L’amas de galaxies le plus lointain jamais observé vient d’être découvert, situé dans l’Univers âgé de seulement 2,5 milliards d’années. Le record est ainsi reculé de 700 millions d’années. Les 17 galaxies qui composent CL J1001+0220 sont déjà massives mais encore en cours de formation.
Pour mettre en évidence cet amas de galaxies, nommé CL J1001+0220 (CL J1001) une grande collaboration d’astrophysiciens a exploité les données de pas moins de neuf télescopes spécialisés dans des longueurs d’ondes très différentes, allant des ondes sub-millimétriques (IRAM-NOEMA, ALMA, JVLA), jusqu’aux rayons X (Chandra et XMM-Newton) en passant par l’infra-rouge (VLT, Spitzer, Herschel) et l’UV (Hubble). Ce programme de recherches multi-longueurs d’ondes est le Cosmic Evolution Survey (COSMOS).
La distance considérable de cet amas a été mesurée grâce au spectre infra-rouge mesuré par IRAM-NOEMA (la raie du monoxyde de carbone, très présente au sein des galaxies naissantes) puis a été confirmée avec le Very Large Telescope et le Karl Jansky Very Large Array. Les mesures en rayons X par les télescopes spatiaux Chandra et XMM-Newton ont quant à elles permis d’évaluer la quantité de gaz chaud intergalactique baignant les galaxies de l’amas et donc indirectement le potentiel gravitationnel qui permet de conclure que ces galaxies font bien partie d’un ensemble lié gravitationnellement.
Les chercheurs menés par Tao Wang (CEA et Université de Nanjing, Chine) dont des astrophysiciens français du CEA et du CNRS, observent que la quasi-totalité des galaxies de CL J1001 sont en pleine flambée de production d’étoiles (toutes sauf 2). Le taux de formation d’étoiles dans tout l’amas de galaxies atteint environ 3400 masses solaires par an, ce qui n’avait encore jamais été vu dans un amas, surtout à cette distance. CL J1001 et ses galaxies constituantes sont simplement en train de naître au moment où nous les observons. La durée estimée de réserve de gaz pour la formation d’étoiles au sein de l’amas est d’ailleurs estimée par les astrophysiciens à 200 millions d’années.
Parmi les 17 galaxies observées dans l’amas CL J1001, 11 d’entre elles ont déjà une masse en étoiles supérieure à 100 milliards de masses solaires, toutes situées au centre de l’amas dans un rayon de 80 kpc (260 000 années-lumière). La luminosité X, la masse et la dispersion de vitesse des étoiles tendent, selon les chercheurs qui publient leur étude dans The Astrophysical Journal, à indiquer un amas comportant un halo de matière noire ayant une masse totale de l’ordre de 100 000 milliards de masses solaires…
Selon Tao Wang et ses collaborateurs, le fait que nous sommes en présence en même temps d’un halo de la taille de l’amas et d’une population de galaxies massives à très forte formation stellaire, suggère que cette structure représente la phase de transition, vue pour la première fois, entre les proto-amas de galaxies et les amas de galaxies « matures ».
Les caractéristiques de CL J1001 indiquent clairement que la phase d’ « extinction » des galaxies massives (la fin de leur formation) a lieu après qu’elles se soient accrétées dans leur amas, et non avant. Cette information est cruciale pour la compréhension de la formation des amas de galaxies dans l’Univers jeune. Mais elle pose d’ores et déjà des questions aux astrophysiciens, qui ne s’attendaient pas, d’après leurs simulations, à voir des structures galactiques aussi massives en étoiles déjà à cette époque cosmique.
Source :
Discovery of a galaxy cluster with a violently starbursting core at z = 2.506
Tao Wang et al.
The Astrophysical Journal, Volume 828, Number 1 (30 august 2016)
Communiqué de presse CEA : http://www.cea.fr/presse/ Pages/actualites-communiques/ sciences-de-la-matiere/ lointain-amas-galaxies- univers.aspx
Illustrations :
1) L'amas CL J1001, imagé en multiples longueurs d'ondes. Chaque point sur l'image de gauche est une galaxie. X-ray: NASA/CXC/Université Paris/T.Wang et al; Infrared: ESO/UltraVISTA; Radio: ESO/NAOJ/NRAO/ALMA
2) Image composite de CL J1001 : rayons X (violet), infra-rouge (rouge, vert et bleu), ondes radio (vert) (X-ray – NASA / CXC / CEA / T. Wang et al; infrared – ESO / UltraVISTA; radio – ESO / NAOJ / NRAO / ALMA.)
3 commentaires :
Bonjour,
Vous expliquez dans l'article que les chercheurs ont évalué la quantité de gaz chaud dans cet amas en formation grâce à la lumière X.
Mais dans l'article précédent "Notre Galaxie était un quasar il y a seulement 6 millions d'années" vous nous expliquiez que le gaz chaud est très difficile à mettre en évidence dans notre galaxie.
Alors je me demande quel crédit accordé à cette publication... J'ai sûrement raté un truc :(
Bonjour
Ça peut paraître paradoxal mais il peut être plus difficile de mesurer des éléments dans notre galaxie que dans des objets très lointains. C'est simplement dû au fait que nous sommes précisément à l'interieur du halo. Le gaz chaud de notre galaxie se trouve donc reparti sur tout le ciel et les télescopes ne voient qu'un tout petit champ de vue à la fois et donc une petite tranche.
Dans le cas de galaxies ou amas lointains, les objets se retrouvent totalement dans le champ de vue. Et en plus, les quantités de gaz en jeu sont différentes ici et les auteurs ont mis le paquet aux niveau données...
J'espère que ça répond à votre question!
Tout à fait. Merci ;)
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