Illustration du système de Kepler-223 (W.Rebel, Wikimedia Commons) |
Pendant que la planète la plus éloignée de l'étoile parcourt 3 orbites, la planète numéro 3 en parcourt 4, la suivante 6 et la quatrième, la plus proche de l'étoile, 8. On est en présence d'une résonance gravitationnelle de type 3:4:6:8. Les résonances entre différents corps ne sont pas exceptionnelles, par exemple dans notre système solaire, Pluton et Neptune sont en résonance 2:3, mais que 4 planètes soient en résonance, voilà qui est très rare.
La raison pour laquelle les astronomes de l'université de Californie et de l'université de Chicago, qui publient leur trouvaille dans Nature cette semaine, se sont intéressés à ce système à 4 planètes est que l'on pense que chez nous, Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune ont pu être dans le passé dans des orbites résonantes, mais qui auraient été perturbées au cours de leur longue histoire.
Howard Isaacson, coauteur de l'étude, précise :"Ce système est si particulier dans le fait qu'il est verrouillé dans ses résonances qu'il suggère fortement que ces planètes se sont formées par un phénomène de migration, en se formant loin de l'étoile puis en s'en rapprochant".
Avant la découverte de nombreux systèmes exoplanétaires, les astronomes estimaient que toutes les planètes devaient se former comme l'ont fait celles de notre système. Depuis les découvertes du télescope Kepler, on sait qu'il peut exister des planètes géantes plus proches de leur étoile que ne l'est Mercure du Soleil chez nous.
Pour effectuer une analyse de stabilité et de dynamique des planètes en orbite, les astronomes ont besoin de connaître très précisément la taille de l'étoile, ce qui permet de déduire des estimations de la masse des planètes. C'est le télescope Keck hawaïen de 10 m qui a permis ces mesures.
L'équipe américaine a ensuite exploité les données de luminosité fournies par Kepler pour analyser comment évoluaient les 4 planètes autour de Kepler-223, en plus de pouvoir évaluer leur taille respective.
Pour comprendre l'architecture rare actuelle du système planétaire, les chercheurs ont par la suite effectuer d'intenses simulations numériques des interactions des planètes et de leur migration autour de l'étoile.
Ils ont ainsi pu tester un modèle de formation de planètes concernant un type de planètes que nous n'avons pas dans notre système solaire (la plus éloignée de ces 4 planètes de la taille de Neptune se trouve à seulement 0,15 fois la distance Terre-Soleil de l'étoile Kepler-223).
Les 4 planètes de Kepler-223 se trouvent comme piégées les unes par les autres, leurs orbites sont verrouillées par leurs interactions gravitationnelles mutuelles. Les astronomes estiment que ce verouillage résonant aurait pu apparaître en l'espace de seulement 150 000 ans, lorsque, en migrant en se rapprochant de l'étoile, elles se seraient trop rapprochées les unes des autres. Et les astronomes suspectent l'existence de circonstances très particulières pour qu'un tel verrouillage ait pu durer près de 6 milliards d'années (l'âge estimé de Kepler-223).
Car ce type de résonance gravitationnelle est normalement assez "fragile", des interactions extérieures pouvant facilement la disloquer.
Le système étonnant de Kepler-223 va permettre aux astronomes de mieux comprendre notre système solaire à nous. Il aurait ainsi pu débuter avec ses planètes géantes en résonance gravitationnelle à proximité du Soleil, qui auraient ensuite été perturbées par les interactions multiples de corps plus petits, dont notre planète, pour se retrouver très éloignées... Kepler-223 n'aurait pas eu cette "chance".
Source :
A resonant chain of four transiting, sub-Neptune planets
Sean M. Mills et al.
Nature online (11 mai 2016)
http://dx.doi.org/10.1038/nature17445
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