samedi 12 septembre 2020

Le courant Magellanique expliqué par la structure de gaz du LMC


Une équipe australo-américaine vient de trouver une solution pour expliquer l’origine de la structure gazeuse qui domine le halo baryonique de notre galaxie et qui serait liée aux deux galaxies satellites du Petit et du Grand Nuage de Magellan : le Courant Magellanique. Une étude publiée dans Nature.


Le Courant Magellanique est un réseau étendu de filaments de gaz neutre et ionisé qui entoure le Petit Nuage de Magellan (SMC) et le Grand Nuage de Magellan (LMC), qui sont les deux galaxies satellites les plus massives de la Voie Lactée. Des observations récentes semblaient indiquer que ces deux galaxies naines n’en étaient qu’à leur premier passage autour de notre galaxie et que le Courant Magellanique serait fait de gaz, majoritairement ionisé, arraché des deux naines. 
Même si on pouvait suspecter que ce sont les forces de marée gravitationnelles et l'arrachement par pression qui pourraient contribuer significativement au Courant Magellanique, son origine n'a jamais pu être déterminée exactement.
Depuis peu, les astrophysiciens pensent qu'il peut exister un halo de gaz chaud ionisé (500 000 K) autour du LMC, qu'ils ont surnommé la Couronne Magellanique (Magellanic Corona). Ils sont arrivés à cette conclusion via plusieurs observations récentes concernant la découverte de galaxies naines associées au groupe de Magellan, le fait d'avoir trouvé que le LMC avait finalement une masse importante ou encore la détection de gaz ionisé à proximité des étoiles dans le LMC. 
Mais tout ceci n'est rien à côté de ce que présentent Scott Lucchini (Université du Wisconsin) et ses collaborateurs dans leur étude que publie Nature qui en fait sa Une. En injectant la présence de cette couronne Magellanique dans des simulations hydrodynamiques des deux nuages de Magellan en train de tomber vers la Voie Lactée, les astrophysiciens montrent que le Courant Magellanique apparaît naturellement. Leur simulation explique par ailleurs sa structure un peu filamenteuse, son extension spatiale, son gradient de vitesse radiale et sa quantité totale de gaz ionisé...  

Les simulations suggèrent que le courant de gaz s'est formé en deux épisodes distincts. Au départ, lorsque les nuages de Magellan se trouvaient plus loin de la Voie Lactée, le LMC aurait dépouillé le SMC d'une partie de son gaz, qui se serait retrouvé dans le Courant Magellanique pour en former 20%, puis une fois que les deux galaxies naines sont entrées dans le halo de notre Galaxie, c'est la Couronne Magellanique du LMC qui s'est faite dépouillée par interaction avec le halo de gaz de la Voie Lactée, fournissant 20 autres pourcents de la masse du Courant Magellanique. Les 60 autres pourcents proviendraient du gaz interstellaire du halo de la Voie Lactée. La force de la solution de Lucchini et ses collègues réside dans son explication de la masse du courant de gaz, car aucune solution proposée antérieurement depuis 50 ans ne parvenait à reproduire fidèlement sa masse. 

Lucchini et son équipe prédisent que la Couronne Magellanique sera observable sans ambiguité par l'absorption qu'elle produit dans le domaine UV (par ses espèces fortement ionisées) sur la lumière de quasars lointains situés en arrière plan à proximité du LMC. Le télescope Hubble va encore avoir un peu de boulot à fournir...

Source

The Magellanic Corona as the key to the formation of the Magellanic Stream
S. Lucchini, E. D’Onghia, A. J. Fox, C. Bustard, J. Bland-Hawthorn & E. Zweibel 
Nature volume 585 (10 septembre 2020)


Illustrations

1) Comparaison des observations du Courant Magellanique (à gauche) et du résultat des simulations (à droite), les couleurs indiquent la vitesse (Lucchini et al.)

2) Détails des simulations effectuées (densité, vitesse) (Lucchini et al.)

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