mardi 26 janvier 2016

GRAVITY à l'assaut des trous noirs

Gravity était le titre d'un film fort intéressant, qui, on s'en souvient, débutait sur une superbe vision du télescope spatial Hubble, mais GRAVITY est aussi, et maintenant surtout, le nom d'un système optoélectronique qui vient d'être installé au Very Large Telescope de l'ESO au Chili et qui promet des prouesses.


L'amas du Trapèze dans Orion, et l'étoile double
Theta Ori F résolue grâce à GRAVITY

(MPE/ESO/Gravity consortium)
L'objectif principal de GRAVITY est de révéler les détails les plus fins qui soient sur le trou noir supermassif de notre Galaxie, Sgr A*. Le système GRAVITY consiste à mélanger la lumière de quatre télescopes pour en former un grand qui aurait le diamètre de la distance séparant les télescopes individuels, jusqu'à un diamètre virtuel de 200 m... Le concept optique à la base de ce phénomène est appelé l'interférométrie. Il s'agit, en combinant la lumière captée par différents miroirs, de faire interférer les ondes lumineuses entre elles pour en extraire une information enrichie et permettre ainsi d'atteindre une résolution spatiale équivalente à celle qui serait obtenue si il n'y avait qu'un seul énorme miroir. 
GRAVITY est un instrument européen conçu et construit majoritairement par les ingénieurs et scientifiques allemands du Max Planck Institute für Extraterrestrische Physik à Garching avec le concours de nombreux français à Paris et à Grenoble. Il sera installé définitivement sur les 4 télescopes de 8 m du VLT à la fin de l'année, mais pour vérifier que tout fonctionne comme prévu, l'instrument vient d'être testé au Paranal en grandeur réelle sur les 4 télescopes auxiliaires du VLT, qui font tout de même 1,8 m chacun, après une installation qui avait débuté à l'été 2015.

Ces premiers tests en ont fait déjà le plus grand interféromètre optique du genre jamais installé. Les premières observations se sont concentrées sur la constellation d'Orion, et plus précisément l'amas du Trapèze, qui contient de nombreuses étoiles jeunes, au cœur d'une région riche de formation d'étoiles. Et GRAVITY traitant les images des télescopes auxiliaires du VLT a pu découvrir que l'une de ces étoiles, nommé Theta Orionis F était en fait une étoile double.
L'instrument GRAVITY, la grosse cuve visible est un cryostat
permettant de refroidir le système optoélectronique pour
obtenir de meilleures performances (MPE)

La puissance de GRAVITY, outre sa capacité à faire interférer des signaux optiques, est de pouvoir le faire sur des pauses de longue durée, plusieurs minutes, ce qui était difficile auparavant avec cette technique. Le gain en exposition qu'offre GRAVITY est de l'ordre d'un facteur 100 par rapport au système interférométrique précédemment le plus performant. Les chercheurs menés par Frank Eisenhauer montrent ainsi qu'il sera possible de faire des observations interférométriques sur des objets à très faible luminosité, tout en repoussant les limites de la résolution spatiale ou angulaire à des niveaux encore jamais atteints.  

Pour stabiliser le télescope virtuel durant une longue période et permettre l'observation d'objets très faibles, les astronomes utilisent la lumière d'une étoile de référence, dans le cas de cette première observation dans Orion, il s'agissait de Theta Orionis C. La stabilisation de la lumière provenant de quatre télescopes simultanément est aussi une première mondiale.

Une fois que GRAVITY sera installé auprès des quatre grands télescopes de 8 m du VLT, ce qui est prévu d'ici la fin 2016, les astrophysiciens pourront observer de très près ce qui se passe à proximité de l'horizon de Sgr A*, là où le champ gravitationnel devient très intense. Il pourra également fournir de précieuses données sur les régions situées juste autour du trou noir : la zone d'accrétion de matière et là où naissent des jets de matière et de rayonnement, et pas qu'autour de notre trou noir supermassif mais aussi d'autres bien plus lointains. Mais GRAVITY servira aussi à d'autres domaines de l'astrophysique comme par exemple l'étude détaillée de la dynamique des étoiles binaires, des exoplanètes, ou celle des disques protoplanétaires entourant des étoiles naissantes. Il pourrait également permettre d'imager directement la surface de certaines étoiles.

Les premiers tests s'étant révélés plus que concluants, il ne reste plus qu'à passer aux choses sérieuses.


Source :

First Light For Future Black Hole Probe

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