mardi 12 avril 2016

Observations inédites et imprévues de l'atmosphère de Vénus par la sonde Venus Express

La sonde européenne Venus Express a fini sa mission à l'été 2014 quand elle fut à cours de carburant. Juste avant d'être envoyée dans l'atmosphère de Vénus pour y brûler, elle a fourni des dernières données inédites sur l'atmosphère vénusienne.



Illustration de Venus Express en phase d'aérofreinage
(ESA-C. Carreau)
Cette ultime expérience n'était pas prévue initialement, elle a été proposée après même le lancement de la sonde en novembre 2005. C'est plusieurs mois après le lancement que Ingo Müller-Wodarg (Imperial College, Londres) et des collègues ont réalisé que la sonde en elle-même pouvait être utilisée pour faire des mesures sur l'atmosphère (après avoir passé plusieurs années à analyser l'atmosphère de Vénus à distance). L'idée était simplement d'utiliser les données des accéléromètres de Venus Express pour suivre comment évoluait la vitesse de la sonde durant la phase dite d'aérofreinage, lorsque celle-ci commence à entrer dans la haute atmosphère, avant de disparaître définitivement. Cette phase devait durer quelques semaines et les données pouvaient encore être transmises vers la Terre. 
Les accéléromètres de Venus Express ont donc mesuré indirectement la pression exercée par la densité de l'atmosphère de Vénus. La sonde a pu fournir des données sur la haute atmosphère, qui est appelée la thermosphère, autour de la région polaire, pour produire un profil de densité atmosphérique (en 18 points entre 130 et 140 km d'altitude).
Les résultats ont surpris les chercheurs : la densité est globalement plus faible qu'attendue et la température y est 70° plus froide qu'estimé auparavant (soit  114 K).
Ingo Müller-Wodarg et ses collègues pensent que cela pourrait être dû à ce qu'on appelle le vortex polaire, une énorme tempête localisée aux niveau des pôles de Vénus à environ 90 km d'altitude.

Mais ce n'est pas tout. Grâce à ces mesures inédites de la densité de la haute atmosphère de Vénus, Venus Express y montre pour la première fois l'existence d'ondes atmosphériques sur Vénus, sous forme de perturbations de densité horizontales. Les ondes atmosphériques sont l'équivalent de vagues dans de l'eau, mais au niveau du gaz atmosphérique, elles peuvent être causées par les vents circulant autour d'obstacles comme des reliefs montagneux. Les chercheurs publient cette étude dans la revue Nature Physics. Ils montrent que ces ondes atmosphériques vénusiennes ont une structure répétitive de 5 jours, qui est probablement liée à la rotation de la planète.
Ondes atmosphériques observées par Venus Express
(Ingo C. F. Müller-Wodarg et al.)

La connaissance de ces spécificités de la haute atmosphère d'une planète comme Vénus permet de savoir comment ce type de planète interagit avec l'espace environnant et en premier lieu avec les phénomènes violents qui peuvent apparaître comme les éruptions solaires. Cela permet également d'aider les ingénieurs qui conçoivent les sondes spatiales d'exploration en leur révélant ce qui les attend quand la sonde doit plonger dans l'atmosphère.

Les auteurs ingénieux de cette étude indiquent que le même concept de mesures par accéléromètre est tout à fait envisageable avec la sonde ExoMars qui a pris son envol vers Mars il y a quelques semaines et dont l'orbiteur devrait subir une longue phase d’aérofreinage à partir de décembre 2016, une campagne de mesure non prévue initialement...

Source :

In situ observations of waves in Venus’s polar lower thermosphere with Venus Express aerobraking
Ingo C. F. Müller-Wodarg et al.
Nature Physics (11 April 2016) 

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