30/11/11

Revue de presse cosmoastroparticulière, semaine 48


Cette semaine, Astroparticle Physics offre dans son numéro de décembre un article détaillant la proposition d'une future expérience embarquée en ballon stratosphérique au dessus de l'Antarctique (P.W. Gorham et al. Astroparticle Physics 35 (2011) 242–256). Cette expérience américaine, baptisée EVA (ExaVolt Antenna) devrait prendre la suite d'une expérience actuellement en cours basée sur le même concept, ANITA, dont le but est de détecter des neutrinos de très haute énergie.
Cette détection est effectuée grâce à un effet particulièrement intéressant qui est la production d'ondes radio par les interactions de particules dans des milieux diélectriques comme la glace, l'effet Askaryan . EVA doit "écouter" la glace de l'Antarctique pour récolter environ une trentaine de neutrinos de l'ordre de l'Etaelectronvolt (10^18 eV) par vol.


Dans la livraison de novembre encore chaude d'Astroparticle Physics, une revue (K.N. Abazajiana et al. Astroparticle Physics 35 (2011) 177–184) fait le point sur les différentes méthodes de mesure de la masse des neutrinos -encore eux- par l'utilisation de données astrophysiques et cosmologiques, qui permettent de fournir de puissantes contraintes tout à fait complémentaires de celles obtenues en laboratoire auprès de réacteurs ou d'accélérateurs.
La différence essentielle vient du fait que les données astrophysiques ne fournissent qu'une valeur de la masse totale des trois différents neutrinos alors qu'en "laboratoire", une évaluation de chaque famille séparément (ou presque) est accessible.
Les mesures d'oscillation faites sur terre donne le carré de l'écart de masse entre deux familles de neutrinos de l'ordre de 0.05 eV², ce qui fournit une limite inférieure pour la masse totale. Les observations astrophysiques quant à elles fournissent directement une limite supérieure à cette masse totale, qui est environ 4 à 10 fois supérieure à la limite inférieure, ce qui laisse un champ d'investigation assez important.

Le Journal of Cosmology and Astroparticle Physics (JCAP), dans son numéro 26, donne la parole aux découvreurs de l'anomalie de vitesse des neutrinos (Autiero et al. JCAP11(2011)026).
Ils proposent de relier cette observation hors norme à un phénomène observé - ou plutôt non observé - par l'expérience IceCube. IceCube est une expérience dédiée à la détection de neutrinos, notamment ceux liés à des événements de bursts gamma et devant arriver en coïncidence avec eux.
Comme IceCube ne détecte pas les neutrinos attendus d'après le modèle des bursts gamma (voir aussi ici), et sachant que la source de ces bursts gamma scrutée se situe à une distance très importante de nous, la différence de vitesse des neutrinos telle que mesurée par OPERA, pourrait en être la cause.
Leur vitesse par rapport aux photons gamma serait telle que les neutrinos, émis en coïncidence au départ, arriveraient sur terre environ un siècle avant les photons gamma.
Les auteurs font judicieusement remarquer qu'en revanche, si jamais des neutrinos sont bien détectés en coïncidence avec les bursts gamma un jour dans IceCube, cela réfutera immédiatement les résultats supraluminiques de OPERA.

Enfin le volume 29 du JCAP nous propose un article de Fabio Iocco et al. qui ont quant à eux recalculé la densité de matière noire à partir des effets, pris ensemble - c'est ce qui est nouveau - de microlentilles et de dynamique des structures. En considérant l'hypothèse classique de distribution des baryons dans la galaxie et en prenant en compte la présence de gaz intragalactique, la densité locale de matière noire est calculée entre 0.20 et 0.56 GeV/cm3, ce qui est en total accord avec la densité mesurée par d'autres techniques.
Leur étude permet en outre de rejeter l'hypothèse d'une matière noire fortement comprimée adiabatiquement.


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29/11/11

Askaryan, ou l'effet "détecteur de neutrinos"

Peut-être connaissez vous l'effet Cherenkov (parfois écrit Tcherenkov ou Cerenkov), qui est ce phénomène physique d'émission de lumière bleutée dont l'origine provient de particules chargées dont la vitesse est supérieure à celle de la lumière dans un milieu donné  (qui est égale à c/n, n étant l'indice de réfraction du milieu considéré).
Par exemple, la vitesse de la lumière dans l'eau n'est que de 0.75c et seulement de 0.67c dans le verre. c n'est la vitesse de la lumière que dans le vide, oui...

Il est donc relativement (?) facile pour certaines particules très énergétiques de dépasser cette vitesse hors du vide.
L'effet Cherenkov est observable visuellement car la particule localement supraluminique produit un cône de lumière d'un beau bleu. On peut voir cette lumière en regardant par exemple dans la piscine d'un réacteur nucléaire, où des particules alpha ou béta issues des matériaux radioactifs constituants le combustible sont émises avec des vitesses supraluminiques dans l'eau.
C'est aussi cet effet qui est utilisé pour détecter des neutrinos cosmiques, que ce soit dans de grandes masses d'eau (expérience ANTARES en méditerranée) ou de glace (ICEBUBE en Antarctique).

Mais alors, l'effet Askaryan, me direz-vous, qu'est ce que c'est ? Et en avez vous déjà entendu parlé ?

L'effet Askaryan est très semblable à l'effet Cherenkov, sauf qu'il apparait spécifiquement dans des matériaux diélectriques, comme par exemple le sel, la glace ou le régolithe que l'on trouve dans le sol lunaire.

Lorsqu'une particule traverse un tel milieu avec une vitesse supérieure à la vitesse de phase de la lumière dans ce même milieu, il apparaît non plus une lumière bleue visible, mais une gerbe gamma-électrons et de particules secondaires chargées, qui contiennent entre elles une anistropie de charge (il y a 20% d'électrons de plus que de positrons) et donc elles produisent un cône (là encore...) de rayonnement cohérent dans le domaine radio ou micro-onde du fait des champs électriques locaux produits dans le diélectrique.

Cet effet avait été postulé théoriquement par le physicien Arménien (à l'époque soviétique) Gurgen Askaryan (1928-1997) en 1962, mais n'a pu être observé expérimentalement que 38 ans plus tard en 2000 (voir http://arxiv.org/abs/hep-ex/0011001).

Depuis, cet effet a été observé dans de la silice, des sels et de la glace. Et cet effet presque étonnant est devenu très intéressant lorsque l'on veut détecter par exemple des rayonnements cosmiques sous forme de neutrinos de ultra-haute énergie.
Gurgen Askaryan
Par exemple, l'expérience ANITA (Antarctic Impulse Transient Antenna) utilise des antennes attachées à un ballon stratosphérique qui survole l'Antarctique pour chercher le rayonement Askaryan venant du continent qui est produit lorsque des neutrinos cosmiques traversent la glace de la surface Antarctique.
D'autres expériences ont même proposé d'utiliser la Lune comme détecteur de neutrinos via la détection de l'effet Askaryan dans le régolythe...

Très récemment, une nouvelle manip du même genre que ANITA mais en plus grand a été proposée par une équipe de la NASA, dans le but de rechercher des signaux radio toujours à bord d'un ballon au dessus de l'Antarctique (P.W. Gorham et al., Astroparticle Physics 35 (2011) 242–256). Il faut dire que c'est un terrain propice : des kilomètres cubes de glace désertiques sans la moindre perturbation humaine.
Cette nouvelle manip, dénommée EVA (ExaVolt Antenna) permettra d'améliorer, en un seul vol suborbital, d'un facteur 10 à 100 les résultats antérieurs sommés de ANITA.

Ecoutant la bande située entre 150 et 600 MHz, cette grande oreille devrait détecter environ 30 événements de l'ordre de l'EeV (10^18 electron-volts) par vol.

Mais revenons un instant sur celui qui a découvert cet effet, Gurgen Askaryan. C'est un physicien très méconnu, qui a pourtant apporté quelques contributions très intéressantes dans le domaine des interactions particules-matière. Sa plus grande découverte est sans conteste non pas l'effet qui porte son nom, encore que l'avenir nous réserve peut-être des surprises grâce aux antennes géantes du pôle Sud, mais un effet subtil observable dans les lasers qui est une auto-focalisation de la lumière.
On lui doit également la mise en évidence de la possibilité de détecter le passage de particules de manière acoustique grâce aux microbulles générées sur leur passage qui éclatent très vite...

La légende raconte enfin qu'il avait trouvé dès la fin des années 40, lorsqu'il était encore étudiant, un effet qui valut le prix Nobel à son découvreur officiel Donald Glaser des années plus tard en 1952, il s'agit du principe de la chambre à bulles pour détecter le passage de particules chargées (prix Nobel 1960).

Askaryan mourut à Moscou en 1997 presque dans l'indifférence générale.

Les articles fondateurs décrivant l'effet Askaryan ont été exhumés par les physiciens américains de l'Université de Hawaï, promoteurs de l'expérience ANITA, ils ont été mis en ligne ici :
http://www.phys.hawaii.edu/~anita/web/paperwork/currently%20organizing/Other%20Papers/askaryan_1962.pdf
http://www.phys.hawaii.edu/~anita/web/paperwork/currently%20organizing/Other%20Papers/askaryan_1965.pdf


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28/11/11

Ca tourne autour de Jupiter! oui, oui...

 Hier soir, c'était soirée Jupiter, et je me suis penché plus précisément sur ce satellite dont on dit qu'il contient tant d'eau, ça laisse rêveur (je suis comme ça)..
Parce qu'Europe était en train de faire sa rotation quotidienne et apparaissait tout proche du limbe Jovien. Je me suis amusé à suivre ce mouvement à 184X (Nag13+Barlowx2), en l'espace d'une heure à peine, que de chemin traversé, combien de kilomètres ?...

C'est touchant de pouvoir VOIR réellement un mouvement dans l'oculaire.

Un jour je ferai des dessins de ce que je vois dans l'oculaire, un jour...


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27/11/11

Plus que quelques semaines à vivre pour le boson de Higgs ?


Le boson de Higgs n'a plus que quelques semaines devant lui soit pour se montrer ou soit pour disparaître à jamais.
Présentée comme la déesse des particules, celle qui contribue à conférer une masse à toutes les autres particules, et également la dernière pièce manquante du «modèle standard» de la physique des particules, le boson de Higgs devait, doit, devrait (?) être la grande découverte du Grand collisionneur de hadrons (Large Hadron Collider) du CERN (LHC), l'accélérateur de particules le plus puissant du monde. Mais jusqu'ici, les deux énormes détecteurs - ATLAS et CMS (Compact Muon Solenoid) qui sont entièrement dédiés à sa découverte n'ont encore vu aucun signaux convaincants signant la présence de cette particule...

Lors d'une conférence qui s'est tenu à Paris le 18 Novembre, les équipes des expériences ATLAS et CMS ont présenté une analyse combinée qui élimine une large bande de masse potentielle pour le boson de Higgs.
En effet, la façon de découvrir une particule est fondée en quelque sorte sur le scan de toutes les plages d'énergie (masse  = énergie je le rappelle) à la recherche d'un pic d'événements détecté une fois la masse reconstruite à partir de l'énergie des particules secondaires observées (oui, oui, on ne détecte pas le Higgs directement, ce serait trop simple, on détecte une foultitude de particules secondaires, électrons, muons, neutrinos, photons, et j'en passe), puis on déduit des masses par reconstruction des interactions entre particules.
Donc, nos amis physiciens nous disent désormais que toute la plage des énergies comprises entre 141 GeV et 476 GeV est exclue pour ce Higgs!...
Or il se trouve qu'auparavant, d'autres mesures faites au siècle dernier avec le prédécesseur du LHC (le LEP) et un autre accélérateur géant américain (le Tevatron), ont indiqué que toute la plage d'énergie (plage de masse) inférieure à 114 GeV était également exclue...
Toto et Titi sont dans un bateau, Titi tombe à l'eau, qui est-ce qui reste ? Et bien il ne reste qu'une petite peau de chagrin semble-t-il....
On sait maintenant (ou on croit savoir) que le Higgs, si il existe, aurait donc une masse comprise entre 114 GeV et 141 GeV.
Le LHC va être arrêté sous peu pour sa trêve hivernale, mais les données acquises cet automne sont en cours de dépouillement par les centaines de physiciens impliqués, et vous savez quoi ? Ces données de l'automne 2011 parcourent la plage d'énergie située entre 114 GeV et 141 GeV !

Ce qui signifie une chose simple : la course contre la montre est lancée, car le premier qui annoncera THE découverte entre ATLAS et CMS aura tous les lauriers...
On nous annonce déjà (dixit Guido Tonelli, porte-parole de CMS) que l'on aura la réponse avant... Noël !
 C'est dans 4 semaines !!
source : Nature

On peut rappeler que Peter Higgs a introduit cette idée de nouvelle particule en 1964 pour permettre d'expliquer la grande différence de masse existant entre les bosons W et Z d'une part et le photon, qui partagent pourtant ensemble l'interaction électrofaible. Et comme ce mécanisme de Higgs permettait en plus d'expliquer la masse d'autres particules fondamentales que sont les quarks (formant la matière, neutrons et protons), il était vite apparu comme central dans le modèle devenu "standard"de la physique des particules.

Alors..., et si d'ici à Noël on nous annonce qu'il n'y a RIEN à voir entre 114 GeV et 141 GeV ?
En fait certains physiciens des plus renommés commencent vraiment à douter de l'existence même du boson de Higgs. Steven Weinberg, prix Nobel en 1979 pour ces travaux sur l'unification électrofaible, estime par exemple qu'il y a une chance sur 2 pour que le LHC découvre le Higgs et annonce déjà qu'il existe d'autres possibilités théoriques...


Si pas de Higgs, que mettre à la place ?

Gian Giudice, théoricien au CERN, propose des sortes d'amas géants de bosons W qui pourraient jouer le même rôle qu'une particule unique de Higgs, mais il avoue quand même que ce serait très surprenant...
D'autres modèles fonctionnent sans recours à un boson de Higgs, mais imposent des dimensions supplémentaires d'espace. Cependant ces modèles doivent encore être développés avant de pouvoir être testés expérimentalement.

L'alternative la plus probable aux yeux des physiciens des particules est que le boson de Higgs ne serait pas une particule unique, mais plutôt une classe de particules qui, ensemble, permet de garantir l'unification des deux forces électromagnétique et faible.
Un tel concept pourrait être séduisant en théorie si un unique boson de Higgs n'est pas trouvé, mais ça deviendrait vite un véritable casse-tête pour le vérifier par les expérimentateurs. Les théoriciens estiment déjà que le boson de Higgs conventionnel ne laisserait qu'une trace subtile sur les détecteurs vu qu'il se désintègre en bosons W et Z, en photons et d'autres particules de haute énergie. S'il y avait disons deux pseudo-particules de Higgs au lieu d'une, le signal de chacune serait encore plus faible. Ça commencerait à devenir assez délicat pour analyser de telles données.

La réponse au problème du boson de Higgs se trouve dans les données étant dépouillées actuellement au CERN et dans de nombreuses autres institutions scientifiques réparties à travers le monde. Une alerte avait été donnée il y a quelques mois à partir d'un premier lot de plus de 70 000 milliards de collisions de protons-antiprotons, avec peut-être un signal à 140 GeV (Nature 475, 434, 2011), mais un second lot de données à quant à lui rien montré à cette énergie...
Si les données analysées actuellement indiquent un signal de désintégrations de Higgs, l'annonce sera faite probablement avant la fin de l'année, et sûrement par les deux équipes ensemble, mais dans tous les cas, ces résultats nécessiteront d'être renforcés par de nouvelles données l'année prochaine.

Bon, et puis si il n'y a rien, on commencera à réfléchir sérieusement aux alternatives théoriques bien sûr, mais le LHC continuera néanmoins sa quête, au moins jusqu'à la fin 2012, date à laquelle une mise à niveau devrait être effectuée...
Et comme le modèle standard de la physique des particules est incapable de prédire le comportement de certaines particules sans l'existence d'une force électrofaible unifiée, il sera toujours intéressant pour les physiciens de bien étudier tous les comportements observés pour avancer sur la théorie électrofaible, si besoin.
Des années d'études en perspectives donc, avec ou sans boson de Higgs...

Restez à l'écoute, dès l'annonce faite, je la relaierai...

source : Nature 479, 456–457 ()

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26/11/11

Revue de presse très cosmoastroparticulière, semaine 47

Revue de presse très cosmoastroparticulière, semaine 47

Cette semaine, la planétologie est à la Une de Nature avec les grands lacs d'Europe, satellite de Jupiter dont on soupçonne plus que fortement la présence d'océans couverts de glace.

Schmidt et al., Nature 479, 502–505 (24 November 2011) font une analyse de données d'archives de Galileo sur Europe, guidés par une comparaison avec les processus observés sur Terre dans les volcans sous-glaciaires et les plateaux de glace.
Leurs résultats suggèrent que les interactions de l'eau glacée sont à l'origine des morphologies différentes et de la topologie singulière des terrains chaotiques observés sur une couche de glace de seulement 3 km. La topographie en contrebas de Thera Macula indique que Europe est dans une phase de resurfaçage active sur une lentille d'eau comparable en volume aux Grands Lacs d'Amérique du Nord.

Du côté de Science, cette semaine, on se penche sur l'origine des rayons cosmiques galactiques.
Ackermann et al., Science 334 no. 6059, 1103-1107 (25 November 2011), ont identifié à l'aide du télescope Fermi, une superbulle à l'origine d'une source de rayons cosmiques.
Le LAT (Large Area Telescope) du télescope gamma spatial Fermi a pu détecter l'émission gamma de rayons cosmiques "jeunes". Leur localisation a été précisée dans un "cocon" peuplé de superbulles de gaz chaud ionisé parcouru en tous sens par des ondes chocs.
Cette détection de rayons gamma complète les informations obtenues à partir des mesures des rayons cosmiques antérieures et de leur composition isotopique. L'abondance isotopique mesurée par le spectromètre à rayons cosmiques du satellite de la NASA Advanced Composition Explorer sont notamment compatibles avec une source de rayons cosmiques comprenant un mélange d'environ 20% d'éjectas d'étoiles massives (vent stellaire et éjectas de coeurs effondrés de supernovae) et d'environ 80% de matière interstellaire normale (ISM) avec des abondances du système solaire.
En outre, des mesures des abondances élémentaires, du Carbone au Strontium , montrent une amélioration dans le tri en masse par rapport à celle obtenue avec les abondances "normales" de type ISM.
Les observations de Fermi rapportés par Ackermann et al., avec des mesures de la composition isotopique élémentaires des rayons cosmiques, suggèrent que les associations OB et leurs superbulles sont probablement la source d'une fraction importante des rayons cosmiques galactiques.

Toujours dans ce numéro de Science et toujours grâce au télescope gamma Fermi, on apprend cette semaine la détection de rayons gammas de très haute énergie (> 100 méga-électron volts) en pulsation, provenant du pulsar J1823-3021A situé dans l'amas globulaire NGC 6624 (Fermi LAT Collaboration, Science, Vol. 334 ,6059 pp. 1107-1110 (25 November 2011)). Sa lumnosité γ, Lγ = (8,4 ± 1,6) × 1034 ergs par seconde, est la plus élevée observée à ce jour pour un pulsar milliseconde (MSP), et il représente la quasi totalité de l'émission gamma de l'amas.
La non détection d'émission gamma dans l'amas dans la phase hors pulse implique que cet amas contient moins de 32 MSP émetteurs gamma, et non pas 100 comme précédemment estimé. La luminosité γ indique en outre que le taux anormalement élevé de changement de sa période est causée par la valeur intrinsèque du ralentissement de sa rotation. Il en est conclu que J1823-3021A possède le plus grand champ magnétique et est le plus jeune MSP jamais détecté et que ces objets pourraient être anormaux, et se formant à des taux comparables à ceux des MSP "normaux".


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24/11/11

Je ne sais rien, rien, rien !

Socrate (photo Eric Gaba)
Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi nous voulions tout savoir ?
Pourquoi voulons-nous étudier le monde qui nous entoure et l'Univers, aussi vaste soit-il ? 
Pourquoi ne restons-nous pas bien au chaud dans notre petite grotte à ignorer le monde extérieur?
Il doit y avoir au moins trois bonnes raisons, chacune ayant un caractère fondamentalement différent. 
La plus immédiate est que la connaissance du monde qui nous entoure nous permet d'améliorer notre vie quotidienne de nombreuses façons.
Par exemple la connaissance des plantes et des animaux de notre environnement nous a fourni des capacités alimentaires plus importantes et de meilleure qualité. La connaissance des métaux et du feu nous a aidé à vivre une vie plus confortable.

La compréhension de la météo est devenue vitale à un certain niveau. La connaissance des mouvements des étoiles et des planètes nous a ensuite permis de naviguer et de lire l'heure.
L'Univers est rempli d'objets étranges évoluant dans des conditions extrêmes, et une compréhension de ces éléments améliore sans conteste notre connaissance de la physique ici sur Terre, conduisant ensuite à une myriade d'applications pratiques. 
Les deux autres raisons ont à voir avec la culture dans son sens le plus large. La curiosité humaine nous pousse à vouloir comprendre comment fonctionne le monde, indépendamment des applications possibles, que ce soit au sujet de la vie sur Terre, des objets dans l'Univers ou des propriétés les plus fondamentales de la matière.
Nous voulons savoir tout ce qui nous est possible sur le contenu et le fonctionnement de l'Univers. Et pour faire cela, nous appliquons les lois de la physique que nous connaissons ici sur Terre pour comprendre ces objets parfois infiniment éloignés.
Le but profond est à relier à la tentative de compréhension de l'origine de tout, l'Univers entier, ce qui le compose, l'origine de la vie telle que celle qui se trouve ici, et notre origine, l'origine de notre conscience.
L'objectif est simplement la connaissance pour elle-même, et cet effort est sans conteste une part essentielle de ce qui nous rend humain.
Peut-on tout savoir? Peut-on atteindre une connaissance complète de tout ? La question peut être posée dans son principe. Que cela signifierait-il ?
En fait, cela soulève la question de savoir si nous pouvons vraiment connaître le monde sous-jacent au-delà de nos perceptions sensorielles - et est-ce que nous le réaliserions si c'était le cas ?

Pour aller à un niveau un peu moins fondamental, pourrait-on un jour avoir une connaissance si complète que nous pourrions répondre à toutes les questions imaginables et être capable de tout prévoir ?
Est-ce que le monde de la connaissance potentielle est quelque chose de fini ? En d'autres termes, y a-t-il une fin à la science ?

Dans le cas de la physique, est-ce que la connaissance ne fait que produire des formules permettant de prédire l'avenir ou bien est-ce quelque chose de plus fondamental ?
La machine d'Anticythère (wikipedia)
Et d'ailleurs, est-ce que la connaissance en physique devrait toujours n'être qu'une approximation ? Contrairement aux mathématiques dont la vérité au sens de Platon doit être parfaite et éternelle, la physique repose sur des observations, des expériences et des mesures, et est donc sujette à des approximations et des incertitudes, encore et toujours, aussi petites qu'elles soient...
Après tout, peut-être que la Physique n'est rien d'autre qu'une approximation de la vérité.

Il existe une solution simple pour permettrait d'être certain que notre connaissance ne puisse jamais être complète : c'est le cas où nous vivrions dans un Univers dans lequel les lois de la Physique pourraient changer aléatoirement n'importe quand et n'importe où. Nous ne pourrions alors jamais rien modéliser et jamais rien comprendre...
Heureusement (!?), nous avons de fortes limites sur les variations de nos constantes physiques dans le temps et l'espace.
Mais il y a aussi des limites beaucoup plus fondamentales : nous ne pouvons pas savoir ce qui se trouve dans un trou noir, même en principe, car aucune lumière, et aucune information ne peut s'en échapper, nous ne pouvons pas voir à l'intérieur de son «horizon des événements». 
Nous ne pouvons pas non plus savoir ce qui se passe dans les régions de notre Univers qui sont si éloignées de nous dans l'espace-temps que la lumière en provenant n'a pas encore eu le temps de nous arriver : notre "observabilité" de l'Univers est limitée à notre «cône de lumière».
Et nous ne pourrons jamais observer d'autres Univers, même si ils peuvent exister en grand nombre.  Ils ont peut-être des lois physiques très différentes des nôtres, mais nous ne le saurons jamais!
Pour noircir encore le tableau, selon la définition d'une théorie scientifique qu'avait développée Karl Popper, et qui est largement acceptée, nous ne pourrons jamais avoir une connaissance complète, ou en tous cas, si nous l'avions atteinte, nous ne le saurions pas.

Dans cette perspective, une théorie scientifique est quelque chose qui est réfutable, c'est à dire capable de faire des prédictions qui peuvent être testées par l'expérience puis rejetée si elle est fausse. Une théorie peut seulement être réfutée, elle ne peut jamais être démontrée être vraie, peu importe le nombre d'expériences qui ont donné des résultats positifs.
Cette vision paraît quelque peu sombre, mais tentons un rayon d'espoir : Les trous noirs ne sont pas réellement entièrement noirs, puisqu'ils finissent par s'évaporer croit-on savoir depuis Stephen Hawking, même si il faut beaucoup de temps pour les trous noirs massifs....
Quant à notre cône de lumière, il est en train de s'élargir grâce à l'expansion de l'Univers, et de plus en plus vite semble-t-il... nous voyons donc plus loin, plus le temps passe...
Et le principe d'incertitude a peut-être aussi un avenir incertain au vu des évolutions possibles de la physique quantique, qui sait ? (pas moi).
Il est possible que l'on doive restreindre notre ambition d'une connaissance complète seulement à notre environnement proche, par exemple 5 milliards d'années, pourquoi pas ?

Ou bien les progrès de la science rendront tous les obstacles cités absolument ridicules. On ne sait pas.
Nous sommes accros au progrès. Que penser d'une machine comme la machine d'Anticythère, système mécanique construit en Grèce en 87 av. JC pour calculer les éclipses et les positions astronomiques et qui ne fut surpassée techniquement que 1500 ans plus tard ?
Aujourd'hui nous sommes tellement habitués à des progrès rapides en science et technologie qu'il nous semble impensable que ces progrès pourraient cesser,et que nous pourrions réellement revenir en arrière.
Et pourtant... Qui sait ?
Les scientifiques peuvent réagir de différentes façons au progrès de la science.Considérons un grand édifice scientifique qui a été laborieusement construit et est un énorme succès en ce qu'il explique de nombreuses choses et est capable de beaucoup de prédictions précises (au hasard, le modèle standard de la cosmologie ou encore le modèle standard de la physique des particules).

Supposons qu'un nouveau résultat d'observation ou d'expérimentation ahurissant apparaisse soudainement et détruise d'un coup ce bel édifice...
Pour répondre à ce cataclysme, certains scientifiques réagiront avec effroi et les autres avec joie. Les uns choqués de devoir détruire quelque chose qui avait été si soigneusement construit, les autres ravis d'apprendre enfin des choses nouvelles en cessant de confirmer encore et toujours une vieille théorie. Attention, dans les deux cas, ils veulent faire avancer la science (la connaissance), mais avec des points de vue quelque peu opposés.
Voudriez-vous tout savoir si vous pouviez ? A cette question, les gens réagissent de manière différente. Les scientifiques n'aiment pas forcément l'idée qu'un jour ils puissent tout savoir. Beaucoup pensent que la science n'a pas de limite, qu'elle continuera toujours, sans fin. Ils sont très hostiles à cette idée de fin de la science. Non pas parce que ça signifierait pour eux une période de chômage prolongé, mais peut-être parce qu'ils voient la science comme une suite de progression des connaissances qui ne peut pas s'arrêter.

A la question de savoir si la science est finie ou infinie, le plus judicieux serait sans doute de répondre simplement "je ne sais pas". Parce que personne ne sait.



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23/11/11

Trop de positrons dans le rayonnement cosmique.

En trouvant une façon intelligente d'utiliser la Terre elle-même comme un instrument scientifique, les membres d'une équipe de recherche dirigée par des physiciens du SLAC ont détourné le télescope spatial Fermi - dédié à la détection des rayons Gamma - en un détecteur de positrons. Ils ont pu ainsi confirmer une découverte surprenante de 2009 dans laquelle on trouve un excès de ces particules d'antimatière dans les rayons cosmiques, ce qui pourrait être un signe possible de la matière noire (une détection indirecte via la détection des produits de son annihilation)

Cette découverte de 2009 faite par un instrument appelé Pamela avait déclenché une explosion de spéculations : Est ce que ces positrons supplémentaires - les antiparticules des électrons - proviennent de sources astrophysiques, telles que des pulsars, ou bien d'une origine plus exotique - l'annihilation de particules de matière noire ?  
Les deux hypothèses ont bien sûr chacune leurs partisans. Les pulsars sont des sortes de maelströms de forces magnétiques qui ne sont toujours pas faciles à comprendre, tandis que les particules de matière noire sont tout à fait hypothétiques et issues de théories nouvelles (la supersymétrie, pour ne citer qu'elle) assez complexes.

Les résultats de Fermi, que l'on peut lire ici :  http://arxiv.org/abs/1109.0521 et soumis à Physical Review Letters, ne règlent pas la question de savoir d'où viennent les positrons supplémentaires. Mais ils représentent une confirmation importante des résultats antérieurs de PAMELA, et étendent l'observation à des positrons de plus grande énergie qu'auparavant, ce qui est quand même très intéressant.

Cette confirmation des résultats PAMELA "est extrêmement importante que ce soit la matière noire ou pas", a ainsi déclaré Michael Peskin, physicien théoricien au SLAC et expert en matière sombre. Tout le monde n'avait pas accepté unanimement les résultats de PAMELA, selon Peskin: «Il y avait des doutes que l'effet soit réel."
 (Image Justin Vandenbroucke, Fermi-LAT collaboration.)

Alors que le débat sur les positrons s'amplifiait, l'équipe du SLAC se mettait au travail avec le principal instrument de Fermi, le Large Area Telescope, et a tranquillement commencé à faire le sauter les verrous.
  
Le satellite Fermi n'est pas l'instrument idoine pour chercher des électrons et des positrons. La LAT n'a pas été conçu pour distinguer les électrons et les positrons, il faudrait pour cela pouvoir utiliser un gros champ magnétique...
C'est alors que Roger Romani a proposé d'utiliser la Terre elle même comme aimant et utiliser son champ magnétique pour distinguer électrons et positrons... et la Terre (le corps solide) comme un obturateur du ciel.

Si la matière noire est impliquée, les positrons découverts par Pamela et Fermi signifieraient qu'elle serait formée de  particules massives interagissant faiblement (WIMPs). Plusieurs expériences - HEAT,  CAPRICE, et AMS-01 - avaient déjà trouvé un excès de positrons parmi les particules du rayonnement cosmique à des énergies de plus de 7 GeV. PAMELA a étendu ces mesures à environ 100 GeV. Maintenant, la LAT de Fermi a trouvé un excès de positrons jusqu'à 200 GeV, la plus haute énergie qu'il peut mesurer. Puisque la théorie prédit que l'énergie des positrons en excès serait directement liée à la masse des WIMPs puisque provenant de leur annihilation (E=mc²), cela indiquerait que les particules de matière noire sont vraiment très massives- même plus massives que ne l'aimeraient de nombreux physiciens.

A tel point que la majorité penche plus vers une explication n'impliquant pas les WIMPs mais plutôt une source astrophysique comme les pulsars... 

Mais le problème est plus profond qu'une gueguerre entre pulsars et particules de matière noire. C'est qu'il n'y a aucun moyen de distinguer entre les deux types de sources à ce niveau, et si des positrons d'énergies encore plus élevées continuent à apparaître au fil des futures expériences, comme la plupart le pense, l'explication pulsar risque de devenir également tendue.  
«Je pense qu'il est clair qu'il y a quelque chose d'intéressant», dit Douglas Finkbeiner de Harvard, "mais dire ce que c'est ...." conclue-t-il... 

Alors que les théoriciens débattent sur les tenants et les aboutissants en attendant plus de données, ils peuvent s'entendre au moins sur une chose: les résultats de Fermi-LAT sont un tour de force expérimental. "Je pense que c'est un accomplissement phénoménal», dit Dan Hooper. Peskin a quant à lui qualifié les résultats simplement de «beaux».

source : SLAC
https://news.slac.stanford.edu/features/fermi-gamma-ray-space-telescope-confirms-puzzling-preponderance-positrons


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19/11/11

L'avenir radieux de l'Astronomie

Je me suis amusé à regarder un indicateur simple comme le nombre de grands télescopes terrestres mis en service dans le monde dans les 100 dernières années, c'est à dire des télescopes de plus de 2,5 m de diamètre, depuis le Hooker de 1917 (Mt Wilson) et jusqu'au 7ème GMT (Giant Magellan Telescope) devant arriver en 2019.
On se rend très vite compte de l'état de cette science la plus vieille du monde. Et on doit pouvoir affirmer qu'elle ne se porte pas trop mal...

Je connais plus d'un économiste (je sais, ça n'a rien à voir!) qui aimerait contempler une courbe de ce type...


Cette jolie courbe ne tient pas compte des  multiples télescopes spatiaux scrutant diverses longueurs d'ondes qui ont été mis en orbite depuis 1957, mais uniquement des télescopes bien terrestres...

On constate notamment l'existence d'une réelle rupture lorsque je suis né, en 1973. C'est une curiosité qui méritait d'être notée...

Blague à part, il est encore bien plus intéressant de tracer la courbe de la surface de miroir cumulée depuis ce siècle, pour mieux rendre compte de la puissance astronomique mondiale en cours et à venir dans les quelques années qui viennent.

Ca donne cette courbe qui ferait pâlir, rosir, voire rougir plus d'un banquier :


Comment dire.... c'est impressionnant, n'est ce pas ?

Bon, l'EELT de 42 m de diamètre (vous avez dit diamétrite ?) qui est prévu pour 2018 joue beaucoup dans la brutale montée en puissance, mais cela montre surtout que nous ne sommes qu'au tout début d'une nouvelle ère. L'astronomie du XXIème siècle n'aura absolument rien à voir avec l'astronomie du XXème telle que nous avons pu la connaître un peu pour les plus vieux d'entre nous...

Les découvertes se succéderont comme jamais, nous seront submergés à n'en pas douter par des données d'une précision inimaginable aujourd'hui. Quand on pense qu'il y a 100 ans on commençait à peine à comprendre ce qu'est une galaxie....
L'astronomie, plus vieille science du monde, est une science qui a un avenir radieux.


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17/11/11

- BREAKING - Vitesse supraluminique des neutrinos confirmée !

Une nouvelle mesure vient d'être effectuée par les physiciens de OPERA avec une méthode plus précise et confirme l'avance de 62.1 nanosecondes +- 3.7 ns des neutrinos par rapport au temps qui serait mis par la lumière!...

Dans le nouveau dispositif, ils se sont affranchis de la statistique : Des paquets de protons ont été produits sur une durée d'environ 3 nanosecondes, séparés par des intervalles de 500 nanosecondes. De cette façon, il devient possible de relier chaque détection de neutrino à un paquet de protons dont on connait le temps d'émission avec une incertitude de 3 nanosecondes.

Ce dispositif permet de mesurer la vitesse des neutrinos de manière beaucoup plus fiable que la première mesure annoncé en septembre dernier, au prix d'un nombre de neutrinos détectés plus faible (seulement une vingtaine d'événements ont été collectés dans la nouvelle manip).

Communication à lire ici  :  http://arxiv.org/abs/1109.4897

On est maintenant très impatient de voir les résultats de l'expérience américaine similaire MINOS, qui seule permettra de dire si ce qui est observé ici est réel ou biaisé par une erreur expérimentale... Encore 2 ans d'attente...

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Chronophotographie de Jupiter galopant au foyer du Dobson

De même que les pionniers ont pu étudier le mouvement d'un cheval au galop en 1880 grâce à la chronophotographie, voilà que c'est Jupiter que je prends pour un cheval, qui court, qui court, qui court... Jugez plutôt :


Pour ceux qui ne sont pas habitués, vous pouvez alors juger des problèmes rencontrés par nous autres amateurs Dobsoniens (puristes) qui devons suivre avec notre tube ce galop en pivotant, poussant, montant, poussant, montant, etc.... Mais c'est un galop tellement entrainant...

Voir aussi : http://drericsimon.blogspot.com/2011/11/jupiter-au-dobson-suite.html


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16/11/11

La Terre depuis l'ISS

Earth | Time Lapse View from Space, Fly Over | NASA, ISS from Michael König on Vimeo.

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L'étoile mystérieuse de Hertzsprung

Ejnar Hertzsprung a été l'une des grandes figures de l’astronomie du XXème siècle. Son nom reste gravé dans le diagramme dont il partage la paternité avec un certain Henry Russell, diagramme qui montre en un coup d’œil l’évolution de toutes les classes d’étoiles existantes.
Dans sa carrière d’astronome, il est arrivé à Hertzsprung de tomber sur un os, un problème incompréhensible, et qui le poursuivit durant quelques années. Il fut confronté à ce qu’on a appelé une étoile mystérieuse, l’étoile mystérieuse de Ejnar Hertzsprung.
Cette étoile mystérieuse n'a en fait jamais été vue directement par Hertzsprung, ni par personne d’autre, mais elle a été photographiée.
Voilà l’histoire : 
Le 15 décembre 1901, deux photographies, prises à une heure d’intervalle ont été effectuées à l’Harvard College Observatory (Cambridge, Massachussetts). Les plaques photographiques ont alors été stockées dans les archives de l’Observatoire (qui en compte près de 500 000 aujourd’hui !). Ce n’est que 27 ans plus tard que ces deux plaques  ont été ressorties des archives.
Hertzsprung ne connaissait rien de cette image stupéfiante avant de tomber dessus le 1er avril 1927.
Il la découvre en examinant méticuleusement des milliers de plaques photographiques de la collection de Harvard à la recherche d’étoiles variables qu’il étudiait à cette époque. L’objet si mystérieux qu’il découvre alors semble bien être un objet variable, mais ne ressemble que très peu à une étoile…
Cet objet est très brillant, trop… D’après l’intensité enregistrée sur la plaque photo, cette « étoile » devait être visible à l’œil nu pour un observateur aguerri et sous un bon ciel.
Autre chose étonnante, sa dimension : l’étoile (appelons la ainsi) semble avoir une taille définie, et non pas être ponctuelle comme c’est le cas pour une étoile « normale », et, encore plus étonnant, son diamètre semble avoir augmenté entre la première photo et la seconde prise une heure après…
S’il n’avait eu qu’une seule image entre les mains, Herzsprung aurait tout de suite rejeté cette donnée en l’attribuant à un défaut de la plaque photo, mais la probabilité que deux plaques photo aient un défaut correspondant exactement au même endroit dans le ciel lui apparut beaucoup trop faible pour être un pur hasard.
Mais Hertzsprung ne trouvait aucune explication valable pour expliquer cette étoile mystérieuse. La variabilité suggérait que cet objet n’était pas à des distances stellaires, il a donc imaginé qu’il s’agissait d’un objet du système solaire. 
Hertzsprung a tout de suite pensé à une comète. Mais assez vite l’idée de la comète ne lui parut pas tenir car d’autres plaques photo des régions adjacentes du ciel prises juste avant et juste après le 15 décembre 1901 ne montrent aucune trace semblable, à moins que cette comète ne soit extrêmement rapide. Mais l’absence de mouvement apparent entre les deux photos (prises à une heure d’intervalle, rappelons-le) exclue cette hypothèse. S’il s’agissait d’un corps en mouvement, ce dernier devrait être trop lent pour être perceptible sur une durée d’une heure.
Hertzsprung commença alors à imaginer d’autres hypothèses un peu plus singulières, comme la possibilité qu’il s’agisse d’un nuage de débris libérés lors d'une collision d'astéroïdes…. mais il estima finalement que la forme sur l'image était trop ronde et trop régulière pour un tel cataclysme.
Alors que Hertzsprung s’obstinait à voir dans son étoile mystérieuse un corps provenant  du système solaire, d’autres astronomes alertés par les soucis grandissants de l’astronome danois restèrent sur la piste d’une étoile variable. L’astronome allemand Richard Prager, par exemple, la  répertoria en 1934 sous le numéro 122 dans son catalogue d’étoiles présumées variables.
Le célèbre couple d’astronomes Sergei Gaposchkin et Cecilia Payne-Gaposchkin ont quant à eux suggéré dans leur monographie de 1938 sur les étoiles variables (Variable Stars) que l'objet mystérieux pouvait être un exemple d'une classe jusque-là méconnue de novae très rapides.
Beaucoup plus tard, en 1951, Dorrit Hoffleit, une experte des étoiles variables à Harvard, suggéra qu’une étoile variable montrant une éruption de magnitude extrêmement élevée pouvait être à l’origine des photos mystérieuses de Hertzsprung. Hoffleit spécula que la lumière très rouge de l'étoile éruptive pouvait être responsable de l’aspect nébuleux et de la forme arrondie apparaissant sur les plaques photographiques utilisées en 1900….
Malheureusement, aucune preuve de ces  explications spéculatives ne fut apportée.
Un astronome amateur, Thomas Anderson, avait proposé à Hertzprung une approche différente peu après l’annonce de sa découverte. 
Dans une lettre à Hertzsprung datée du 10 mai 1927, Anderson relance l’idée d’une comète, mais avec une différence notable : il suggéra que l'objet était une comète de faible luminosité mais photographiée par hasard exactement au moment d’une éruption, de luminosité brève mais très forte, un peu similaire à ce qui arriva à la comète Holmes en 1892.
Cette dernière passa d’une magnitude très faible à une visibilité à l'œil nu en quelques heures et afficha une apparence remarquablement symétrique, qui n’est pas sans rappeler les fameuses images trouvées par Hertzsprung. 
Cette proposition n’arrangea pas l’état de notre Hertzsprung qui fut bien sûr conquis par cette idée et demanda aux astronomes de Harvard d'examiner attentivement toutes les plaques photo prises pendant les nuits avant et après le 15 Décembre 1901, à la recherche d’une telle comète. Mais bien sûr, rien ne fut trouvé.

L’absence d’objet suspect sur les plaques photo prises immédiatement après le 15 décembre n’allait pas dans le sens de l’explication de Anderson, en effet, une comète comme Holmes a certes surgit de l’obscurité très rapidement mais a ensuite décliné assez lentement, pendant plusieurs semaines, et d’autres comètes éruptives ont également subi ce même scénario. Elles ne peuvent ainsi pas expliquer l’absence d’objet dans les nuits tout juste suivantes le 15 décembre.
Certes des éruptions cométaires rapides avaient déjà été observées, mais avec des intensités vraiment très faibles et s’il s’agissait de cela sur la photo de Herzsprung, la comète aurait dû être visible avant et après le phénomène…
Par ailleurs, un tel grossissement de la taille apparente de l’objet à une heure d’intervalle est difficilement compatible avec ce type d’explication, et en tous cas serait sans précédent.
Ejnar Hertzsprung finit par abandonner sa quête après de longues années, à moins que ce ne soit sa quête qui finit par l'abandonner, mais la question demeure :  Qu’était donc l’étoile mystérieuse de Hertzsprung ?
Il se trouve en fait qu’il est plus facile de dire ce qu’elle n’était probablement pas. 
Ce n’était assurément pas un météore, de manière évidente. Ce n’était probablement pas non plus une nova rapide ou autre étoile variable. Il n’existe en effet aucun exemple à ce jour de novae montrant une variation de luminosité aussi importante et rapide. Des étoiles éruptives rapides existent mais aucune étoile appropriée n’apparaît à l’emplacement de l’étoile mystérieuse. La contrepartie visible d’un très gros sursaut gamma ? La durée longue de l’événement disqualifie hélas cette suggestion. Une comète (éruptive) c’est vrai permettrait d’expliquer l’aspect diffus de l’objet, mais on l’a vu la variation trop rapide et l’absence d’observation avant et après amènent à l’exclusion.

Reste alors une possibilité : et s’il s’agissait d’un phénomène rare qui n’est pas encore connu ? On parlait des sursauts gamma, rappelons-nous que ce phénomène n’existait pas aux yeux de Hertzsprung et des scientifiques de son époque…
L’étoile mystérieuse de Hertzsprung serait-elle la manifestation d’un phénomène astrophysique nouveau dont on a absolument aucune idée ?
C’est évidemment la solution la plus intéressante, mais il faut avouer une chose, c’est que c’est quand même très peu crédible... Pourquoi ? Pour une raison simple : parce que depuis cet exemple qui a déjà plus de 100 ans, on a beaucoup beaucoup (et de plus en plus) regardé le ciel, et on n’a simplement jamais revu un tel phénomène !... Jamais ! On aurait dû revoir, au moins une fois, un tel phénomène… même s’il est très rare, avec tous ces télescopes scrutant aujourd’hui nos cieux noirs…
Alors, quoi ?
Puisqu’il semble que l’on doive rejeter la solution pourtant passionnante d’un phénomène encore inconnu, il faut peut-être se pencher, au contraire, vers les phénomènes les plus banals, ceux auxquels on n’aime pas penser tellement ils sont communs….
Après tout, et si l’étoile mystérieuse de Hertzsprung n’était pas réelle, mais juste une vraie coïncidence incroyable, l’existence de deux défauts exactement au même endroit sur les deux plaques photo ?
Hertzsprung y avait pensé mais avait rejeté d’emblée cette solution. Mais finalement, si rien d’autre ne peut résoudre l’énigme, l’improbable devient l’ultime recours. Cette explication peu excitante astronomiquement le devient  en revanche si on étudie les statistiques.
Il faut toujours se rappeler que des événements à très faible probabilité arrivent quand même parfois. Sans parler des gagnants du loto dont certains ont gagné deux fois, souvenons-nous de cette histoire incroyable qui arriva pendant le bombardement de Londres durant la seconde guerre mondiale : une bombe est tombée à travers le toit d’une maison et n’a pas explosé. Ce fait est déjà assez rare. Mais peu de temps après, une seconde bombe est tombée par le trou dans le toit laissé par la première… je vous laisse calculer la probabilité…mais il y a mieux, cette seconde bombe n’a pas explosé non plus !... Aucun mort dans la maison…
Quelle est la probabilité qu’un tel événement arrive ? Est-ce qu’il serait moins probable que les deux plaques photo de Hertzsprung aient eu un défaut au même endroit, expliquant ainsi son étoile mystérieuse ?


source :

Weird Astronomy: Tales of Unusual, Bizarre, and Other Hard to Explain Observations 
David A.J. Seargent
Springer-Verlag New York Inc. (2010)

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14/11/11

Filmer la rotation de la Terre...

Je me suis dit que ça devait être possible de créer des films à partir de photos ayant des poses assez longues, comme par exemple pour faire le suivi de la rotation apparente du ciel... Je me suis donc amusé samedi soir, avant de m'attaquer à Jupiter, à faire une série de 120 poses, chacune de 30 s, soit environ un suivi de 70 minutes, chaque pose étant espacée de 5 s pour le processing du Canon (1000D, pour mémo).

Malheureusement, la brume est arrivée vers la fin, avant même que la batterie du notebook rende l'âme, mais le résultat est fort sympa, à réitérer une nuit sans lune...

La constellation pointée est ici la Lyre, avec en vedette bien sûr Véga la magnifique. La lune était presque pleine, ce qui explique la pâleur du ciel...
Cette vidéo recomposée grâce à la fonction Stack de ImageJ comporte 12 images par secondes, pour ne pas produire un effet trop saccadé et être quand même suffisamment long (70 minutes résumées en 10 secondes) :




En version "statique" (prise en compte du maximum par pixel pour chacune des 120 images), on obtient ceci, un filé d'étoiles assez classique maintenant : 



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13/11/11

Photo de Jupiter au Dobson, suite

Hier soir, le ciel étant clair et la lune éclairant affectueusement ce coin de garrigue qui me sert de spot astronomique, j'en profitai pour user ma bague T2 sur mon Canon 1000D au foyer du Dob.

C'est Jupiter qui fut ma cible, parce que la Lune présentait peu d'intérêt, car peu de reliefs en cette phase...
J'ai donc fait la course à Jupiter, en fixant une ouverture maximale et un temps de pose minimal pour voir quelques détails, soit un F/D 4.0 et des poses de 1/125 s.

Ne restait ensuite qu'à recomposer une image moyennée sur 5 poses pour améliorer le signal/bruit, et voilà au final ce que ça nous donne :



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11/11/11

Lemaître / Hubble : Fin de controverse.

Un débat passionné a éclaté il y a quelques mois au sujet de savoir qui est à l'origine de l'une des découvertes les plus profondes de notre époque : l'expansion de l'Univers.

C'est le célèbre (depuis) astronome américain Edwin Hubble, qui traquait l'expansion grâce à l'étude des vitesses et des distances de plusieurs dizaines de galaxies lointaines dans les années 1920, qui est généralement cité.

Mais il n'y a aucun doute que c'est en fait à Georges Lemaître, cosmologiste belge, que l'on doit d'avoir proposé la démonstration expérimentale de l'expansion de l'Univers en 1927, deux ans avant Hubble.

La "découverte" de Hubble en 1929 a quant à elle confirmé et bien étendu les résultats de Lemaître. Or il est apparu une controverse liée à l'article de Lemaître publié en 1931 qui était la traduction en anglais de son article de 1927 (publié en français dans une revue assez confidentielle).

Cette controverse vient du fait que dans cet article de 1931, les conclusions révolutionnaires de Lemaître n'apparaissent plus, ce qui rend a posteriori tous les honneurs à Hubble pour la découverte qui, lui, a vu son article de 1929 largement diffusé dans le monde... Des accusations de censure ont même été entendues...

Très intrigué par cette histoire, un astronome fasciné par l'histoire récente de l'astrophysique, Mario Livio du Space Telescope Science Institute de Baltimore, s'est mis en tête de retrouver exctement pourquoi des passages-clé de l'article de 1927 de Lemaître ont ainsi été supprimés en 1931 dans sa traduction. Et il a trouvé !, grâce à la trouvaille d'une lettre inédite de Georges Lemaître.

Mais revenons un instant sur l'histoire de cette découverte...

Georges Lemaître
En 1922, Alexandre Friedman à Leningrad avait publié la théorie de l'expansion de l'univers dans l'une des revues de physique les plus prestigieuses de l'époque, le Zeitschrift für Physik, que Einstein réprouva dans un premier temps en déclarant faux les calculs effectués par Friedman, puis finit par en reconnaitre l'exactitude.
Il manquait bien évidemment une preuve expérimentale.


La même année (1922) l'astronome américain Vesto Slipher avait commencé à mesurer le redshift (décalages des fréquences vers le rouge, indiquant les mouvements relatifs) pour 41 galaxies dans le ciel de l'hémisphère Nord. 

Les listant dans son livre de 1923 The Mathematical Theory of Relativity, le physicien britannique Arthur Eddington écrivit : «La grande prépondérance de vitesses de recul positives est très frappante." Mais il ajouta que le manque d'observations du côté de l'hémisphère Sud ne permettait pas de tirer davantage de conclusions.

En 1927, Georges Lemaître, prêtre et scientifique à l'Université catholique de Louvain en Belgique, après avoir passé deux ans à Cambridge (Royaume-Uni) auprès de Eddington et un an à Cambridge (MIT, Massachussetts) publie, en français, un article remarquable dans la revue assez confidentielle Les Annales de la Société Scientifique de Bruxelles intitulé "Un Univers homogène de masse constante et de rayon croissant rendant compte de la vitesse radiale des nébuleuses extragalactiques" - oui, à cette époque les galaxies n'étaient que de vulgaires nébuleuses...-

Dans ce papier, Lemaître rapporte sa découverte de solutions dynamiques aux équations d'Einstein de la relativité générale,desquelles il dérive ce que l'on appelle aujourd'hui la loi de Hubble : la vitesse des galaxies est proportionnelle à leur distance par rapport à nous.

Mais Lemaître alla au-delà des seuls calculs théoriques dans son article. Il détermina le taux d'expansion de l'Univers en utilisant les vitesses des galaxies mesurées par Slipher, et leurs distances déterminées à partir de la luminosité, mesures publiées par Hubble (tiens, tiens...) un an plus tôt en 1926.  

Pour la valeur de ce taux d'expansion, appelé aujourd'hui la constante de Hubble, Lemaître obtint une valeur de 625 km/s par mégaparsec.  
Lemaître disait aussi que la précision des estimations de distance disponibles était insuffisante pour évaluer la validité de la relation linéaire qu'il avait découverte. (là c'est sûr, il avait pas tort, puisque la constante de Hubble vaut en fait aujourd'hui environ 73 km/s/Mpc)
 
En 1929, deux ans après l'article de Lemaître sort l'article de Edwin Hubble intitulé «A relation between distance and radial velocity among extra-galactic nebulae». Dans cet article, Hubble et son assistant, Milton Humason, ont utilisé des mesures de distance améliorées (en partie basées sur de meilleurs indicateurs de distance stellaire comme des variables céphéides et des novae) et des vitesses prises principalement des données de Slipher. Ils établissent la loi de Hubble, avec une valeur pour la constante de 500 km/s par mégaparsec.


En lisant cette histoire, il semblerait logique de mettre la découverte expérimentale de l'expansion de l'Univers et l'existence du principe d'une loi linéaire distance-vitesse au crédit de Lemaître, et puis la confirmation détaillée de cette loi à Hubble et Humason, étant donné leurs observations plus précises, qui ont étendue les mesures de vitesse de Slipher à de plus grandes distances. Mais c'est là que ça ce corse...
La traduction anglaise de l'article de Lemaître de 1927 a été publié dans les Monthly Notices of the Royal Astronomical Society en mars 1931. Cependant, durant le processus d'édition, quelques paragraphes de la version originale française ont été purement et simplement supprimés, et notamment celui très important dans lequel Lemaître décrit la loi de Hubble et déduit le taux d'expansion.
 

Il manque également le paragraphe dans lequel Lemaître discute des erreurs dans les estimations de distance, ainsi que des notes de bas de page cruciales, dans l'une desquelles Lemaître a interprété la proportionnalité entre la vitesse et la distance comme résultant d'une expansion cosmique, rien de moins ! 
La disparition de ces passages lors de la traduction a été connue par certains mais pas tant que ça.
Edwin Hubble

Jim Peebles cosmologiste à l'Université Princeton , a écrit dans un ouvrage sur Lemaître en 1984 : «Il est curieux que les paragraphes cruciaux décrivant comment Lemaître a estimé H, la constante de Hubble, et évalué les preuves de linéarité vitesse-distance ont été tronquées dans la traduction anglaise de 1931."
Qui a traduit l'article de Lemaître et pourquoi ont été supprimés ces paragraphes?


Sidney van den Bergh, astronome canadien, a spéculé il y a quelques mois que celui qui a fait la traduction sélective peut l'avoir fait pour conserver à Hubble la priorité de la découverte.
David Block, un mathématicien à l'Université de Witwatersrand à Johannesburg, Afrique du Sud, a suggéré en outre que Hubble aurait pu lui-même mettre la main dans cette censure cosmique, pour s'assurer que le crédit irait à lui-même et à l'Observatoire du Mont Wilson, où il faisait ses observations.


L'historien des sciences Robert Smith de l'Université de Alberta au Canada, qui croit que le crédit de la découverte de l'expansion devrait aller à Lemaître, a suggéré que les paragraphes peuvent avoir été coupés dans le cadre de pratique éditoriale standard par l'éditeur de la Monthly Notices.
 


C'est dans ce contexte commençant à devenir houleux que Mario Livio se mit en quête de la vérité sur ce qui se passa il y a 80 ans... Il réussit à obtenir auprès des Archives Georges Lemaître à Louvain la lettre envoyée par l'éditeur des Monthly Notices, l'astronome William Smart, à Georges Lemaître, au sujet de la traduction et de la publication de l'article.

Smart y demande à Lemaître s'il permettrait que son article de 1927 soit reproduit dans le Monthly Notices, parce que le conseil de la Royal Astronomical Society estimait que le papier n'était pas aussi bien connu que ce qu'il devrait.

Dans sa lettre, Smart nulle part n'évoque la volonté d'exclure un passage ou une note et n'évoque à aucun moment les résultats de Hubble.

Pour aller plus loin, Livio partit donc enquêter du côté des archives de la Royal Astronomical Society et a fini par retrouver la réponse que Lemaître adressa à Smart le 9 mars 1931, et cette dernière résoud entièrement l'énigme : 

Dear Dr. Smart
I highly appreciate the honour for me and for our society to have my 1927 paper reprinted by the Royal Astronomical Society. I send you a translation of the paper. I did not find advisable to reprint the provisional discussion of radial velocities which is clearly of no actual interest, and also the geometrical note, which could be replaced by a small bibliography of ancient and new papers on the subject. I join a french text with indication of the passages omitted in the translation. I made this translation as exact as I can, but I would be very glad if some of yours would be kind enough to read it and correct my english which I am afraid is rather rough. No formula is changed, and even the final suggestion which is not confirmed by recent work of mine has not be modified. I did not write again the table which may be printed from the french text.
As regards to addition on the subject, I just obtained the equations of the expanding universe by a new method which makes clear the influence of the condensations and the possible causes of the expansion. I would be very glad to have them presented to your society as a separate paper.
I would like very much to become a fellow of your society and would appreciate to be presented by Prof. Eddington and you.
If Prof. Eddington has yet a reprint of his May paper in M.N. I would be very glad to receive it.
Will you be kind enough to present my best regards to professor Eddington.
Lettre que l'on peut ainsi traduire :

"Cher Dr Smart,
J'apprécie beaucoup l'honneur que vous me faites ainsi qu'à notre société scientifique pour vouloir republier mon article de 1927 pour la Royal Astronomical Society. Je vous envoie une traduction de mon article. Je n'ai pas trouvé opportun de réécrire la discussion provisoire (prédictive?) sur les vitesses radiales qui est clairement sans intérêt, ainsi que la note sur la géométrie, qui pourrait être remplacée par une petite bibliographie d'articles anciens et nouveaux sur le sujet.

Je joins un texte en français indiquant les passages omis dans la traduction. J'ai essayé de faire une traduction aussi exacte que possible, mais je serais très heureux si vous seriez assez aimable de corriger mon anglais que je crains être plutôt rustique.

Aucune formule n'est changé, et même la suggestion finale qui n'est pas confirmée par mes travaux récents n'a pas été modifiée. Je n'ai pas réécrit à nouveau le tableau qui peut être imprimé tel quel à partir du texte français.

En ce qui concerne d'ailleurs le sujet, j'ai obtenu les équations de l'univers en expansion par une nouvelle méthode qui montre clairement l'influence des condensations et les causes possibles de l'expansion. Je serais très heureux de les présenter à votre société dans un article distinct.

J'aimerais beaucoup devenir un membre de votre société et apprécierais vous rencontrer et être présenté au Professeur Eddington.
Si le professeur Eddington a encore une réimpression de son article de mai dans les MN, je serais très heureux de le recevoir.

Seriez-vous assez aimable pour présenter mes meilleures salutations au professeur Eddington."


C'est donc bel et bien Lemaître lui-même qui a fait la traduction (comme il a pu) et a enlevé les passages qu'il pensait devenus quelque peu obsolètes depuis les résultats de Hubble... Il ne cherchait absolument pas à revendiquer quelque paternité que ce soit sur une découverte et préférait visiblement aller de l'avant, en évoquant dans cette réponse de nouvelles équations et proposant un nouvel article sur ces nouveaux travaux...

  • Livio, M.  Nature 479, 173 (10 november 2011)
  • Lemaître, G. Ann. Soc. Sci. Brux. A 47, 49–59 (1927)
  • Hubble, E. P. Proc. Natl Acad. Sci. USA 15, 168–173 (1929).
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Dobson Sky Watcher 254 mm F/4.7 TV Nagler 13 mm, TV Nagler 3.5 mm, HR planetary 5 mm, Plössl 10 mm, Plössl 25 mm, Barlow TV x2 filtres Moon et OIII, Guided by Telrad