Quelle ne fut pas la surprise des spécialistes en observant en détails les images de la comète Tchouri effectuées par la sonde Rosetta : des dunes de sable ondulées y sont présentes, et elles ne peuvent être produites que par du vent, selon une étude de physiciens français.
Les images de Rosetta ont montré que par endroits, la surface de la comète était recouverte par une couche de poussière épaisse de plusieurs mètres. Mais le plus surprenant était d'y voir des dunes mouvantes (observées à 16 mois d'intervalle). Ces structures ont été vues au niveau du col de Tchouri et des deux côtés des lobes.
Non seulement des ondulations sableuses ont été observées mais aussi ce qui ressemble au déplacement de gros cailloux, qui ont laissé une trace dans la poussière derrière eux. Ces phénomènes ne peuvent avoir eu lieu que si un vent existe à la surface de la comète, d'après les chercheurs qui publient leur étude dans Proceedings of the National Academy of Science of the USA.
L'équipe du Laboratoire de Physique et Mécanique des Milieux Hétérogènes (CNRS/Université Paris Sorbonne) menée par Philippe Claudin a essayé de comprendre comment pouvait s'être formées ces structures très particulières à la surface de Churyumov-Gerasimenko ayant la forme d'ondulations sur des dunes, et qui ressemblent fortement à ce que l'on peut voir dans nos déserts de sable.
Ils ont pour cela modélisé le comportement du dégazage qui peut avoir lieu sur la comète, en fonction de son éclairement solaire. Les chercheurs montrent que le dégazage de vapeur d'eau important qui a lieu à l'approche du périhélie de la comète se répand latéralement à la surface en formant une couche gazeuse. Mais seulement du côté chauffé par le Soleil. Il en résulte une différence de pression entre zone éclairée et zone à l'ombre qui produit alors ce qui est appelé un "vent thermique" : la vapeur d'eau se déplace vers les zones de plus basse pression. Ce vent, d'après les modélisations et les expériences des physiciens pour reproduire le phénomène, est suffisamment dense pour pouvoir déplacer des grains de plusieurs centimètres dans le champ de gravité très faible qui est celui de la comète Tchouri (1/50000ème de la gravité terrestre).
Cette atmosphère transitoire est très ténue (100 000 fois moins dense que notre atmosphère) et variable en fonction de là où se trouve la comète sur son orbite, maximum lorsque la comète était au plus près du Soleil (son périhélie), mais c'est la très faible gravité sur Tchouri qui permet à ces vents eux aussi très faibles de pouvoir tout de même déplacer des petits grains de poussière/sable.
Grâce à cette étude approfondie pour comprendre les ondulations des dunes de Tchouri, les physiciens français ont développé un outil expérimental fiable pour l'étude de la cohésion des grains et les interactions grains-fluides. Il permet de prédire les processus d'accrétion et d'érosion qui contrôlent l'évolution des petits corps du système solaire, une étape clé dans la formation des planètes.
Référence
Giant ripples on comet 67P/Churyumov–Gerasimenko sculpted by sunset thermal wind
Pan Jia et al.
PNAS (21 fevrier 2017)
Illustrations
1) Dunes et traînées produites par un vent thermique observées par Rosetta le 18 septembre 2014 (ESA/Rosetta/MPS for OSIRIS Team)
2) Zone montrant des dunes (cercle rouge) (ESA/Rosetta/MPS for OSIRIS Team)
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