Parmi
les 32000 étoiles naines blanches connues, l’une d’entre elles vient d’être
observée ayant une atmosphère composée presque exclusivement d’oxygène. Une composition unique qui ouvre des
perspectives sur les modèles d’évolution d’étoiles.
Une
naine blanche est ce à quoi ressemblera toute étoile « normale » du
genre de notre soleil, quand celle-ci aura consommé la majorité de son
hydrogène et de son hélium en son cœur. Cela concerne les étoiles de masse
inférieure à quelques masses solaires, les étoiles plus massives terminant leur
vie en supernova. Avant de devenir une naine blanche d’à peine 1,4 masse
solaire au maximum et de diamètre semblable à celui de la Terre seulement,
l’étoile éjecte une grande partie de son enveloppe gazeuse. La naine blanche
résiduelle peut ainsi être vue comme le cœur de l’étoile mis à nu.
Vue d'artiste du couple Sirius A et B, Sirius B (à droite) est une naine blanche |
Les
naines blanches étant extrêmement denses (la masse du soleil dans le volume de
la Terre), leur composition se retrouve stratifiée : les éléments les plus
lourds au centre et les plus légers à l’extérieur. Les éléments lourds en
question sont les produits de la fusion de l’hélium : carbone et oxygène,
les plus légers sont l’hélium et l’hydrogène, dont il reste toujours une
certaine proportion. 80% des naines
blanches ont une atmosphère dominée par l’hydrogène, les autres 20% montrant
une atmosphère d’hélium.
Mais
la naine blanche que les astrophysiciens menés par le brésilien Kepler de Souza
Oliveira (Universidade Federal do Rio Grande do Sul à Porto Allegre) (qui signe
« S.O. Kepler », la classe…), possède une très curieuse
particularité : on y trouve dans ses couches externes (son
« atmosphère ), quasi-uniquement de l’oxygène. Les autres éléments
les plus abondants qui y sont détectés sont du néon (25 fois moins que
l’oxygène) et du magnésium (55 fois moins) avec quand même un peu d’hélium (30
fois moins que l’oxygène).
Cette
naine blanche, nommée SDSS J1240+6710, est très inhabituelle, pour ne pas dire
anormale, et ne correspond pas au modèle d’évolution d’une étoile seule. Sa composition indique que ses couches
externes d’hydrogène, d’hélium et de carbone ont dû être détruites ou chassées
durant la formation de la naine blanche. D’autre part, les modèles de naines
blanches prédisent que les rares qui
produisent du néon et du magnésium
doivent être les plus massives, or cette étoile a une masse tout à fait moyenne
pour une naine blanche.
Un
fait plus troublant encore est que les astrophysiciens trouvent aussi des
traces de silicium (un ratio O/Si de 3200), le silicium qui est un produit non
plus de la fusion du carbone, mais de la fusion de l’oxygène lui-même, ce qui
est tout à fait atypique chez les naines blanches puisque le début de la fusion
de l’oxygène dans une naine blanche doit, selon les modèles théoriques,
conduire inéluctablement vers un effondrement en une étoile à neutrons. Il se
pourrait ainsi que SDSS J1240+6710 ait brûlé partiellement son oxygène en étant
à la limite de s’effondrer en étoile à neutrons, ou bien qu’elle soit associée
à une étoile compagne ayant eu un effet non négligeable sur son évolution. Les
questions sont posées, les réponses sont à venir.
La
recherche systématique de phénomènes transitoires mène aujourd’hui à la
découverte de toujours plus de supernovas et les spécialistes découvrent
toujours plus de variété dans les supernovas par effondrement de cœur. Les
chercheurs pensent que cette naine blanche surprenante pourrait donner un début
d’éclaircissement sur certaines supernovas découvertes dans la dernière
décennie qui ont montré la présence de compositions chimiques exotiques dans
leurs résidus.
Il
est remarquable que la découverte de cette étoile naine blanche surprenante ait
été faite par Kepler de Souza Oliveira et ses collègues avec un instrument qui
n’était pas dédié au départ à la recherche de ce type d’objets. Ils ont simplement
exploité la possibilité de traiter des centaines de milliers ou millions de spectres engrangés
depuis plus de 15 ans par le Sloan Digital Sky Survey en laissant faire le
hasard de la comparaison de milliers de données entre elles.
SDSS
J1240+6710 devrait maintenant être suivie de plus près en spectroscopie visible
et UV pour essayer de parfaire les mesures d’abondances d’autres produits de
fusion nucléaire, comme le soufre ou le phosphore, qui devraient permettre de
mieux comprendre ce qui a bien pu se passer sur cette étoile mourante. La détection
d’une éventuelle étoile compagne pourrait également permettre d’éclaircir en
partie ce mystère.
Source :
A white dwarf with an oxygen atmosphere
S. O. Kepler et al.
Science 01 Apr 2016: Vol. 352,
Issue 6281, pp. 67-69
2 commentaires :
Un commentaire pour l'ensemble que je viens de découvrir.
Super intéressant,on peut écouter, lire, apprendre...le bonheur.
bonne continuation.
Stef
Merci à vous.
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