mardi 19 mai 2015

Observation d'une nouvelle classe de galaxies, ultra diffuses...

Il y a quelques jours, je vous racontais la découverte d'objets étonnants remettant en cause les modèles de formation des grandes structures, un quatuor de quasars. Et bien les petites découvertes passionnantes d'objets étranges semblent être de saison, car c'est au tour cette fois-ci d'une toute nouvelle classe de galaxies de faire son apparition.



La galaxie ultra diffuse Dragonfly 44, trouvée dans l'amas du Coma
(P. VAN DOKKUM, R. ABRAHAM, J. BRODIE)
C'est dans un article publié dans the Astrophysical Journal Letters le 1er mai dernier qu'une équipe américaine annonce avoir observé une petite population de galaxies très curieuses, car très très peu denses. On les appelle désormais des UDG (Ultra Diffuse Galaxies). Pieter Van Dokkum, de l'université de Yale à exploité deux télescopes avec son équipe : un tout petit télescope d'un côté, qui est appelé le Dragonfly Telephoto Array, une sorte de gros objectif photo de 14 cm de diamètre, et de l'autre côté, le télescope Keck I de 10 m, qui avait permis l'observation du quartet de quasars que j'évoquais en introduction.

Ces galaxies étranges sont aussi vastes que notre Voie Lactée ou presque, avec par exemple une taille de 60000 années-lumière pour celle qui a été la plus étudiée, Dragonfly 44, mais en revanche, elles ne possèdent que 1% de son nombre d'étoiles, l'équivalent d'une galaxie naine elliptique ! Les astrophysiciens, après avoir confirmé qu'il s'agissait bien de galaxies, grâce à des mesures spectroscopiques de leur composition et de distance à l'aide du Low Resolution Imaging Spectrometer (LRIS) monté au foyer du télescope Keck I , essayent de déterminer comment des telles galaxies peuvent exister, car le plus surprenant est que ces maigrelettes ont survécu dans un environnement galactique plutôt propice au démembrement.
Pour les expliquer, les auteurs évoquent le fait que ces galaxies seraient enfouies dans un épais cocon de matière noire qui les aiderait à résister aux assauts gravitationnels des galaxies voisines.
Comparaison à l'échelle d'une galaxie ultra-diffuse,
de la galaxie d'Andromède et d'une galaxie naine
elliptique contenant le même nombre d'étoile qu'elle
(B. SCHOENING, V. HARVEY/
REU PROGRAM/NOAO/
AURA/NSF, P. VAN DOKKUM/HST)
Ces quelques galaxies ultra-diffuses ont toutes été observées dans un amas de galaxies qui est appelé l'amas de Coma, situé à 300 millions d'années-lumière et où se côtoient plusieurs centaines de galaxies (dans la constellation de la Chevelure de Bérénice).

L'autre grande question que se posent les astronomes est : quelle est l'origine de ces galaxies ultra diffuses ?... Sont-elles des sortes de galaxies "ratées" qui sont tombées en panne de gaz, ou bien étaient-elles normales avant de connaitre une série de collisions destructrices ? Ou encore, sont-elles des galaxies qui ont été expulsées d'un amas, comme nous en avons également déjà parlé ici, mais qui se seraient retrouvées dans un autre amas ? 
On le voit, cette découverte pose plus de questions qu'elle n'apporte de réponses, et l'une des clés de l'énigme réside peut-être dans la quantification du contenu en matière noire de ces objets. Mais il semble que cette détermination, qui pourrait se faire par des mesures de dynamique (vitesses de rotation ou autre), soit encore plus compliquée que de découvrir d'autres galaxies de ce type.

Les galaxies ultra diffuses viennent en tous cas compléter la grande famille des galaxies, depuis les naines ultra-compactes de quelques milliers d'étoiles, jusqu'aux elliptiques géantes de plusieurs milliers de milliards d'étoiles en passant par les galaxies lenticulaires et les galaxies spirales comme la nôtre... Une famille qui ne nous a probablement pas encore présenté tous ces rejetons.


Source : 
Spectroscopic Confirmation of the Existence of Large, Diffuse Galaxies in the Coma Cluster
Pieter Van Dokkum et al. 
The Astrophysical Journal Letters Volume 804 Number 1  (1 mai 2015) 

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