C'est certainement la découverte importante de cet été. On ne pouvait pas faire notre rentrée sans en parler. Des galaxies très massives et très lointaines ont été découvertes alors qu'on ne s'attendait pas à les trouver à une telle époque cosmique. Une étude parue le 7 août dans Nature et dont l'astrophysicien français David Elbaz est co-auteur.
C'est avec le réseau interférométrique ALMA que les astrophysiciens ont découvert cette population de galaxies invisibles par d'autres télescopes du fait d'une très forte atténuation par la poussière interstellaire.
Ces galaxies se situent à une époque où l'Univers n'a que 2 milliards d'années. Mais elles sont déjà très matures, aussi grandes que notre galaxie. Leur nombre est 10 fois plus grand que toutes celles que nous connaissions à cette époque cosmique. Jusqu'alors, les galaxies qui ont été observées quand l'Univers n'avait que 2 milliards d'années étaient avant tout des toutes petites galaxies, ainsi que quelques spécimens à flambée d'étoiles, des galaxies produisant des étoiles à un taux qui peut dépasser 500 masses solaires par an. Le fait de trouver 39 grandes galaxies à cette époque pose de grandes questions aux spécialistes car c'est en contradiction avec les modèles de formation galactique
Le télescope spatial Spitzer avait repéré des taches en infra-rouge dans des zones isolées dans les images profondes de Hubble. Les chercheurs se sont donc intéressés à 63 sources infra-rouge de Spitzer en exploitant la puissance de résolution spatiale qu'offre ALMA en ondes sub-millimétriques, juste au dessus de l'infra-rouge en longueur d'onde (à 0,87 mm pour être exact). Sur les 63 sources infra-rouges de Spitzer, 39 se sont révélées être des galaxies, très lointaines et très riches en poussière. C'est l'échauffement de la poussière qui la fait rayonner en infra-rouge, cette poussière est fortement échauffée par le rayonnement UV des étoiles en train de naître (de l'ordre de 200 masses solaires par an). L'infra-rouge est ensuite décalé vers les ondes millimétriques par l'expansion cosmique.
C'est la présence de cette grande quantité de poussière qui fait dire à Tao Wang (Institute of Astronomy, Université de Tokyo) et à ses collaborateurs qu'il s'agit de galaxies massives. Ces galaxies forment en quelque sorte le chaînon manquant entre les différentes populations de galaxies déjà connues à ces distances.
Il ne reste plus qu'à réviser les modèles théoriques de formation de galaxies pour parvenir à expliquer l'existence de ces grosses galaxies aussi tôt dans l'histoire de l'Univers. Les chercheurs rêvent déjà au futur télescope Webb, avec un lancement prévu en 2021, qui est justement optimisé pour observer ces galaxies dans l'infra-rouge lointain.
Source
A dominant population of optically invisible massive galaxies in the early Universe
T. Wang, et al.
Nature volume 572 (7 august 2019)
Illustration
Exemple de détection de nouvelles galaxies lointaines par ALMA. A gauche, la région du ciel observée par le satellite Hubble dans le domaine visible. Les cercles blancs marquent la position des galaxies détectées en rayonnement millimétrique par ALMA dont les images sont montrées à droite. Ces galaxies sont totalement invisibles dans l'image Hubble (T. Wang/ALMA)
2 commentaires :
Bonjour,
Donc il y a plus de matière que prévu dans l'univers ? Donc moins de matière noire que ce que l'on croyait ? Ou alors parlons-nous de masses d'un faible ordre de grandeur ?
Merci,
Bien à Vous,
Frank
N'oubliez pas que toute ces galaxies contenant de la matière baryonique (ordinaire), contiennent aussi une très grande quantité de matière noire. Donc il n'y a rien de changé dans la répartition de matière/matière noire par le fait de cette population de galaxies.
Enregistrer un commentaire