Pour la première fois, des astronomes ont pu observer la présence de l'étoile accompagnant une supernova de type Ia, et qui est à l'origine de l'explosion de la naine blanche.
SN 2012cg dans NGC 4424 (Cassiopea Observatory http://www.weasner.com/co/) |
La théorie décrivant le processus de supernova de type Ia est assez bien définie. Ces supernovas sont les plus intéressantes pour les astrophysiciens car elles leur servent de chandelles standard (leur luminosité intrinsèque est quasi identique et leur luminosité apparente ne dépend donc que de leur distance). La théorie stipule qu'une étoile naine blanche formant un système binaire avec une autre étoile, lui accapare de la matière et ce faisant finit par dépasser la masse critique au delà de laquelle sa pression interne ne peut plus contrecarrer la force de gravitation. Il se produit alors un effondrement gravitationnel et l'explosion de la naine blanche qui ne laisse rien derrière elle, si ce n'est une nébuleuse ensemençant le milieu interstellaire.
La théorie fonctionne très bien et permet d'expliquer les supernovas Ia qui sont observées, oui mais... oui mais depuis près de 50 ans que ce modèle a été développé, les astronomes n'ont jamais réussi à observer l'étoile compagne à l'origine du gain de masse de la naine blanche et donc de son explosion. Il faut dire que la plupart des SN Ia observées se situent dans des galaxies lointaines, ce qui ne facilite pas ce type d'observation...
Les astrophysiciens doivent ruser. On ne peut pas observer directement l'étoile compagne, mais on peut peut-être essayer de voir si il existe un impact de l'explosion de la supernova sur l'étoile compagne. C'est ce que Howie Marion (Université du Texas, Austin) et ses collaborateurs se sont engagés à observer.
La théorie développée à l'université de Berkeley par l'astrophysicien Dan Kasen prédit que lors de l'explosion de la naine blanche, si la compagne est une étoile normale, cette dernière doit subir un bref échauffement et produire alors une bouffée de lumière bleue. C'est exactement ce qu'ont observé Marion et ses collègues. Ils montrent ainsi que l'étoile compagne de cette SN 2012cg n'est ni une autre naine blanche ni une supergéante rouge comme on l'a longtemps pensé. Il s'agit d'une étoile brûlant encore de l'hydrogène, donc tout à fait normale (une étoile que l'on dit "de la séquence principale").
Vue d'artiste d'une explosion de supernova Ia après accumulation de matière d'une étoile compagne (David A. Hardy/AstroArt.org) |
SN 2012cg a été découverte le 17 mai 2012 au Lick Observatory. Elle est située dans la galaxie NGC 4424 dans la constellation de la Vierge, à une distance de 50 millions d'années-lumière. Dès le lendemain de son apparition, l'équipe de Marion l'a étudiée de très près. L'interaction avec l'étoile compagne a lieu très tôt après l'explosion proprement dite, il est donc important d'observer rapidement ce qui se passe (là-haut). L'équipe à observé la lumière en provenance de SN 2012cg avec de nombreux télescopes durant plusieurs semaines en observant la lumière dans ces différentes longueurs d'onde. L'équipe s'est constituée très vite en une vaste collaboration internationale incluant des chercheurs au Chili, en Hongrie, au Danemark et au Japon, en plus de nombreux américains.
L'excès de lumière bleue observée dans la lumière de la supernova indique clairement que la face de l'étoile compagne faisant face à l'explosion s'est fortement échauffée.
A partir de la quantité de lumière bleue en excès mesurée, les chercheurs, à l'aide de modèles d'étoiles, parviennent à déterminer la masse minimale de cette étoile compagne : 6 masses solaires.
Seules quelques spécimens de supernovas de type Ia avaient été observées aussi tôt après l'explosion, mais elles n'avaient pas permis de voir l'excès de lumière bleue caractéristique. Les chercheurs concluent dans leur article accepté pour publication dans the Astrophysical Journal, qu'ils ont eu de la chance de pouvoir observer l'excès de lumière bleue : si l'angle de vue avait été différent, ils n'auraient pas pu détecter le petit flash bleu.
Cette détection est très importante car non seulement elle confirme le modèle théorique des supernovas Ia mais elle permet aussi de prouver que les SN Ia peuvent être, à l'origine, des systèmes binaires comportant une étoile de la séquence principale (du type du Soleil), alors que des théories antérieures imaginaient plutôt des couples de naines blanches (modèle dit "double dégénéré") explosant après avoir fusionné.
Reste maintenant aux chercheurs à réitérer ce type d'observation sur les prochaines supernovas de type Ia, pour affermir cette première observation et conforter l'image que l'on se fait désormais de ces supernovas si cruciales pour les astrophysiciens.
Source :
SN 2012cg: Evidence for interaction between a normal type Ia Supernova and a non-degenerate binary companion
G. H. Marion et al.
accepté pour publication par The Astrophysical Journal
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