mercredi 18 octobre 2023

Découverte d'oscillations périodiques dans la courbe de lumière d'une supernova


La supernova dénommée SN 2022jli est une supernova remarquable. Des astrophysiciens ont découvert qu’il existait une pulsation périodique dans sa courbe de lumière déclinante, visible dans de nombreuses longueurs d’ondes. Une telle pulsation avec une période de 12,5 jours dans la lumière d’une supernova est une première. Les chercheurs publient leur découverte dans The Astrophysical Journal Letters.

Thomas Moore (université de Belfast) et ses collaborateurs ont effectué à la fois une photométrie et une spectroscopie de SN 2022jli entre 50 jours avant son pic de luminosité et 200 jours après. Cette supernova qui a été découverte le 5 mai 2022 est de type Ic, une supernova à effondrement de cœur qui ne montre ni hydrogène ni hélium dans son spectre, c’est-à-dire l’explosion d’une étoile massive qui a été dépouillée de la grande majorité de son enveloppe. Elle se trouvait dans la galaxie NGC 157 à une distance de 23 Mpc.  
C’est la photométrie à haute cadence qui a révélé des ondulations périodiques de 12,5 ± 0,2 jours superposées au déclin de 200 jours de la supernova. Cette étonnante périodicité est observée par Moore et ses collaborateurs dans les courbes de lumière de neuf configurations distinctes de filtres et d'instruments, avec des amplitudes de crête à crête d’environ 0,1 mag, ce qui correspond à 1% de la luminosité maximale qu’elle a atteinte. C'est la première fois que des oscillations périodiques répétées sur plusieurs cycles, sont détectées dans la courbe de lumière d'une supernova. Et SN 2022jli présente également un excès précoce extrême qui s'estompe en 25 jours, suivi d'une augmentation jusqu'à un pic de luminosité de Lopt = 1042,1 erg s-1. Malheureusement, l'époque exacte de l'explosion n’est pas contrainte par les données, on ne peut pas dire quand elle a eu lieu exactement, mais on sait que le temps écoulé entre l'explosion et le maximum de luminosité est supérieur à 59 jours. Moore et ses collaborateurs expliquent la forte luminosité par une grande masse d'éjecta (12 ± 6 M) principalement du 56Ni. Mais les chercheurs peinent à modéliser quantitativement l'excès précoce qui est observé avec l'interaction circumstellaire et le refroidissement associés à toute cette matière éjectée. Une solution possible pour ce surcroît de luminosité serait la collision entre les éjectas de la supernova et une compagne binaire.
Quant à l’oscillation périodique de la luminosité dans le temps, celle-ci n’est quasi pas visible à l’œil quand on trace la courbe de lumière. Pour rechercher et quantifier toute périodicité, les chercheurs ont d'abord supprimé la signature de déclin de la courbe de lumière, puis ils ont produit une courbe de lumière résiduelle dans chaque bande spectrale. Pour cela, ils ont ajusté la courbe par un polynôme d'ordre 4 (l'ordre le plus bas qui supprime le déclin des supernovas) puis soustrait la courbe observée du modèle polynômial. Les courbes de lumière résiduelles montrent des oscillations cohérentes dans le temps pour toutes les bandes spectrales. La périodicité de chacune des courbes de lumière résiduelle a ensuite été quantifiée en calculant un périodogramme à l'aide d'une méthode de Lomb-Scargle généralisée, ce qui mène à la période de 12,5 ± 0,2 jours.


Moore et ses collaborateurs évoquent deux scénarios différents pour l’expliquer. Le premier est fondé sur la présence potentielle de coquilles de matière concentriques entourant l’étoile progénitrice de la supernova. Des coquilles de poussière imbriquées, causées par des vents en collision dans un système binaire massif, ont récemment été révélées de façon spectaculaire par une image du télescope Webb (Lau et al. 2022). Les 17 coquilles observées autour de l’étoile WR 140 sont dues à des épisodes répétés de formation de poussière tous les 7,93 ans, modulés par le passage au périastre d’une étoile compagne. Dans ce système, les coquilles de poussière sont séparées de 4380 ± 120 UA. Pour Moore et ses collaborateurs, il pourrait exister le même type de structure concentrique autour du lieu de l’explosion de SN 2022jli, et les oscillations qui sont vues refléteraient le passage des éjectas de la supernova à travers chaque couche de poussière. Sachant que la vitesse des éjectas de la supernova est de 7000 km s-1 , cela signifie que le front de choc parcourt une distance Δr = 54 UA en 12,5 jours. Si les ondulations de SN 2022jli étaient dues à des pics de densité du milieu circumbinaire similaires aux coquilles de WR 140, une étoile binaire devrait produire préalablement ces coquilles à des échelles de temps 100 fois plus fréquentes que dans le cas de WR 140 , ce qui veut dire avec une périodicité de 0,2 ans.
Mais dans ce scénario de coquilles ou d'anneaux concentriques, on pourrait s'attendre à ce que les effets du temps de parcours de la lumière élargissent l'échelle de temps de l'ondulation au fur et à mesure de l'expansion du choc. Comme les éjectas de la supernova frappent simultanément l'arrière et l'avant des coquilles, le temps de propagation de la lumière de l'arrière vers l'avant doit augmenter d’environ 9 jours (après 200 jours d'expansion). Bien qu'on mesure un signal intégré provenant de toutes les parties de l'enveloppe, l'effet devrait être d'élargir l'échelle de temps des ondulations. Mais, aucun élargissement temporel n’a été observé dans les oscillations de la courbe de lumière de SN 2022jli…

Le second scénario proposé par Moore et ses collaborateurs est plus amusant, il est fondé sur une étude de Hirai & Podsiadlowski en 2022 dans laquelle il est suggéré un mécanisme pour produire des bosses dans les courbes de lumière des supernovas de type Ib et Ic. Ce mécanisme est le suivant : Suite à l’explosion de la supernova qui aurait eu lieu dans un système binaire avec une étoile compagne, l'étoile à neutrons nouvellement née peut recevoir une forte impulsion qui pourrait par hasard être dirigée dans la direction de sa compagne. Selon les chercheurs, l'étoile à neutrons pourrait alors pénétrer ou frôler la surface de l’étoile compagne. Ce faisant, l’étoile à neutrons capture de la matière de sa compagne d’infortune. L'accrétion pourrait dans ce cas donner lieu à des écoulements ou à des jets qui ajoutent de l'énergie aux éjectas de la supernova et entraînent une luminosité supplémentaire. Hirai & Podsiadlowski calculent que même si seulement ∼0,01 M⊙ est capturée par l’étoile à neutrons et si seulement ∼1% de celle-ci est finalement accrétée, alors l'énergie disponible serait de l'ordre de 1050 erg, ce qui est confortablement suffisant pour alimenter quelques pourcents du flux total intégré de la supernova.
Mais comme l'étoile compagne doit être gonflée par le chauffage dû à l'interaction avec les éjectas de la supernova, on n’a pas forcément besoin que l’étoile à neutrons fonce directement sur l’étoile compagne. Elle peut être légèrement décalée, restant liée gravitationnellement à elle sur une orbite excentrique, et interagir avec l’enveloppe de l’étoile à chacun de ses passages rapprochés, une accrétion périodique qui aurait lieu par exemple tous les 12,5 jours…
Dans le scénario de Hirai & Podsiadlowski de 2022 que Moore et al. reprennent pour expliquer la courbe de lumière atypique de SN 2022jli, le destin d’un tel couple est scellé : l’étoile à neutrons va inéluctablement finir par spiraler vers le centre de l’étoile compagne et devenir ce qu’on appelle un objet de Thorne-Żytkow (TŻO), du nom des théoriciens qui ont prédit leur existence en 1975 et 1977. Depuis près de 50 ans, très peu de candidats TŻO réels ont été observés, pour ne pas dire aucun.
Dans le scénario initial de Hirai & Podsiadlowski, l’étoile à neutrons interagit directement avec l’étoile compagne qui n’est pas très gonflée, ce qui implique qu’il ne suffirait que de 5 orbites pour qu’elle se retrouve être un TŻO et que les oscillations s’arrêtent. Mais Moore et ses collaborateurs observent 15 cycles orbitaux successifs. Ils indiquent qu’avec une enveloppe gonflée de faible densité, la décroissance orbitale de l’étoile à neutrons est plus lente, comme l'avaient montré Hirai et al. en 2018 et Ogata et al. en 2021. Le cas d'une compagne gonflée serait donc tout à fait compatible avec ce qui est observé.

Etrangement, dans la conclusion de leur article, Thomas Moore et son équipe disent que le scénario qui a leur préférence est celui des coquilles de poussière qui sont chauffées les unes après les autres par le passage de l’éjecta de la supernova. C’est sans doute dû au fait qu’il n’existe encore aucun exemple connu du processus de Hirai & Podsiadlowski, l'idée est pourtant séduisante et tient la route...

 
Source

SN 2022jli: A Type Ic Supernova with Periodic Modulation of Its Light Curve and an Unusually Long Rise
T. Moore et al.
The Astrophysical Journal Letters, Volume 956, Number 1 (13 october 2023)
https://doi.org/10.3847/2041-8213/acfc25

Illustrations
1. Localisation de SN 2022jli dans la galaxie NGC 157 (Transient Name Server) 
2. Courbes de lumière de SN 2022jli dans plusieurs bandes spectrales et signal résiduel après soustraction de la décroissance (Moore et al.)
3. Thomas Moore

2 commentaires :

Dr Eric Simon a dit…

Bonjour,

Vous partez d'un a priori qui dit "Aberkane qui est tout sauf un con". C'est justement là que vous faites une erreur. Aberkane n'est rien d'autre qu'un usurpateur, de même que Petit. Je ne suis même pas étonné de les voir côte à côte. Lisez cet article sur Aberkane :https://etudiant.lefigaro.fr/article/idriss-aberkane-plagie-sa-these-polytechnique-veut-lui-retirer-son-doctorat_dce16b6e-47da-11ee-a6a9-64c9036b4094/
C'est bel est bien un con.
Quant à Petit, si vous ne comprenez pas ce qu'il dit, c'est à dessein. Il brouille volontairement son discours pour l'enrober de termes de physique mais il a été réfuter depuis très longtemps déjà. Si vous voulez savoir où se trouvent les erreurs (il y en a plusieurs...), je vous renvoie vers cette analyse qui a été faite en 2006 par un astrophysicien de l'Institut d'Astrophysique de Paris.
Pour finir, lorsque vous dites que vous avez marre de la matière noire et de l'énergie noire, et bien rassurez-vous la très grande majorité des physiciens et astrophysiciens ne se satisfont pas non plus de ce concept qui permet de faire coller aujourd'hui la théorie avec les observations, c'est pour cela que la recherche actuelle cherche ardemment à savoir ce que c'est exactement. En avoir marre d'un concept qui fait le consensus scientifique aujourd'hui ne mène nulle part. Je pourrais dire que j'en ai marre des trous noirs dont on ne sait rien de l'intérieur et pourtant ils existent (Petit nie leur existence, au passage...).
Si vous cherchez un référent en astrophysique, vous êtes sans doute au bon endroit, il est clair en tous cas que ce n'est pas vers Petit ou Aberkane que vous devez vous tourner. Les , deux font de la pseudo-science, pas de la science. Seule la science pourra venir à bout un jour de la matière noire et de l'énergie noire, ou pas.

Dr Eric Simon a dit…

J'ai oublié le lien vers l'analyse de janus de 2006, elle est ici : https://www2.iap.fr/users/riazuelo/cosmo/jpp/p2.html