Notre galaxie contient de nombreux amas globulaires, des amas sphériques de plusieurs centaines de milliers voire plusieurs millions d’étoiles. Les amas globulaires sont les plus vieux systèmes stellaires connus, composés d’étoiles très vieilles qui datent de la naissance des galaxies il y a 12 à 13 milliards d’années. La mesure des vitesses individuelles des étoiles dans ces amas est rendue difficile par la présence fréquente de poussières et la surpopulation stellaire dans les régions où ils se trouvent. Et pourtant, les paramètres dynamiques à l’intérieur des amas globulaires sont cruciaux à connaître pour pouvoir déterminer leur structure centrale et notamment si ils abritent ou non un objet compact de type trou noir.
Terzan 5, c’est le nom de cet amas globulaire situé en bordure du bulbe de notre galaxie, à 5,9 kpc de nous (19000 années-lumière), contient 37 pulsars connus. Les astronomes américains en ont exploité 36, en mesurant leurs ondes radio avec le radiotélescope Green Bank Telescope (Virginie) de 100 m de diamètre de la National Science Foundation américaine. Le premier pulsar à avoir été détecté dans l’amas Terzan 5 remonte à 1990 et on en découvre un nouveau presque tous les ans. Terzan 5 à lui seul contient 25% de tous les pulsars qui ont été découverts depuis trente ans dans des amas globulaires (146 au jour de la publication de cet article).
Les chercheurs montrent dans leur étude parue le 21 août dans The Astrophysical Journal comment ils parviennent à déduire la forme du potentiel gravitationnel de Terzan 5 grâce à l’effet Doppler qui produit de légers décalages temporels dans la pulsation radio des pulsars lorsqu’ils s’éloignent ou se rapprochent de nous au sein de l’amas. Il s’agit ici de pulsars « millisecondes », dont la période de rotation est de quelques millisecondes seulement. Ils font donc un tour sur eux-mêmes entre 12 fois pour le plus lent (80 ms) et 714 fois par seconde pour le plus rapide (1,4 ms). Ces pulsars très rapides sont le plus souvent rencontrés dans des amas globulaires, là où la densité en étoiles est extrême. C’est en effet par interaction avec des étoiles voisines, que ces pulsars s’associent en couples binaires et peuvent alors accréter de la matière à leur compagne, ce qui leur fournit par là-même un surplus de moment cinétique et une accélération phénoménale. Ces pulsars sont utilisés par les chercheurs comme de véritables horloges cosmiques. La moindre petite variation de la période de pulsation signe la vitesse et l’accélération du pulsar dans la direction de la ligne de visée.
A partir des paramètres dynamiques mesurées, Brian Prager et ses collègues construisent une carte de la densité de l’amas globulaire. Ils mesurent une densité du cœur de l’amas globulaire qui vaut 1,58 millions de masses solaires par parsec cube pour un rayon de cœur de 0,16 pc (0,5 années-lumière). A partir du profil de densité qui est déduit, les chercheurs calculent la masse totale de l’amas et trouvent une valeur de 350 000 masses solaires. Ils montrent surtout qu’il ne peut pas exister de trou noir supermassif au cœur de Terzan 5. Il s’agirait donc d’un véritable amas globulaire et non d’un résidu de galaxie naine comme certains spécialistes le pensaient. Mais les données ne permettent tout de même pas d’exclure complètement la présence d’un objet compact. En fait, les chercheurs parviennent à fixer une limite supérieure pour la masse d’un éventuel trou noir central, et cette masse est relativement faible : 27000 masses solaires. Au mieux, si un trou noir est présent au centre de Terzan 5, il s’agirait donc d’un trou noir de masse intermédiaire.
La mesure des accélérations des pulsars millisecondes s’avère une méthode efficace pour estimer des masses et des potentiels gravitationnels dans les amas globulaires. Nul doute qu’elle sera exploitée à nouveau dans d’autres amas globulaires dès que leur population de pulsars détectés aura grossi suffisamment.
Source
Using Long-term Millisecond Pulsar Timing to Obtain Physical Characteristics of the Bulge Globular Cluster Terzan 5
Brian J. Prager, Scott M. Ransom, Paulo C. C. Freire, Jason W. T. Hessels, Ingrid H. Stairs, Phil Arras, and Mario Cadelano
The Astrophysical Journal, Volume 845, Number 2 (21 august 2017)
Illustrations
1) L'amas globulaire Terzan 5 imagé par le télescope Hubble (F. Ferraro / NASA / ESA / ESO.)
2) Le radiotélescope Green Bank Telescope (NRAO)
3 commentaires :
Bonjour,
Je ne comprend pas bien les chiffres suivants donnés par les auteurs : densité du coeur 1.58e6 Mo.pc^-3 et rayon du coeur 0.16 pc, soit un volume du coeur de 0.32pc^3 et une masse du coeur de 5e5 Mo, donc plus que la masse totale (3.5e4 Mo à un rayon de 1 pc) ? S'agit-il d'une densité du centre du coeur ?
Même si l'amas était un résidu de galaxie naine, un trou noir central de plus de 27000 Mo serait surprenant, représentant 7.7% de la masse du bulbe alors que ce rapport est généralement de l'ordre de 0.1% ? Sauf à considerer qu'il ne reste qu'une fraction minime de la masse initiale ? Ou/et que la galaxie naine a été phagocytée à une époque où ce rapport était plus important que 0.1% ?
Pour finir les auteurs s'interrogent sur l'origine des pulsars observés (plus exactement de l'étoile à neutron actuellement au stade de pulsar millisec): quelle alternative à la capture d'électrons ? Et pourquoi sont-ils si nombreux dans cet amas-là (25% de tous les pulsars d'amas) ?
Ce qui est appelé "core", le coeur, fait 0.16 pc de rayons. On parle bien de densité du coeur. Si vous multipliez cette densité de 1.58E6 par le volume de la sphère de rayon 0.16 pc, vous trouverez 27000 masses solaires. La masse comprise dans le rayon de 1 pc est la masse totale de l'amas.Et Oui, si cela avait une galaxie naine, il se serait agi d'un résidu avec seulement la partie centrale entourant le TN.
Oups, petit bug dans mon calcul de volume (et non de surface !), le coeur fait bien 27000 Mo, donc plus de problème... Merci !
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