Et de quatre ! C'est donc officiel, l'interféromètre européen vient de détecter sa première fusion de trous noirs par la détection de leurs ondes gravitationnelles. Pour la première fois, cette détection a été faite avec trois interféromètres simultanément : VIRGO et les deux LIGO et ils permettent une localisation de l'événement bien plus précise que ce que pouvait offrir LIGO seul.
Il s'appelle GW170814, il a donc été détecté le 14 août 2017 par les deux interféromètres américains ainsi que l'européen situé en Italie près de Pise. Il s'agit de la coalescence de deux gros trous noirs situés à 1,8 milliards d'années-lumière : 30,5 et 25,3 masses solaires, donc à nouveau des trous stellaires plutôt gros... Leur fusion a produit une perte de masse totale de 3 masses solaires, converties en ondes gravitationnelles.
Le détecteur VIRGO était entré en service le 1er août pour rejoindre LIGO et son run 2, qui a pris fin le 25 août. Il n'aura donc pas fallu attendre longtemps pour voir cette nouvelle coalescence. La grande nouveauté ici c'est bien sûr la détection coïncidente des trois détecteurs qui se trouvent sur des continents différents, et qui permettent donc, par une méthode "classique" de triangulation, de pouvoir localiser plus finement la région d'où nous sont parvenues ces ondes gravitationnelles. La zone d'origine de ces ondes gravitationnelles représente une surface de seulement 60 degrés², alors qu'avec LIGO tout seul, cette région aurait fait 1160 degrés²! On comprend tout de suite l’intérêt de faire travailler ensemble les différents interféromètres.
La découverte va être publiée dans Physical Review Letters sous peu. Pour la première fois, et grâce à l'utilisation du trio de détecteurs, les physiciens arrivent à mesurer la polarisation des ondes gravitationnelles. Une prédiction de la relativité générale est en effet que les perturbations de la métrique possèdent deux degrés de liberté tensoriels, qui sont un sous-ensemble des six modes indépendants permis par les théories génériques de gravitation, qui peuvent prédire n'importe quelle combinaison de polarisations tensorielles, vectorielles ou scalaires. Les physiciens gravitationnels de LIGO et VIRGO, en exploitant la projection du train d'ondes gravitationnelles sur les trois interféromètres, montrent avec des tests statistiques avancés que c'est une polarisation purement tensorielle qui a été détectée. Ils confirment également ce qui était attendu : que la nature de la polarisation joue énormément sur la reconstruction de la distance et de la localisation de la source d'ondes gravitationnelles. Ces mesures de polarisation n'avaient pas pu être menés dans les précedentes détection de LIGO seul car les deux interféromètres américains sont quasi alignés et mesurent donc la même combinaison de polarisations.
Les chercheurs des deux collaborations ont annoncé cette belle découverte lors d'une conférence de presse aujourd'hui et annoncent dès maintenant de nouvelles détections dans un avenir très proche, à partir des analyses du run 2 qui sont encore en cours.
« Ce n'est que le début des observations du réseau formé par les détecteurs Virgo et LIGO fonctionnant de concert », précise David Shoemaker du MIT et porte-parole de la collaboration LIGO. « Lors de la prochaine période d'observation, prévue pour démarrer à l'automne 2018, nous nous attendons à enregistrer de telles détections toutes les semaines et peut-être même plus souvent ».
Source
GW170814 : A three-detector observation of gravitational waves from a binary black hole
coalescence
The LIGO Scientific Collaboration and The Virgo Collaboration
à paraître dans Physical Review Letters
https://dcc.ligo.org/LIGO-P170814/public/main
Illustrations
1) Localisation de l'événement GW 170814 (LIGO, VIRGO collaborations)
2) Signaux détectés par les trois interféromètres de LIGO+VIRGO
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