Une équipe d'astronomes britanniques vient de montrer que les galaxies satellites les plus faiblement lumineuses qui entourent notre galaxie sont parmi les plus vieilles galaxies de l'Univers, âgées de plus de 13,5 milliards d'années.
Notre galaxie est entourée de dizaines de petites galaxies satellites. Ce que Sownak Bose (Université de Durham et Harvard Smithonian Center for Astrophysics) et ses collaborateurs ont réussi à mettre en évidence, c'est que ces galaxies peuvent être divisées en deux populations distinctes en fonction de leur luminosité : les galaxies naines brillantes et celles qui sont faiblement lumineuses. Mais ce qu'avaient identifié les astrophysiciens anglais avant ces observations confirmant leurs simulations c'est que les deux types de galaxies naines devaient avoir une origine légèrement différente dans la chronologie cosmique.
Les premiers atomes d'hydrogène se sont formés lorsque les protons et les électrons se sont combinés environ 380000 ans après le Big Bang. Ce gaz s'est ensuite progressivement accumulé sous la forme de nuages et s'est peu à peu refroidi en s'agglomérant autour de halos de matière noire qui préexistaient depuis l'Univers primordial. Cette phase de refroidissement et de densification de l'hydrogène a duré une centaine de millions d'années, durant lesquelles aucune étoile n'existait. Finalement, les nuages d'hydrogène sont devenus instables sous leur propre masse et ont commencé à s'effondrer localement, donnant naissance aux toutes premières étoiles et donc aux toutes premières galaxies. Les âges sombres de l'Univers prenaient fin tandis que le rayonnement ultra-violet intense des premières étoiles commençait à réioniser l'hydrogène.
Or, une fois réionisés, les nuages d'hydrogène ne se comportent plus de la même façon pour produire des étoiles : devenant plus chauds et avec une plus forte pression, ils mettent plus de temps pour se refroidir et ont alors besoin de halos de matière noire plus massifs pour se condenser en étoiles. Cette seconde vague de production d'étoiles (et de galaxies) n'a ainsi pu se dérouler que quand les halos de matière noire sont devenus suffisamment massifs, près de 1 milliard d'années plus tard seulement.
Ce modèle de formation développé par Bose et ses collaborateurs, appelé Galform, évoqué dans leur article paru dans The Astrophysical Journal, colle parfaitement avec les observations qu'ils ont faites sur la fonction de luminosité des galaxies satellites et qui montrent deux populations de galaxies naines très distinctes. Ces deux populations sont totalement indépendantes des paramètres de formation galactique, et ne semblent dépendre que des caractéristiques de la phase de réionisation de l'hydrogène par les premières étoiles.
Les galaxies naines satellites faiblement lumineuses comme Segue-1, Bootes I, Tucana II ou Ursa Major I font ainsi partie de la toute première génération de galaxies, âgées donc de plus de 13,5 milliards d'années.
La distribution bimodale dans la fonction de luminosité est d'ailleurs observée non seulement dans les galaxies satellites de la Voie Lactée mais aussi dans celles de la galaxie d'Andromède. Ces galaxies naines de faible luminosité ne sont détectables que depuis une grosse dizaine d'années grâce aux progrès en sensibilité des télescopes et les Bose et ses collègues prédisent que les deux populations de galaxies pourront être mesurables dans le futur autour de galaxies de masse bien plus faible que celle de notre galaxie.
Il est en tous cas remarquable que des observations des petites galaxies les plus faiblement lumineuses entourant notre galaxie nous permettent d'étudier les premières centaines de millions d'années de l'Univers, cette époque encore mal connue de la réionisation de l'hydrogène.
Source
The Imprint of Cosmic Reionization on the Luminosity Function of Galaxies
Sownak Bose, Alis J. Deason, and Carlos S. Frenk
The Astrophysical Journal, Volume 863, Number 2 (16 august 2018)
Illustration
Distribution calculée des différentes populations de galaxies satellites autour d'une galaxie massive comme la Voie Lactée, les galaxies très faiblement lumineuses et très âgées sont figurées par les cercles blancs (Institute for Computational Cosmology, Durham University/ Heidelberg Institute for Theoretical Studies / Max Planck Institute for Astrophysics)
3 commentaires :
Plus d un mois sans lire vos nouveaux articles ! Que ce fut long 😊
Et pour un retour aux affaires quel bel article offrant à réflexion.
Merci 🤗
Merci pour cet article très intéressant, un des premiers que j'ai l'occasion de lire relatif à des galaxies très anciennes et... très proches.
Les galaxies lointaines et anciennes sont repérées par leur redshift élevé, mais pour des galaxies proches, savez-vous quelle est la technique utilisée ? (température plus basse sur un spectrogramme ?)
Les galaxies lointaines ne sont pas anciennes, elles sont JEUNES mais leur lumière à mis énormément de temps à nous parvenir ici et maintenant ! Les vieilles galaxies qui existent aujourd'hui dans l'Univers proche contiennent par définition des étoiles âgées. C'est leurs particularités spectrales (couleur vs. luminosité ainsi que leur métallicité (taux d'atomes lourds)) qui donne une indication sur leur âge.
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