Alors que je m'apprêtais à vous relater un article paru le 27 novembre au sujet de la source radio persistante qui est observée à proximité immédiate du célèbre FRB répétitif FRB 20121102A, aujourd'hui sort un autre article qui fournit la caractérisation de la seule autre source radio persistante coïncidant avec la position d'un FRB répétitif : FRB 20190520B. On va donc parler des deux études qui sont assez similaires, sur des FRB très ressemblants, et menant à une conclusion convergente...
Le premier article, paru dans The Astrophysical Journal, est consacré au premier FRB qui avait été détecté se répétant, en 2016 (par Scholz et al.) : FRB 20121102A. FRB 20121102A est jusqu'à présent l'une des sources de FRB les plus étudiées. En 2017, la source a été localisée précisément dans une région de formation d'étoiles d'une galaxie naine à faible métallicité, qui a un redshift de 0,19273, donnant une distance de 971 Mpc. Depuis 2021, on sait que ses sursauts ont une périodicité d'environ 160 jours (Cruces et al.). L'émission radio persistante associée spatialement avec FRB 20121102A avait quant à elle était découverte dès 2017 par Tendulkar et al.. Depuis lors, son origine est toujours inconnue. Le barycentre de l'émission radio persistante se situe à moins de 12 ms d'arc de la source du FRB (soit 40 pc), niveau de confiance de 95 %. Son spectre est plat de 400 MHz à 6 GHZ et diminue à des fréquences plus élevées. Elle reste en tous cas non résolue par interférométrie à très longue base à 5 GHz, ce qui indique un rayon de la source inférieur à 0,2 ms d'arc (soit 0,35 pc à la distance de la galaxie hôte) (Tendulkar et al. 2017). Et aucune contrepartie en rayons X n'a été détectée avec XMM-Newton et Chandra (Chatterjee et al. 2017).
Ge Chen (Caltech) et ses collaborateurs ont cherché à en savoir plus sur cette source radio persistante coïncidant spatialement avec la source des sursauts rapides. Ils ont pour cela utilisé le Very Large Array cher à Jodie Foster. En mesurant la variabilité de densité de flux entre 12 et 26 GHz, les chercheurs déterminent une limite sur la taille physique de la source. Une telle variabilité nécessiterait que le rayon de la source soit inférieure à 0,1 année-lumière d'après les chercheurs. Comme la variabilité radio est inférieure aux prédictions de la théorie des scintillations pour une source aussi petite, cela laisse ouverte la possibilité que le source, nommée QRS 121102 ne soit pas un noyau galactique actif (AGN). Or une telle source radio est le plus souvent associée à la présence d'un trou noir massif qu'on trouve au coeur d'un noyau galactique actif. Chen et ses collaborateurs ont donc estimé approximativement quelle serait la masse de tout trou noir supermassif potentiel qui serait associé avec QRS 121102. Ils font cette estimation indirecte à partir de la largeur de la raie d'émission Hα de la galaxie hôte en utilisant le télescope Keck. La largeur de la raie Hα indique une masse maximale de 100 000 M⊙ pour un éventuel trou noir. Et cette masse est trop faible pour satisfaire les contraintes de luminosité radio et de luminosité X qui seraient observées sur un AGN.
Chen et son équipe cherchent ensuite une explication du côté des noyaux de galaxies dépouillés. En effet, certaines galaxies naines (le type de galaxie qui accueille FRB 20121102A), qui hébergent des trous noirs supermassifs, pourraient être en fait les noyaux dépouillés de galaxies massives après avoir subi des interactions de marée avec des galaxies compagnes. Mais les chercheurs ne trouvent aucune galaxie proche au même redshift que l'hôte de FRB 20121102A...Au vu de ces différents indices, Chen et ses collaborateurs concluent qu'il n'existe aucune preuve que la source persistante liée à FRB 20121102A soit un noyau actif de galaxie. Ils soutiennent au contraire, que, du fait de la taille réduite de la source et de ses caractéristiques spectrales, son origine serait un plérion, c'est à dire un astre compact, genre étoile à neutrons un peu extrême. Mais Chen et ses collaborateurs précisent que QRS 121102 est trop lumineuse dans la bande radio pour être le fruit d'un résidu de supernova classique, et trop ancien pour être une rémanence typique de GRB. Les modèles isolés de jeunes étoiles à neutrons pourraient en revanche être en mesure selon eux de prendre en compte à la fois la taille et la luminosité de la source persistante s'il s'agit d'une émission synchrotron produite dans une nébuleuse de vent de pulsar. Et ça tombe plutôt bien parce qu'on pense de plus en plus que la source des FRB sont des étoiles à neutrons très fortement magnétisées, de type jeune magnétar de moins de 1000 ans.
Il ne reste maintenant plus qu'à trouver un troisième FRB associé à une source radio persistante, de manière à encore mieux comprendre ce qui se passe avec ces objets qui donnent tant de travail aux observateurs et aux modélisateurs.
Sources
A Comprehensive Observational Study of the FRB 121102 Persistent Radio Source
Ge Chen et.
The Astrophysical Journal, Volume 958 (27 november 2023)
https://doi.org/10.3847/1538-4357/ad02f3
Constraints on the Persistent Radio Source Associated with FRB 20190520B Using the European VLBI Network
Shivani Bhandari et al.
The Astrophysical Journal Letters, Volume 958 (30 november 2023)
https://doi.org/10.3847/2041-8213/ad083f
Illustrations
1. La source persistante de FRB 20121102A vue par le VLA (Ge Chen et.)
2. Portion du VLA (NRAO)
3. Ge Chen
4. La source persistante de FRB 20190520B vue par le réseau EVN (Bhandari )
5. Répartition des rédiotélescopes de l'EVN (European VLBI Network)
6. Shivani Bhandari en bonne compagnie (Jocelyn Bell)
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