces dix instruments de pointe sont : 
1) qu'est-ce qui produit le vent solaire et d'où vient le champ magnétique de la couronne ?
2) comment l'héliosphère se retrouve aussi variable ?
3) comment les éruptions solaires produisent les particules énergétiques formant l'héliosphère ?
4) comment fonctionne la dynamo solaire et quel est son rôle dans la connexion Soleil - héliosphère ?

Solar Orbiter viendra ainsi compléter utilement les données recueillies par la mission Parker Solar Probe. Les rebonds d'assistance gravitationnelle obtenus en cours de route autour de Vénus et de la Terre vont mener Solar Orbiter sur un plan orbital incliné de 33° par rapport à l'écliptique, ce qui va permettre pour la première fois de voir les pôles du Soleil.  
Solar Orbiter prend la suite des missions SOHO (1995) et Ulysses (1990) en en reprenant les mêmes principes : une orbite en dehors de l'écliptique et une approche du Soleil suffisamment près pour pouvoir encore utiliser des télescopes (ce que ne peut pas faire la sonde Parker qui s'approche trop près). Le périhélie maximum de Solar Orbiter sera situé à 0,28 UA (42 millions de km du Soleil).
Après son lancement le 10 février, la sonde atteindra son premier périhélie en juin 2020, où une partie de ses instruments commenceront à être opérationnels. Mais la totalité des 10 instruments seront pleinement fonctionnels seulement en novembre 2021 et devraient le rester jusqu'en 2025 au minimum avec une extension possible jusqu'en 2030... 

Avec Parker et maintenant Solar Orbiter, les spécialistes du Soleil s'attendent à vivre une très riche décennie qui va probablement transformer les connaissances que nous avons sur notre étoile. Toutes les données seront rendues publiques pour toute la communauté scientifique 3 mois après leur réception sur Terre.


Source

Europe’s next mission to the Sun
D. Müller, I. Zouganelis, O. C. St. Cyr, H. R. Gilbert & T. Nieves-Chinchilla 
Nature Astronomy (3 january 2020)


Illustration

Vue d'artiste de la sonde Solar Orbiter  (ESA/ATG Medialab).

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