La rotation du trou noir Cygnus X-1 vient d'être réestimée par une équipe d'astrophysiciens polonais et indiens. Ils trouvent toujours une solution qui permet de passer d'une vitesse de rotation très élevée à une vitesse de rotation très faible... L'étude est parue dans The Astrophysical Journal Letters.
Astronomie, Astrophysique, Astroparticules, Cosmologie. L'infini se contemple, indéfiniment. ISSN 2272-5768
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20/05/24
04/05/21
La Relativité Générale testée en champ fort grâce à la relation I-Love-Q des étoiles à neutrons
Des astrophysiciens viennent d'évaluer pour la première fois des paramètres fondamentaux d'une étoile à neutrons isolée : son moment d'inertie, son moment quadripolaire et son excentricité de surface, grâce à des mesures inédites du rayon et de la masse de l'étoile à neutrons. Ils leur permettent de tester la Relativité Générale en champ fort pour la première fois. Une étude parue dans Physical Review Letters.
05/09/19
Découverte d'une source X ultra-lumineuse transitoire dans la galaxie du Feu d'Artifice
La galaxie du Feu d'Artifice (alias NGC 6946) a encore frappé ! Cette galaxie célèbre pour sa richesse en supernovas était observée avec le télescope spatial NuSTAR associé à XMM-Newton pour étudier ses sources X ultra-lumineuses, lorsqu'une nouvelle source X inconnue est apparue non loin du centre de la galaxie, puis a disparu aussi vite qu'elle était apparue. Elle pourrait avoir plusieurs origines... Une étude parue dans The Astrophysical Journal.
13/04/19
Une source X transitoire détectée à 6,5 milliards d'années-lumière
Une analyse des images profondes du télescope Chandra (rayons X) a permis à une équipe d'astrophysiciens de trouver une source de rayons X très brève, très éloignée, qui correspondrait à la fusion de deux étoiles à neutrons ayant formé un magnétar, une grosse étoile à neutron très fortement magnétisée.
17/03/19
M82-X2 : une source X Ultra-Lumineuse à longue période (incomprise)
La galaxie M82 abrite dans sa région centrale pas moins de 4 sources brillantes de rayons X très proches les unes des autres, dont deux extrêmement lumineuses, qui sont classées comme des sources X ultra-lumineuses (des ULX, Ultra Luminous X-ray sources) : M82-X1 et M82-X2. Une pulsation de rayons X étonnante de période d'environ 60 jours avait été détectée en provenance de M82 depuis quelques années, et une équipe peut aujourd'hui affirmer qu'elle provient de la source M82-X2, sans pouvoir expliquer le phénomène qui est à son origine...
02/03/19
Détection de nouvelles superbulles galactiques
Des astrophysiciens viennent de découvrir dans le domaine des rayons X deux "superbulles" qui s'étendent de part et d'autre du trou noir supermassif de la galaxie NGC 3079 sur plusieurs milliers d'années-lumière. Des structures très similaires aux "bulles de Fermi" qui avaient été détectées il y a huit ans dans le domaine des rayons gamma de part et d'autre du plan de notre galaxie...
06/07/18
Des rayons cosmiques en provenance de la monstrueuse Eta Carinae
Selon des nouvelles données obtenues avec le télescope spatial NuSTAR, l'étoile binaire ultramassive Eta Carinae accélère des particules jusqu'à des hautes énergies, se révélant ainsi être une nouvelle source de rayons cosmiques pouvant arriver au niveau de la Terre située à seulement 7500 années-lumière de distance.
27/02/18
Nouvel indice sur la nature des sources X ultra-lumineuses
La célèbre galaxie du tourbillon, M51, possède plusieurs sources de rayons X ultralumineuses, des ULX (ultraluminous X-ray sources). L'origine astrophysique de ces sources se partage aujourd'hui entre deux options : des trous noirs de masse intermédiaire ou bien des étoiles à neutrons un peu extrêmes. Depuis 2014, trois ULX de ce type ont été identifiées formellement comme étant des étoiles à neutrons ayant un champ magnétique démesuré. Aujourd'hui, la source ULX 8 de M51 se montre elle aussi être produite par une étoile à neutrons...
Les premières sources de rayons X ultralumineuses ont été découvertes il y a plus de trente ans, mais leur nature restait quelque peu mystérieuse. Ce n'est qu'un peu plus tard qu'ont été proposées plusieurs solutions pouvant expliquer ces émissions de rayons X dont l'énergie peut dépasser celle de plusieurs millions d'étoiles comme le soleil. Il pouvait s'agir de trous noirs de masse dite intermédiaire, entre trous noirs stellaires et trous noir supermassifs, c'est à dire entre 100 et 100000 masses solaires, ou bien d'objets de plus faible masses mais avec un taux d'accrétion de matière démesurée, des simples étoiles à neutrons ayant un environnement particulier. A partir de 2014, le télescope spatial NuStar a pu observer des signes de pulsation périodique dans le rayonnement X provenant de trois ULX, ce qui signait une origine de type pulsar, donc étoile à neutrons.
Murray Brightman (Caltech) et ses collaborateurs ont utilisé quant à eux les données des télescopes spatiaux Chandra et XMM-Newton pour observer la belle galaxie M51 en rayons X. Chandra a été pointé à 13 reprises vers la galaxie du Tourbillon entre 2000 et 2017 et XMM-Newton, 9 fois entre 2003 et 2011, mais les astronomes ont exploité seulement 5 observations de Chandra et 4 de XMM-Newton.
Ce qui a mis les chercheurs sur la piste d'une étoile à neutrons et non d'un trou noir de masse intermédiaire, c'est la présence dans le spectre X mesuré d'une raie d'absorption spécifique. Il faut rappeler que les rayons X qui sont émis dans ce type de sources proviennent de l'échauffement gigantesque qui se produit dans le disque d'accrétion qui se forme autour de l'objet compact. Et il existe théoriquement une limite qui ne peut pas être dépassée, appelée la limite d'Eddington. En effet, il doit arriver un moment ou le rayonnement est si intense qu'il produit une pression de radiation sur la matière qui ne peut alors plus s'accumuler dans le disque d'accrétion. Cet effet de rétroaction empêche donc théoriquement à la fois un taux d'accrétion trop élevé et une émission X trop intense.
Le problème, c'est que les ULX semblent dépasser allègrement cette limite d'Eddington, et on ne sait pas pourquoi.
La raie d'absorption à 4,5 keV dans le spectre X de M51-ULX8 a été analysée en cherchant de multiples causes, mais, à cours d'autres solutions, Murray Brightman et ses collègues en arrivent à la conclusion que cette raie provient d'un phénomène physique qu'on appelle la diffusion de résonance cyclotron. Ce phénomène apparaît lorsque des particules chargées (électrons ou protons) ont des trajectoires qui s'enroulent autour de lignes de champ magnétique. Or, les trous noirs ne possèdent pas de champ magnétique, alors que les étoiles à neutrons en possède un qui peut être gigantesque.
La mesure de cette raie cyclotron offre la possibilité de mesurer la valeur absolue du champ magnétique, mais la fréquence cyclotron dépend aussi de la charge électrique des particules et de leur masse. Si il s'agit de protons, les chercheurs calculent que le champ magnétique de l'étoile à neutrons doit être de l'ordre de 1015 Gauss, et si il s'agit d'électrons, de l'ordre de 1011 Gauss.
Or il se trouve que pour briser la limite d'Eddington, un champ magnétique de 1014 Gauss pourrait bien aider en réduisant l'effet de la pression de radiation sur le plasma du disque d'accrétion... Si la raie cyclotron est produite par des électrons en revanche, cela signerait un champ magnétique relativement modeste et ne pourrait pas expliquer le dépassement de la limite d'Eddington. Les astrophysiciens ne peuvent pas trancher entre protons et électrons...
Il reste ainsi une part de mystère dans les ULX même si on commence à mieux les comprendre, notamment grâce à ces nouvelles observations. L'équipe de Brightman a déjà planifié de nouvelles acquisitions de données sur les autres ULX de M51 ainsi que d'autres galaxies, à la recherche des raies de diffusion de résonance cyclotron.
Source
Magnetic field strength of a neutron-star-powered ultraluminous X-ray source
M. Brightman, F. A. Harrison, F. Fürst, M. J. Middleton, D. J. Walton, D. Stern, A. C. Fabian, M. Heida, D. Barret & M. Bachetti
Nature Astronomy (26 février 2018)
Illustrations
1) La galaxie M51, mage composite visible + rayons X (en mauve) (NASA/CXC/Caltech/M.Brightman et al.; Optical: NASA/STScI)
2) M51 imagée en entier en visible et UV par Hubble (NASA, Hubble Heritage Team, (STScI/AURA), ESA, S. Beckwith (STScI), Robert Gendler).)
30/03/17
Chandra détecte une bouffée de rayons X d'origine totalement inconnue
Une mystérieuse bouffée de rayons X vient d'être détectée par le télescope spatial Chandra X-ray Observatory dans son image la plus profonde (le Deep Field South). Cet événement est probablement dû à un événement destructif, mais il pourrait aussi avoir une origine très différente et encore inconnue.
09/03/17
Lumière sur la nature des sources X Ultra-Lumineuses
La récente découverte de trois sources X ultra-lumineuses pulsées (des PULX) pointe vers une nouvelle explication pour ces sources de rayons X qui sont trop puissantes pour être dues à des processus stellaires mais trop faibles pour être liées à des noyaux actifs de galaxie, et il n'y aurait plus de trous noirs dans ce scénario...
07/01/17
Image inédite des plus lointains trous noirs
Sur cette image à première vue un peu étrange que vient de rendre publique la collaboration américaine exploitant le télescope spatial Chandra, les nombreux points rouges, blancs ou bleus que vous voyez ne sont rien d'autre que des trous noirs. Et 70% d'entre eux sont des trous noirs supermassifs. Cette image est l'image en rayons X la plus profonde jamais obtenue avec Chandra, résultant de l'accumulation de 7 millions de secondes d'exposition, soit plus de 11 semaines.
19/10/16
Découvertes de bouffées de rayons X ultralumineuses à proximité de 2 galaxies elliptiques
Deux objets d'un nouveau type viennent d'être découverts par une équipe internationale d'astronomes. Ces objets produisent des intenses éruptions en rayons X qui augmentent de près d'un facteur 100 en seulement 1 minute puis retournent à leur niveau initial après une heure. Ces sources X ultralumineuses inconnues ont été observées avec Chandra et XMM-Newton et leur découverte fait l'objet d'une publication dans la revue Nature cette semaine.
09/07/16
Le chant d'outre-tombe du télescope Hitomi
Vous vous souvenez certainement de la défaillance en avril dernier du télescope spatial japonais Hitomi dans lequel la communauté scientifique mettait de grands espoirs. Et bien, avant sa perte définitive, Hitomi a quand même eu le temps de produire, durant trois petites semaines, des données d’observation qui se révèlent excellentes et très riches d'enseignements.
20/01/16
Nouveau départ pour l’astronomie X
Le 12 février va être lancé depuis
le centre spatial de Tanegashima l’un des télescopes spatiaux les plus
attendus du moment : ASTRO-H. Le télescope de près de 3 tonnes, emporté
par un lanceur H-IIA, est le sixième
télescope à rayons X construit par l’Institute of Space and Astronautical
Science (ISAS) de l’agence spatiale japonaise JAXA (le précédent était le
télescope Suzaku). Mais cette fois-ci il a été conçu dans une très large collaboration, avec le concours
de 70 institutions au Japon, en Europe (notamment l’ESA et en France le CEA), aux
Etats-Unis avec le Goddard Space Flight Center de la NASA et au Canada.
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ASTRO-H en cours de préparation en novembre 2015 (JAXA) |
L’objectif
de ASTRO-H est multiple, il devrait permettre, grâce à ses performances
exceptionnelles, de grandes avancées dans l’exploration de l’Univers par ses
événements les plus violents (impliquant l’émission de rayons X et de rayons
gamma).
ASTRO-H sera notamment exploité,
grâce à ses cinq instruments d’imagerie et de spectroscopie de très haute
performance, pour l’étude de l’évolution des amas de galaxies, pour observer le
comportement de la matière en champs gravitationnels extrêmes, pour étudier la
rotation des trous noirs et la matière des étoiles à neutrons, pour scruter les
phénomènes d’accélération de particules apparaissant dans les amas de galaxies
et les supernovas, ainsi que pour étudier en détails la physique des jets de
matière et de rayonnement produits par les trous noirs, cette liste n’étant bien
sûr pas exhaustive.
ASTRO-H apporte des innovations majeures
par rapport aux télescopes X aujourd’hui en fonction comme Suzaku, Chandra-X-Ray Observatory, XMM-Newton ou
NuStar. Avec ses instruments scientifiques, il sera à même de produire pour la première
fois une imagerie spectroscopique sur des rayons X « durs » (d’énergie
supérieure à 10 keV), mais également de fournir une résolution en énergie
extrêmement élevée (seulement 7 eV de résolution dans la bande 0,3-10 keV, la
meilleure jamais atteinte en orbite), et le tout sur une très large gamme
d’énergie s’étalant entre 300 eV et 600 keV.
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Vue d’artiste de ASTRO-H (Akihiro Ikeshita / JAXA) |
L’astronomie X, s’attachant à la
détection des photons énergétiques émis par les phénomènes astrophysiques les
plus violents, n’a été rendue possible qu’à partir de l’avènement des
instruments en orbite. En effet, l’énergie élevée de ces photons leur est
fatale lorsqu’ils arrivent dans l’atmosphère terrestre et ses quelques
kilomètres de gaz dense. Les rayons X et gamma sont suffisamment énergétiques
pour ioniser les atomes d’azote ou d’oxygène ou être diffusés par leurs
électrons, et donc être fortement
atténués ou absorbés avant de parvenir au niveau du sol.
Les premières observations en
orbite furent effectuées dès 1962 par une fusée américaine Aerobee, qui permit
d’identifier la première source X lointaine, Scorpius-X1. Mais le premier
véritable télescope à rayons X fut le télescope américain Einstein lancé en
1978 et qui produisit de nombreuses données inédites jusqu’en 1981.
Les européens ne furent pas en reste
avec le lancement du télescope ROSAT en 1990, qui réussit à cartographier plus
de 120 000 sources X jusqu’en 1999. On peut également citer le télescope
américain RXTE en activité durant 16 ans entre 1995 et 2011 à qui on doit de
très nombreuses découvertes dans le domaine des objets compacts, étoiles à
neutrons ou trous noirs. Mais les télescopes spatiaux à rayons X les plus
performants aujourd’hui sont sans conteste l’américain Chandra X-Ray
Observatory, et l’européen XMM-Newton, lancés tous les deux en 1999 (à quatre
mois d’intervalle), et souvent utilisés ensemble aujourd’hui pour valider des
observations sortant des sentiers battus.
Chandra comme XMM-Newton ont été
conçus pour analyser et imager des rayons X mous, d’énergie inférieure à 10
keV. Chandra était un grand projet dans les cartons de la NASA depuis la fin
des années 1970 à l’instar du télescope Hubble, tandis que XMM-Newton était lui
plutôt la suite logique de ROSAT, avec des améliorations technologiques et plus
de contributeurs partout en Europe. Les découvertes que ces deux télescopes ont
produites depuis plus de 15 ans sont innombrables et touchent à tous les
domaines de l’astrophysique des phénomènes violents.
Manquaient néanmoins jusqu’à
récemment la possibilité d’étudier des rayons X un peu plus énergétiques, des rayons
X « durs ». Le vide a été comblé tout d’abord par les japonais avec
Suzaku en 2005 puis par la NASA en 2012 avec la mise en orbite du télescope
NuSTAR, capable d’imager des photons X jusqu’à 80 keV, venant ainsi compléter
très efficacement les deux autres grands observatoires X.
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Vue d'artistes des quatre télescopes X en activité aujourd'hui (NASA, JAXA, ESA) |
Suzaku est le nouveau nom qui
avait été donné à ASTRO-E2 une fois en orbite, selon la tradition japonaise. Ce
dernier a hélas connu une histoire mouvementée. Il a été lancé une première
fois en 2000 mais a été perdu dans l’explosion du lanceur. Il fut refabriqué à
l’identique pour être à nouveau lancé en 2005, avec succès cette fois-ci, mais de
courte durée car il subit une perte de gaz de refroidissement deux semaines à
peine après être arrivé en orbite,
perdant l’un de ces trois instruments.
L’astronomie X au Japon est une
longue histoire. Suzaku était déjà le cinquième télescope X japonais. Le
premier de la série remonte à 1981, avec ASTRO-A (renommé Hinotori), petit
télescope d’à peine 200 kg dédié à l’étude des rayons X du Soleil. ASTRO-B
(Tenma), guère plus gros, fournit de précieuses données sur les sources X
variables et leurs caractéristiques spectrales entre 1983 et 1985. Il fut suivi
par ASTRO-C (Ginga), plus imposant et emportant déjà un double système de
détection pour observer à la fois les rayons X mous et les rayons gamma, à la
recherche simultanément de trous noirs actifs, de pulsars X, des raies
d’émissions caractéristiques du fer, et de l’apparition de bouffées de rayons
gamma. Ginga a été actif entre 1987 et 1991 et laissa ensuite la place au
télescope Asca (ASTRO-D) qui fut actif plus longtemps, entre 1993 et 2000, date
à laquelle il fut perdu à cause d’une tempête magnétique… sans pouvoir être
immédiatement remplacé par le futur Suzaku.
Mais Suzaku, comme XMM-Newton,
Chandra et même NuSTAR sont des télescopes qui commencent aujourd’hui à
vieillir et ce n’est sans doute pas un hasard si les américains et les
européens participent aujourd’hui activement au développement de ASTRO-H. Car ASTRO-H
fait la synthèse de tous les télescopes X précédents en en gardant le meilleur.
Il permettra d’atteindre de bien meilleures performances que les meilleurs instruments
actuellement en orbite, et finira par les supplanter très vite.
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Principe du télescope à rayons X (focalisation de Wolter) (Goddard Space Flight Center/NASA) |
Il faut se souvenir que les
rayons X sont suffisamment énergétiques pour traverser un miroir de télescope. La
focalisation des rayons X est ainsi rendue beaucoup plus complexe que celle
plus classique adaptée aux rayonnements allant des UV aux infra-rouges ou aux
ondes radio. Les solutions généralement retenues pour focaliser des photons X
est d’utiliser le principe de Wolter, qui utilise la diffusion rasante, par les
phénomènes de réflexion totale externe et de diffusion de Bragg : une série de multiples
petits « miroirs » cristallins multicouches (de carbone et platine
par exemple) tapissent la paroi interne d’une structure cônique, et permettent
de guider les rayons X avec une incidence rasante de miroir en miroir au niveau
des parois vers le plan focal. Ce principe de focalisation de par les petits
angles en jeu, résulte en des formes de télescopes très allongées, avec des
longueurs pouvant atteindre une dizaine de mètres. C’est aussi le cas avec
ASTRO-H qui possède une longueur focale maximale de 12 m.
Les instruments embarqués sur
ASTRO-H sont regroupés en quatre télescopes, deux pour les X mous et deux pour
les X durs, ainsi que d’un détecteur de rayons gamma, tous montés sur un banc
unique avec une distance focale de 6 m pour ceux dédiés aux rayons X mous et 12
m pour les rayons X durs (voir encadré).
Rayons X de 300 eV à 10 keV
(rayons X « mous »)
·
Soft X-ray Spectrometer (SXS)
Le SXS est composé d’un système de focalisation, le
Soft X-ray Telescope (SXT-S) et d’un détecteur, le X-ray Calorimeter Spectrometer
(XCS). Le calorimètre XCS est une véritable prouesse technologique, le
semiconducteur de tellurure de mercure utilisé ne fait que 8 microns
d’épaisseur et pour atteindre la résolution en énergie record de 7 eV
seulement, il doit être refroidi à la température de 50 mK (50 millièmes de
degrés au-dessus du zéro absolu). Son champ de vue sera de 2,85 minutes d’arc
de côté. En termes de surface effective pour les X mous, ASTRO-H fera mieux
que son prédécesseur Suzaku de plusieurs dizaines de pourcents.
L’instrument SXS est particulièrement bien adapté
pour étudier les raies d’émission du fer de type K, qui permettent de révéler
ce qui se passe dans des plasmas à des températures de l’ordre de 108
K que l’on trouve dans les disques d’accrétion stellaires, les résidus de
supernovas, ou encore les amas de galaxies. La grande force de SXS est qui
peut produire des spectres de sources étendues. Sa résolution en énergie est
insensible à la taille de la source astrophysique. Il permet ainsi des
mesures spectroscopiques à haute résolution en énergie encore jamais
atteintes par les autres instruments du même type.
·
Soft X-ray Imager (SXI)
Le SXI est lui aussi composé d’un
« télescope », nommé SXT-I, système de multi-miroirs, et d’un
détecteur, un imageur déployant un capteur CCD de nouvelle génération qui
captera des photons dans la gamme de 0,5 à 12 keV, nommé SXI. SXI couvrira un
grand champ de 35 minutes d’arc de côté, venant compléter le champ plus petit
du calorimètre de SXS. Le SXI est lui aussi refroidi, mais
« seulement » à -120° (150 K). Le système de miroirs associé a une
longueur focale de 6 m pour un diamètre de seulement 45 cm.
Rayons X de 5 keV à
80 keV (rayons X “durs”)
Le système de détection dédié aux rayons X durs est
composé de deux télescopes identiques redondants, composés d’un système de
focalisation et d’un détecteur, nommés respectivement HXT (Hard X-ray
Telescope ) et HXI (Hard X-ray Imager).
·
Hard X-ray Telescope (HXT)
La structure particulière de focalisation des rayons
X fait que la surface effective varie en fonction de l’énergie du photon
incident. Pour des rayons X de 30 keV, la surface effective offerte par le
HXT est de 300 cm².
·
Hard X-ray Imager (HXI)
Le HXI produira des images en rayons X sur la gamme
de 5 keV à 80 keV. Il est constitué d’un détecteur à quatre couches de 0,5 mm
de silicium (détecteurs SSD) surmontées d’une couche de de tellurure de
cadmium (CdTe). Les rayons X de plus faible énergie (entre 5 et 30 keV) sont
absorbés dans le silicium et les plus énergétiques (de 20 à 80 keV) dans la
seconde couche semi-conductrice. De plus, ce détecteur pixelisé est plongé à
l’intérieur d’un détecteur scintillateur de germanate de bismuth (BGO) qui
aura pour vocation de rejeter très efficacement le bruit de fond.
Rayons gamma (de 100
keV à 600 keV)
·
Soft Gamma-ray Detector (SGD)
Le SGD n’est pas un imageur, mais plutôt un
multi-détecteur de photons énergétiques ressemblant au satellite Fermi mais
dans une variante à plus basse
énergie. Il ne peut pas focaliser les
rayons gamma arrivant, mais il les détecte en mesurant leur direction
d’origine. SGD surpasse les précédents instruments similaires par un rejet
très efficace du bruit de fond grâce à la technique innovante du
« télescope Compton à champ de vue étroit ». Le concept repose
sur la recherche d’interactions doubles des photons énergétiques : une
première interaction par diffusion Compton (diffusion élastique) dans la
première partie du détecteur en silicium et une seconde interaction par photo
absorption dans le segment suivant (en CdTe). Cette astuce permet, grâce à la
connaissance des énergies déposées à chacune des interactions et de leur
localisation, et grâce à la connaissance de la cinématique de la diffusion
Compton, d’en déduire la direction d’origine du photon initial (un cône dans
le ciel) et ainsi de nettoyer complètement le signal des signaux parasites
signés par un cône d’arrivée reconstitué qui ne correspondrait pas avec le
champ de vue défini par le collimateur placé devant le détecteur.
|
Les potentielles découvertes de ASTRO-H sont très nombreuses tant ses
performances attendues dans une si vaste plage en énergie sont remarquables et
utiles pour l’étude de nombreux domaines. Les applications d’ores et déjà
envisagées ont été décrites dans une série de 16 white papers signés fin 2014
par plus de 250 astrophysiciens impliqués dans la collaboration scientifique
exploitant ASTRO-H.
On y retrouve pêle-mêle la physique des naines blanches,
les phénomènes magnétiques, d’accrétion et de chocs, les binaires X, les
pulsars accrétant et autres magnétars, les trous noirs de toutes tailles, les
jeunes et moins jeunes résidus de supernovas, les nébuleuses de vent de pulsar,
la dynamique du plasma du centre galactique, le gaz interstellaire et
circumgalactique dans la Voie Lactée et d’autres galaxies, le gaz chaud des
amas de galaxies, les noyaux actifs de galaxies, les phénomènes d’accélération
de rayons cosmiques, ou encore l’évolution chimique de l’Univers jeune...
![]() |
La source X ultra-lumineuse M82-X2, produite par un pulsar, a été mise en évidence par Chandra et Nustar. (Chandra X-Ray Observatory/NASA) |
Et parmi toutes ces applications, il en est une qui intéresse tout particulièrement les
chasseurs de matière noire. Depuis quelques années en effet, des observations
de certains centres de galaxies et d’amas de galaxies, effectuées avec
XMM-Newton et Chandra, ont montré la
présence d’une raie d’émission de rayons X située à environ 3,55 keV. Cette
raie inconnue peut être interprétée comme le résultat de la désintégration de
particules pouvant former la matière noire (des neutrinos stériles). Mais cette
raie se trouve également proche en énergie d’une raie potentiellement
attribuable à du potassium fortement ionisé qui pourrait être présent dans ces
mêmes zones. Or, ni XMM-Newton ni Chandra n’ont la résolution en énergie
suffisante pour pouvoir trancher. Mais ASTRO-H, lui, devrait fournir une
réponse très claire grâce à sa résolution en énergie hors du commun, et ce en
très peu de temps. Le mystère de la raie à 3,55 keV qui court depuis quatre ans
sera résolu par ASTRO-H à n’en pas douter dans les mois qui viennent.
L’astronomie X voit un nouveau départ avec ce bijou de technologie unique qui
va prendre son
nouveau nom une fois en orbite, pour y rester au moins 7 ans. Avec ASTRO-H, le
Japon s’affirme comme la grande puissance scientifique incontournable pour
l’étude des processus extrêmes de l’Univers.
24/09/15
Regain d’activité en rayons X pour Sgr A*
Il y a quelques semaines, je vous racontais ce qui semblait être la fin de l’histoire de G2, cet étrange objet mi-nuage de gaz et de poussières, mi-objet dense qui a fait le tour de Sgr A*, le trou noir supermassif de notre galaxie, sans produire ce que les astrophysiciens attendaient, une dislocation par le trou noir avec de fortes bouffées de rayons X. Et bien l’histoire n’est finalement pas finie car quelques mois après son passage au plus près de l’astre sombre géant, une activité accrue d’émission X a été observée en provenance de Sgr A*, et l’étrange objet G2 n’y serait peut-être pas pour rien…
L’équipe d’astronomes qui publie ces observations dans la revue britannique Monthly Notices of the Royal Astronomical Society a exploité pas moins de trois télescopes spatiaux pour arriver à ses fins : Chandra X-Ray Observatory, XMM Newton et Swift. Ils ont surveillé l’activité en rayons X de Sgr A* durant près de 15 ans d’affilée, en 150 campagnes d’observations entre septembre 1999 et novembre 2014.
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Schéma de l'interaction possible de G2 avec Sgr A* (en haut), image en rayons X du centre galactique (en bas) (Chandra X-Ray Observatory) |
Gabriele Ponti, du Max Planck Institute for Extraterrestrial Physics, et ses collaborateurs, montrent que Sgr A* produit une forte bouffée de rayons X tous les quatre jours environ. Mais l’année dernière, à la fin de l’été 2014, quelques mois après le passage du nuage G2 au plus près de Sgr A*, les bouffées de rayonnement ont augmenté considérablement par un facteur 10, avec environ 2,5 bouffées par jour. Les chercheurs indiquent également avoir observé une augmentation de l’émission X moyenne d’un facteur 3,7 entre 2012 et 2014.
On ne sait toujours pas avec certitude ce qu’est vraiment cette masse de matière appelée G2, nuage de gaz, poussières, système protoplanétaire avec ou sans étoile, mais le fait que Sgr A* se soit mis à être beaucoup plus actif peu de temps après son passage au plus près suggère que de la matière provenant de G2 aurait pu en être la cause en augmentant sensiblement le taux d’accrétion du trou noir supermassif.
Le délai observé entre le passage de G2 au plus près de Sgr A* et le sursaut d’émission X observé semble étonnant (un délai de six mois tout de même), or d’autres trous noirs montrent ce même type de comportement avec de brusques variations d’intensité de leur émission de rayons X, qui peuvent être par exemple attribuées à des changements dans la puissance des vents stellaires d’étoiles massives fournissant la matière nourrissant le trou noir. Le passage de G2 n’est peut-être qu’une coïncidence après tout. Ou pas.
Si l’explication de G2 s’avère la bonne, le regain d’activité de l’émission X de Sgr A* serait le premier signe d’apport de matière fraîche au trou noir par cet objet. Du gaz aurait été arraché du nuage, puis capturé par champ gravitationnel du trou noir avant d’interagir avec la matière en train de tomber vers l’horizon de Sgr A* tout en s’échauffant à des températures extrêmes en rayonnant des rayons X.
Pour confirmer ou infirmer cette hypothèse, la surveillance du centre galactique doit se poursuivre, et se poursuit. De nouvelles observations permettront, espèrent les astrophysiciens, de savoir si le regain d’activité de Sgr A* est un comportement normal ou exceptionnel.
Source :
Fifteen years of XMM-Newton and Chandra monitoring of Sgr A*: Evidence for a recent increase in the bright flaring rate
G. Ponti et al.
Accepté pour publication par Monthly Notices of the Royal Astronomical Society
06/01/15
Fortes bouffées de rayons X détectées en provenance de Sgr A*, trou noir supermassif de notre galaxie
La plus grosse émission de rayons X jamais observée en provenance du trou noir supermassif de notre galaxie, Sgr A*, a été observée et son étude vient d'être rendue publique au cours du meeting de l'AAS (American Astronomical Society) qui a lieu en ce moment à Seattle. Cette observation date de septembre 2013 et a été effectuée avec le télescope spatial Chandra X-Ray Observatory.
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Vue du centre galactique par Chandra X-Ray Observatory (NASA) |
Cette énorme bouffée de rayons X est 400 fois plus intense que le flux observé normalement en provenance du voisinage immédiat de Sgr A*.
Sur l'image fournie par la collaboration Chandra, on peut voir les flux de rayons X avec des fausses couleurs représentant l'énergie des photons X, du rouge (faible énergie) au bleu (haute énergie). L'image animée montre le voisinage immédiat du trou noir supermassif en fonction du temps, avec une source continue de rayons X à proximité, qui est un magnetar, une étoile à neutron à très fort champ magnétique, puis cette brutale éruption de rayons X, légèrement à côté, qui se situe, elle, au niveau du trou noir supermassif.
Environ 1 an après cette première bouffée de rayons X, en octobre 2014, les chercheurs ont observé une deuxième bouffée, 200 fois plus forte que l'intensité normale cette fois-ci.
Les astrophysiciens ont déjà deux théories pour expliquer ces observations : la première est fondée sur le fait que le champ gravitationnel de Sgr A* aurait pu disloquer un astéroïde passant très près de son horizon, échauffant ensuite les débris jusqu'à des températures d'émission de rayons X par accrétion.
La seconde théorie, très différente, implique le fort champ magnétique entourant le trou noir. Une reconfiguration et une reconnexion des lignes de champs magnétique pourrait également produire ce genre de bouffées de rayons X. Ce type de processus est vu très souvent sur le Soleil, à une échelle plus petite, et l'émission observée sur le trou noir montre des similitudes troublantes...
Chandra scrute le centre galactique et Sgr A* plus particulièrement depuis sa mise en orbite en 1999. Vous vous souvenez que nous avions parlé ici il y a quelques mois d'une possible bouffée de rayons X qui aurait pu provenir de l'absorption par Sgr A* d'un nuage de gaz nommé G2. Mais de par la distance qui séparait G2 de Sgr A* au moment de la première bouffée observée, en septembre 2013, il apparaît très improbable aux yeux des chercheurs que G2 ait un lien quelconque avec elle. D'où l'imagination de plusieurs explications potentielles.
Les astrophysiciens menés par Daryl Haggard de Amherst College qui a présenté ces résultats à Seattle, ont également pu étudier assez précisément l'autre source de rayons X qui est située dans le champ de vue, ce magnétar, et commencent à mieux comprendre cet objet assez inhabituel.
Source :
Sagittarius A*: NASA's Chandra Detects Record-Breaking Outburst from Milky Way's Black Hole
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