lundi 24 juin 2019

Observation du premier contact entre deux amas de galaxies en voie de fusion


Que se passe-t-il lorsque deux amas de galaxies entrent en contact pour fusionner ? Une énorme onde de choc, nous dit une équipe d'astrophysiciens japonais et européens qui publient leur découverte aujourd'hui dans Nature Astronomy...




Les chercheurs ont observé le couple d'amas de galaxies nommés 1E2216 et 1E2215 dans plusieurs domaines électromagnétiques : en ondes radio avec GMRT, dans le visible avec SDSS et surtout en rayons X avec les télescopes spatiaux XMM-Newton et Chandra.
Liyi Gu (Laboratoire d'astrophysique des hautes énergies de RIKEN au Japon) et ses collaborateurs internationaux ont capturé pour la première fois le moment unique ou deux amas de galaxies entrent en contact avant de fusionner. Ce couple d'amas de galaxies est situé à plus d'un milliard d'années-lumière et sont en train de se rapprocher l'un de l'autre à cause de la gravité depuis plusieurs milliards d'années d'après les chercheurs. 
Ce type de collision entre amas de galaxies est l'un des événements les plus énergétiques qui existent, les chocs qui sont produits dans le milieu intergalactique produisent une énorme quantité de chaleur, de rayonnement et de rayons cosmiques de haute énergie. On estime que ces collisions sont les accélérateurs de particules les plus efficaces et puissants que l'on connaisse. 
La phase de contact, de "pré-fusion" comme l'appellent les astrophysiciens doit durer environ une centaine de millions d'années, alors que la fusion proprement dite, elle, durera plusieurs milliards d'années. Les amas de galaxies se forment graduellement. Les galaxies se regroupent tout d'abord entre elles à quelques unités, qui grossissent en formant petit à petit des groupes puis un amas, puis plusieurs amas se rejoignent pour former des entités toujours plus grandes.  

Liyi et ses collègues ont bénéficié de 40 heures d'observations avec XMM-Newton en 2017 et à nouveau 40h mais cette fois-ci sur Chandra. Les rayons X sont en effet le rayonnement de choix pour observer des amas de galaxies en train de se rencontrer. Grâce aux mesures en rayons X, ils ont distingué deux halos de gaz très chaud à plus de 50 millions de degrés, chacun associé à un amas, mais ces halos apparaissent connectés par un pont de gaz encore plus chaud (100 millions de degrés). Ce que révèlent les astrophysiciens, c'est que ce pont de gaz est échauffé par des ondes de choc : des deux côtés, un front se propage de l'intérieur vers l'extérieur le long du plan équatorial du couple en voie de fusion. 
Cette onde de choc équatoriale est expliquée par les chercheurs par une très forte compression le long de l'axe de la collision. Ils peuvent en effet déterminer à partir de leurs riches données à la fois la vitesse des ondes de choc mais aussi l'énergie dynamique totale qui est mise en jeu dans le système.

Précédemment, les astronomes n'avaient toujours vu que des couples d'amas de galaxies en cours de rapprochement ou bien fraîchement fusionnés. C'est ici la première fois qu'une telle fusion est observée au moment de son premier contact. La difficulté d'observation vient des très grands délais temporels qui sont en jeu. La durée du premier contact est très courte dans la vie de deux amas de galaxies.Il faut être là au bon moment.

Comprendre complètement les processus physiques qui apparaissent lors des fusions d'amas de galaxies va encore prendre pas mal de temps aux astrophysiciens. On en est simplement aujourd'hui à prendre des instantanés de collisions à plusieurs étapes, et ce n'est qu'un début qui sera complété par les futures missions qui prendront la relève des vénérables XMM-Newton et Chandra.


Source

Observations of a Pre-Merger Shock in Colliding Clusters of Galaxies
Liyi Gu et al.
Nature Astronomy (24 june 2019)


Illustration

IE2216 et IE2215 au premier contact avant de fusionner  : rayons X en bleu, ondes radio en rouge et visble (autres) (NASA/CXC (X-rays); SDSS (optical); GMRT (radio); Liyi Gu et al. )

2 commentaires :

Anonyme a dit…

on aura remarqué la contradiction avec une précédente news où il est dit que la viscosité du gaz du gaz des amas est très faible, et donc peu propice aux ondes de choc

Dr Eric Simon a dit…

Dans l'article précédent, il est certes dit que la viscosité du plasma est très faible dans l'amas de Coma, mais il n'est pas induit ou conclut que cela doit être peu propice aux ondes de choc!