jeudi 14 mars 2024

Europe produit moins d'oxygène moléculaire que prévu


Europe, la lune de Jupiter, a une surface principalement constituée de glace d'eau qui est modifiée par l'exposition à son environnement spatial. Les particules chargées brisent les liaisons moléculaires dans la glace de surface, dissociant ainsi l'eau pour produire finalement de l'hydrogène et de l'oxygène, qui fournit un mécanisme d'oxygénation potentiel pour l'océan souterrain d'Europe. Une équipe de chercheur vient de réévaluer la production d'oxygène à la surface d'Europe à partir de mesures directes. Ils publient leur étude dans Nature Astronomy.

lundi 11 mars 2024

Parker Solar Probe et BepiColombo plongées dans une éjection de masse coronale...


Les 15 et 16 février 2022, plusieurs sondes spatiales ont mesuré l'un des événements de particules énergétiques solaires (SEP) les plus intenses observés jusqu'à présent au cours du cycle solaire 25. D
es observations très intéressantes de Parker Solar Probe (PSP) et BepiColombo ont notamment été effectuées avec une configuration où les deux sondes étaient très proches l'une de l'autre à 0,34 et 0,37 UA du Soleil. Leng Ying Khoo (Princeton university) et ses collaborateurs fournissent une analyse non seulement des flux de particules reçus par PSP et BepiColumbo, mais aussi par de nombreux signaux d'autres sondes. Ils publient dans The Astrophysical Journal

dimanche 10 mars 2024

Les amas ouverts des Pléiades, des Hyades et alpha Persei tournent aussi



En utilisant les paramètres astrométriques d'une grande précision et les vitesses radiales fournies par les données du télescope spatial Gaia, des astronomes chinois avaient déjà réussi à déterminer les paramètres 3D de rotation du célèbre amas ouvert Praesepe (alias M44 ou l'amas de la Ruche) en 2022. Ils remettent le couvert aujourd'hui en s'attaquant à trois autres fameux amas d'étoiles ouverts chers aux astronomes amateurs : les Pléiades (M45), les Hyades, et alpha Persei. Tous ces amas ouverts tournent gentiment. Ils publient leur étude dans The Astrophysical Journal


vendredi 8 mars 2024

Des cristaux flottants stoppent le refroidissement des naines blanches



Les étoiles naines blanches ne sont pas vouées à se refroidir inéluctablement pendant des milliards d'années. C'est ce qu'une équipe d'astrophysiciens vient de montrer, suite à des observations de naines blanches qui semblaient ne pas se refroidir.  Ils publient leur étude dans Nature

mardi 5 mars 2024

Le Grand Nuage de Magellan pesé grâce à ses amas globulaires


Une équipe d'astrophysiciens a pu estimer la masse du Grand Nuage de Magellan (LMC) en utilisant la cinématique de 30 amas globulaires de la galaxie naine. Ils ont effectué cette mesure en combinant les mouvements propres mesurés avec le télescope Hubble et le télescope Gaia. Ils publient leur étude dans The Astrophysical Journal.

vendredi 1 mars 2024

La matière fondue des impacts sur Titan peut atteindre son océan souterrain


Titan est un monde océanique sous une croûte de glace et à l'atmosphère dense, où la photochimie produit des molécules organiques complexes qui tombent à la surface. Une question importante est de savoir si ce matériau peut se mélanger à l'eau et former des molécules d'intérêt biologique. Une équipe de chercheurs a étudié l'effet des gros impacts qui chauffent la subsurface de Titan et créent des bassins d'eau liquide. Ils publient leur étude dans Journal of Geophysical Research Planets

mercredi 28 février 2024

Un trou noir de 17 milliards de masses solaires qui absorbe 1 Soleil par jour


Environ un million de quasars ont été catalogués dans l’Univers à ce jour. Les plus brillants sont aussi les plus rares et les plus difficiles à trouver. Les propriétés du plus lumineux d'entre eux, 
 J0529−4351, viennent d'être étudiées. Dans leur étude publiée dans Nature Astronomy, des astrophysiciens démontrent que le trou noir qui en est à l'origine fait 17 milliards de masses solaires et absorbe une masse solaire par jour...  

lundi 26 février 2024

K2-18b : le méthane peut être expliqué sans vie microbienne


En septembre dernier, je vous relatais un étude qui s'intéressait à l'exoplanète K2-18b qui posséderait des caractéristiques très intéressantes, à la fois aqueuses et hydrogénées avec la détection d'une trace de sulfure de diméthyle, une molécule produite par le vivant sur Terre. Des simulations de la chimie complexe dans l'environnement de K2-18b viennent d'être effectuées et les conclusions sont moins optimistes... L'étude est parue dans The Astrophysical Review Letters

K2-18b est une exoplanète de type sous-Neptune située dans la zone tempérée de son étoile. Les sous-Neptunes (∼2,4 R⊕ ) ont des taux d'occurrence élevés. Ces planètes ont des densités apparentes qui peuvent être expliquées par plusieurs modèles planétaires allant d'une atmosphère massive de dihydrogène similaire à celle de Neptune à une fine atmosphère d'hydrogène (par exemple, ∼1 bar) recouvrant un intérieur riche en H2O. Des astrophysiciens ont suggéré que les sous-Neptunes riches en H2O pourraient avoir des océans de surface habitables à condition que le climat soit adapté à l'eau liquide. Ces mondes dits « hycéens », s’ils existent, ont le potentiel de figurer parmi les environnements planétaires habitables les plus courants.

K2-18b est la candidate de ce type sans doute la plus connue maintenant. Elle a une masse de 8,63 M⊕ pour un rayon de 2,61 R⊕.  Le spectre de transmission de son atmosphère a révélé des preuves solides de la présence de CH4 et de CO2 dans une atmosphère riche en H2. De plus, Webb n'a pas détecté de NH3, H2O ou CO dans la haute atmosphère de la planète. L'ammoniac (NH3) est plutôt attendu sur une mini-Neptune avec une atmosphère massive d'hydrogène (Hu et al. 2021 ; Yu et al. 2021 ). En septembre dernier, Nikku Madhusudhan et al. montraient à partir de leurs spectres obtenus avec Webb que les données s'expliquaient mieux par un monde de type « hycéen », constitué d'une atmosphère  relativement mince d'hydrogène surplombant un océan d'eau liquide. 

Nicholas Wogan (université de Washington) et ses collaborateurs se sont repenchés sur le cas de K2-18b en utilisant des modèles photochimiques et climatiques pour simuler K2-18b d'une part comme une planète hycéenne inhabitée, d'autre part comme une planète hycéenne habitée d'espèces microbiennes, et enfin comme une mini-Neptune riche en gaz sans surface définie (donc inhabitable). 


Les chercheurs constatent qu'un monde hycéen sans vie serait difficile à concilier avec les observations du JWST, car la photochimie indique qu'il ne pourrait y avoir que moins de 1 partie par million de CH4 dans l'atmosphère de K2-18b, alors que les données indiquent qu'il y en a 1 % dans cette atmosphère, 10000 fois plus! Selon Wogan et ses collaborateurs, le maintien d'une teneur en méthane de l'ordre du pourcent peut nécessiter la présence d'une biosphère produisant du méthane qui serait similaire à la vie microbienne sur Terre il y a environ 3 milliards d'années. Wogan et ses collaborateurs montrent que si K2-18b est un monde hycéen habité par une vie microbienne, alors le CH4 et le CO pourraient être des gaz biologiquement modulés comme ils l'étaient sur la Terre archéenne anoxique. Les méthanogènes chimiosynthétiques peuvent consommer du H2 et du CO2 pour produire de l'énergie, produisant du méthane comme gaz résiduel.

Le CO est également un aliment pour les microbes acétogènes qui produisent du méthanol. Ce CH3 COOH produit aurait pu servir de nourriture aux méthanotrophes acétotrophes (CH3COOH → CH4 + CO2). Le modèle 2 des chercheurs simule K2-18b comme un monde hycéen avec des conditions aux limites représentant l'influence biologique de ces premiers métabolismes archéens. Pour modéliser la vie méthanogène, ils imposent un flux de CH4 en surface nécessaire pour reproduire le pourcentage de concentration observé dans les données JWST, qui atteint la moitié du flux de méthane biologique de la Terre moderne (5 × 1010 molécules cm-2 s-1) . Ils ajoutent également une vitesse de dépôt de CO de 1,2 × 10-4 cm s-1 pour se rapprocher de l'influence des acétogènes consommateurs de CO. À l'état d'équilibre photochimique, ce modèle 2 produit une teneur de 2 % de CH4 dans l'atmosphère, une valeur compatible avec les données de Webb.

Mais, d'un autre côté, ils démontrent qu'une mini-Neptune riche en gaz avec une métallicité égale à 100 fois la métallicité solaire un un ration C/O ayant la valeur solaire devrait contenir 4 % de méthane et près de 0,1% de CO2 , et ces chiffres sont eux aussi compatibles avec les données de Webb! Les chercheurs montrent en effet que le CH4 et le CO2 peuvent être produits thermochimiquement dans l'atmosphère profonde d'une telle planète puis mélangés vers le haut de l'atmosphère jusqu'aux basses pressions, la zone qui est sensible à la spectroscopie de transmission. De plus, le modèle de Wogan et al. prédit des abondances de H2O, NH3 et CO qui sont aussi globalement cohérentes avec les non-détections de Webb.

Pour choisir entre la solution d'une planète comportant une biosphère qui produit de grandes quantités de méthane et une mini-Neptune gazeuse, Wogan et ses collaborateurs rappellent qu'il existe des obstacles supplémentaires au maintien d'un climat tempéré stable sur les mondes hycéens, comme par exemple la fuite d'hydrogène de l'atmosphère ou la supercriticité potentielle en profondeur.  A partir de là, les planétologues favorisent l'interprétation de la mini-Neptune, surtout en raison de sa relative simplicité et du fait qu'elle a besoin de moins d'hypothèses. Mais le scénario 2 impliquant une biosphère ne peut pas être "fortement exclu".


En résumé, pour Nicholas Wogan et ses collaborateurs, la solution hycéenne habitée par une vie microbienne possède plusieurs difficultés : 

1.  Pour expliquer les 1% de CH4 détectés par JWST, une planète hycéenne a besoin de CH4 biogénique ou d'une autre source inconnue de gaz pour la maintenir contre la destruction photochimique.

2.  Les modèles prédisent qu'un climat tempéré stable est un défi sur une planète hycéenne. Une telle planète devrait connaître un effet de serre de vapeur incontrôlable, à moins que la lumière de son étoile ne puisse être réfléchie par des nuages, ce qui est toutefois possible.

3.  Une atmosphère mince d'environ 1 bar de H2 peut être sensible aux fuites provoquées par le rayonnement intense. Et le H2 ne peut pas être reconstitué par le volcanisme, car la pression exercée par l'épaisse couche de glace et d'océan sur un monde hycéen empêcherait la fonte des silicates.

En revanche, la solution mini-Neptune a plusieurs avantages :

1.  Le CH4 et le CO2 détectés par Webb peuvent être largement expliqués par un processus thermochimique en atmosphère profonde pour une métallicité 100 fois solaire , un C/O solaire et une température intrinsèque de 60 K.

2.  La cinétique de l'atmosphère profonde prédit également des abondances de NH3 et de CO qui sont compatibles avec les non-détections de ces deux gaz par Webb.

3.  L'absence de caractéristiques H2O dans les spectres peut être expliquée par une condensation de la vapeur d'eau et le piégeage froid.

4.  La modélisation 1D de base de l'équilibre radiatif-convectif peut expliquer le climat de la planète.

Les chercheurs rappellent qu'un monde hycéen habité pourrait évidemment être identifié grâce à la détection d'un gaz uniquement biogénique. Madhusudhan et coll. avaient trouvé en septembre dernier  de faibles preuves de sulfure de diméthyle (DMS) dans le spectre de transmission de K2-18b, un gaz qui est presque exclusivement produit par la vie sur Terre (presque...). Si le DMS est finalement détecté de manière statistiquement significative, il pourrait être difficile d'expliquer sa présence sans biosphère sur une planète hycéenne. Webb va retourner au turbin...


Source

JWST Observations of K2-18b Can Be Explained by a Gas-rich Mini-Neptune with No Habitable Surface

Nicholas F. Wogan et al.

The Astrophysical Journal Letters, Volume 963, Number 1 (20 february 2024)

https://doi.org/10.3847/2041-8213/ad2616


Illustration

1. Vue d'artiste de K2-18 b (NASA, CSA, ESA, J. Olmsted (STScI), Science: N. Madhusudhan (Cambridge University))

2. Teneur des différentes espèces chimiques en fonction de la pression pour les modèles de planète hycéenne sans vie microbienne à gauche et avec vie microbienne à droite (Nicholas F. Wogan et al.)

3. Teneur des différentes espèces chimiques en fonction de la pression pour le modèle de planète sous-Neptune gazeuse (sans vie microbienne) (Nicholas F. Wogan et al.)

4. Nicholas F. Wogan

vendredi 23 février 2024

Webb dévoile une étoile à neutrons dans le résidu de la supernova SN 1987A


Un mystère vieux de plusieurs décennies concernant l'une des explosions d'étoiles les plus célèbres de l'histoire vient d'être résolu par le télescope spatial James Webb (JWST). Nous parlons de la supernova historique SN1987A et de la nature de l'astre compact qui en est le résidu. Une équipe montre la preuve que c'est une étoile à neutrons et non un trou noir, ils publient leur travail dans Science.

mercredi 21 février 2024

Un champ magnétique de type dynamo produit lors des fusions d'étoiles à neutrons


Les fusions d’étoiles à neutrons sont complexes à comprendre. Une petite pièce du puzzle vient peut-être d'être résolue par une équipe d'astrophysiciens grâce à une simulation super chiadée qui permet d'expliquer comment des courts sursauts gamma peuvent être lancés par un magnétar grâce au champ magnétique de type dynamo qui est produit au moment de la collision/fusion. L'étude est publiée dans Nature Astronomy.

Les observations à multi-messagers de la fusion d'étoiles à neutrons GW170817 et en particulier les détections de rayons gamma par les télescopes spatiaux Fermi et Integral ont confirmé que les étoiles à neutrons en collision sont une source de sursauts gamma (GRB) de courte durée. Même si les observations de GW170817 ont commencé à révolutionner notre compréhension de l’émission des étoiles à neutrons en fusion, de nombreuses questions restent ouvertes. L’une de ces questions concerne la nature du moteur qui entraîne le GRB, notamment s’il s’agit d’une étoile à neutrons hautement magnétisée (un magnétar) ou d’un trou noir formé après la fusion.
Un élément clé dans l'évaluation de l'hypothèse magnétar est la manière dont les champs magnétiques extrêmes nécessaires pour expliquer les émissions peuvent être créés. Kenta Kiuchi (Institut Max Planck de physique gravitationnelle (Institut Albert Einstein) à Potsdam) et ses collaborateurs ont produit une simulation à ultra haute résolution qui démontre comment ces champs extrêmes peuvent être créés à la suite de la collision chaotique et turbulente de deux étoiles à neutrons. En résolvant les mouvements turbulents à petite échelle dans leurs simulations, ils montrent que de petites zones de champ extrêmement puissant s'organisent en une structure plus grande qui est capable de lancer un écoulement à partir du reste du magnétar et qui serait énergétiquement compatible avec l'émission typique du GRB.
Les magnétars ont généralement des intensités de champ magnétique de l'ordre de 1015 G. Bien que les magnétars puissent être fabriqués dans différents environnements astrophysiques, un canal de formation possible passe par la collision de deux étoiles à neutrons. La turbulence qui se développe lors de la collision et dans l'objet résiduel a été suggérée comme mécanisme permettant d'amplifier le champ magnétique. Lorsque les deux étoiles à neutrons plongent l’une dans l’autre, la majorité de leur moment cinétique orbital est absorbée par la rotation du résidu. Kiuchi et ses collaborateurs montrent que cela conduit à de forts écoulements de cisaillement. Et le long de ces couches de cisaillement, l'instabilité de Kelvin – Helmholtz (IKH) peut créer de petits vortex de champ magnétique puissant (similaire à la façon dont les vagues sont créées à la surface d'un lac dans des conditions venteuses). À mesure que l'objet compact résiduel se stabilise, l’instabilité magnéto-rotationnelle (IRM) peut encore amplifier le champ magnétique et entraîner des mouvements turbulents. La simulation de l'évolution turbulente de la fusion et du résidu est un défi car elle implique les quatre forces fondamentales : la gravité sous relativité générale pour modéliser la collision relativiste, les forces nucléaires fortes et faibles pour modéliser la matière extrêmement chaude et dense du magnétar et leurs processus de refroidissement. via les neutrinos et la force électromagnétique pour gérer les plasmas hautement magnétisés qui se forment dans les restes de la collision.
Et ces simulations sont extrêmement exigeantes en termes de calcul et gourmandes en ressources, car il existe un contraste important entre les mouvements turbulents à petite échelle qui doivent être résolus et la taille et les échelles de temps totales du système. Bien que des simulations de turbulence à haute résolution aient démontré dans le passé que l'IKH et l'IRM peuvent générer de petites zones de champ magnétique de type magnétar, il était moins clair de savoir comment ce champ pouvait être ordonné dans un champ magnétique plus grand pour former les structures à grande échelle nécessaires. Il faut en effet pouvoir expliquer les flux sortants du reste du magnétar et qu'ils soient suffisamment énergétiques pour expliquer les observations du GRB.
Kiuchi et coll. montrent que les processus d'amplification non linéaires (en particulier un effet dynamo) apparaissent. Une interaction entre des mouvements circulaires introduits dans la direction radiale α par convection et dans la direction azimutale Ω par rotation conduit à une boucle de rétroaction positive à la suite des turbulences provoquées par l'IKH et l'IRM. Ils montrent que les petites parcelles de champ de type magnétar peuvent être ordonnées en structures suffisamment grandes pour prendre en charge le lancement des flux du GRB. 
Les astrophysiciens trouvent que le champ magnétique induit un écoulement relativiste dominé par le flux de Poynting avec une luminosité équivalente isotrope d'environ 1052 erg s-1 et une éjection de masse post-fusion d'environ 0,1 M⊙ dirigée magnétiquement. Par conséquent, selon eux, l’hypothèse du magnétar, dans laquelle une étoile à neutrons résiduelle ultra-fortement magnétisée entraîne un jet relativiste lors d'une fusion d’étoiles à neutrons, est possible. Les magnétars peuvent donc être les moteurs de sursauts gamma courts et énergétiques, et ils devraient être associés à des kilonovas très brillantes. 

Kiuchi et coll. démontrent que même si le champ magnétique initial avait une intensité beaucoup plus faible ou une topologie différente de celle qu'ils ont supposée, la force de saturation et le profil de champ dus à l'instabilité de Kelvin-Helmholtz dans le résidu de la fusion seraient similaires à ceux qu'ils ont trouvés. De plus, la manière dont le champ magnétique poloïdal moyen est défini dans la réalité après la fusion reste un problème ouvert. Kiuchi et ses collaborateurs indiquent que si le champ magnétique poloïdal moyen juste après la fusion est une relique du champ poloïdal d'avant la fusion, soit entre 1010 et 1011  G au maximum, cela peut prendre environ 200 ms pour atteindre l'intensité de saturation de 1014 à 1015 G, car ils supposent que le champ poloïdal moyen est amplifié de manière exponentielle avec la période de la dynamo. Par conséquent, le jet pourrait être lancé environ 100 ms après la fusion en réalité. Mais ils rappellent aussi que la structure intérieure du champ magnétique dans les étoiles à neutrons avant la fusion n'est pas bien comprise, et que la reconnexion magnétique du champ poloïdal fluctuant généré par l'instabilité de Kelvin – Helmholtz pourrait améliorer le champ poloïdal moyen après la fusion.

En tous cas, cette preuve de principe qui relie l’amplification turbulente dans le magnétar au lancement des écoulements produisant un GRB est une belle prouesse. Non seulement il a fallu des années de travail pour développer les outils logiciels nécessaires pour permettre ces simulations, mais également un grand soin dans l'analyse détaillée de l'image turbulente complexe du résidu afin d'identifier quel processus de dynamo est à l'origine de la croissance et de l'ordonnancement du champ magnétique.

Kiuchi et ses collaborateurs concèdent que de nombreux processus importants dans la modélisation détaillée des émissions de GRB n'ont pas été pris en compte dans cette simulation (par construction, car même sur les superordinateurs les plus rapides disponibles au monde, une telle simulation ne serait pas réalisable). Cela rend donc difficile la comparaison directe des simulations avec des données d'observation comme celles de GW170817. Néanmoins, ces simulations inédites démontrent le vaste potentiel du domaine de l’astrophysique computationnelle et en particulier le rôle que la simulation numérique peut jouer dans la compréhension des processus astrophysiques qui ne peuvent pas être sondés en laboratoire. 

Les autres pièces du puzzle, devront être assemblées par les modélisateurs pour construire des modèles qui prennent en compte les résultats de ces simulations directes et les données d'observations, à un coût de calcul beaucoup plus réduit. Les efforts qui sont menés actuellement pour y parvenir sont par exemple des modélisations en grille de la physique qui se produit à des échelles plus petites que celles simulées, ainsi que des approches d'apprentissage automatique qui développent des réseaux de neurones qui apprennent sur des données de simulation à haute résolution en incluant la physique pertinente.

Source

A large-scale magnetic field produced by a solar-like dynamo in binary neutron star mergers
Kenta Kiuchi et al.
Nature Astronomy (15 february 2024)

Illustrations

1. Champs magnétiques produits dans un magnétar résiduel d'une fusion d'étoiles à neutrons (Kiuchi et al.)
2. signaux électromagnétiques du magnétar obtenus dans la simulation (Kiuchi et al.)
3. Kenta Kiuchi

lundi 19 février 2024

Deuxième image du trou noir M87*, cuvée 2018


La collaboration Event Horizon Telescope (EHT) a produit une nouvelle image de M87*, enregistrée un an après la première qui avait été révélée en 2019, et à l'aide d'un radiotélescope supplémentaire dans le réseau, situé au Groenland. Dans l'article publié dans Astronomy&Astrophysics, on voit un anneau d'exactement la même dimension qu'en 2019, mais différent en terme de zone brillante...
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vendredi 16 février 2024

Un sursaut radio rapide observé pile entre 2 glitchs d'un magnétar


Le 28 avril 2020, 
un sursaut radio rapide (FRB), de durée milliseconde, a été détecté à partir du magnétar galactique SGR 1935+2154, confirmant l'association longtemps soupçonnée entre certains FRB et les magnétars. Cependant, le mécanisme de génération des FRBs dans les magnétars reste encore peu clair. Mais une équipe d'astrophysiciens vient de faire une observation cruciale sur ce même magnétar lorsqu'il a produit un nouveau FRB le 14 octobre 2022 : une brutale variation de vitesse de rotation de l'étoile à neutrons... Ils publient leur découverte dans Nature.

mercredi 14 février 2024

Une kilonova dans le voisinage du système solaire il y a 4 millions d'années


La détection récente des isotopes 60Fe et 244Pu dans les sédiments océaniques profonds, remontant à 3 ou 4 Mégannées pose un sérieux défi pour l'identification de leur(s) site(s) de production. Alors que le 60Fe est généralement attribué aux supernovas à effondrement du cœur classiques, le plutonium est formé par processus r, une nucléosynthèse qui apparaît dans des classes très ares de supernovas ou des fusions d'étoiles à neutrons. Des chercheurs ont étudié l'énigme de ces isotopes en simulant l'effet qu'aurait eu une kilonova à proximité de la Terre il y a quelques millions d'années, ils publient leur étude dans The Astrophysical Journal Letters.

lundi 12 février 2024

Découverte d'une étoile grande comme seulement 7 fois la Terre


Des astrophysiciens chinois ont récemment découvert un système d’étoiles binaires étonnant, composé d’une naine blanche et d’une petite étoile de type sous-naine chaude. Les deux étoiles se tournent autour l'une de l'autre en seulement 20,5 minutes. Et elles sont sur le point de générer un fort rayonnement d’ondes gravitationnelles d’une fréquence de l'ordre du millihertz, qui devrait être détecté par les futurs observatoires spatiaux d’ondes gravitationnelles. Ils publient leur étude dans Nature Astronomy

vendredi 9 février 2024

Le gap entre super-Terres et sous-Neptunes enfin expliqué


Parmi la population de plus 5000 exoplanètes connues à ce jour, il existe un trou incompris dans la distribution du rayon des planètes, entre les superTerres et les sous-Neptunes  (vers R ∼ 1,7  R ⊕). Une équipe d'astronomes s'est repenchée sur cette question et a trouvé une solution très intéressante... Ils publient leur étude dans Nature Astronomy.