jeudi 21 mai 2020

Une répétition périodique pour le sursaut radio rapide FRB 121102 ?


Les Fast Radio Bursts (FRB), sursauts rapides d'ondes radio qui ne durent que quelques millisecondes, sont aujourd'hui encore les sources de rayonnement les plus mystérieuses car on n'arrive pas à comprendre leur origine, malgré de nombreuses pistes. Certains FRB apparaissent répétitifs dans le temps mais la plupart n'ont été détectés qu'une seule fois. Quelques uns d'entre eux ont aussi pu être localisés dans des galaxies lointaines mais la plupart non. Le premier FRB a avoir été détecté se répétant est FRB 121102. Aujourd'hui, en analysant toutes les données accumulées sur ce sursaut radio, une équipe internationale en déduit que ses répétitions sont périodiques, et qu'il devrait très bientôt être détectable.... Une étude parue dans les Monthly Notices of the Royal Astronomical Society.



FRB 121102 a été détecté pour la toute première fois le 2 novembre 2012 par le radiotélescope Parkes en Australie. Depuis lors, le signal s'est répété plusieurs fois, et même de nombreuses fois. A tel point que certains spécialistes pensent que ce FRB n'est pas tout à fait comme les autres. Les premières hypothèses qui avaient été émises après la découverte du premier FRB en 2007 pour expliquer de tels sursaut radio très courts était une origine cataclysique, destructif. Mais la découverte de FRB 121102, suivi quelques années après par 19 autres spécimens répétitifs eux aussi a fortement remis en cause un processus destructeur comme origine de ces sursauts.  
Une des voies très intéressantes pour essayer de comprendre l'origine des FRB est d'analyser en détails les signaux de ceux d'entre eux qui se répètent, au premier des rangs desquels FRB 121102. C'est ce qu'ont fait Kaustubh Rajwade (Jodrell Bank Centre for Astrophysics, University of Manchester) et ses collaborateurs américains hollandais et sud-africains.
Les chercheurs ont observé la galaxie où se trouve FRB 121102 avec le radiotélescope Lovell de 76 m de l'observatoire de Jodrell Bank à une cadence très élevée, d'abord hebdomadaire puis quotidienne durant près de deux ans. Ils ont ensuite compilé les signaux radio très courts qu'ils ont détectés avec tous ceux qui avaient été enregistrés sur ce sursaut radio depuis sa découverte.  
Sur une plage de 5 ans en tout, Rajwade et ses collaborateurs détectent un motif dans les signaux : une répétition périodique de groupes de pulses répétitifs. Cette étude est d'autant plus intéressante qu'un autre FRB (FRB 180916) a semble-t-il été détecté avec une répétition périodique, sur 28 sursauts, par la collaboration CHIME/FRB en janvier 2020 (article en préprint non encore accepté pour publication), une période de 16,35 jours.
Mais ici, avec FRB 121102, le nombre de sursauts détectés est beaucoup plus important et s'étale sur une durée beaucoup plus longue.
Lorsqu'ils ont tracé les sursauts détectés en fonction du temps et de leur intensité (leur rapport signal/bruit), Rajwade et ses collaborateurs ont tout de suite vu que les sursauts étaient regroupés par paquets séparés par des durées multiples d'une valeur fixe. Mais l'oeil humain ne suffisant pas et pouvant être trompé par les apparences, les radioastronomes ont effectués des analyses statistiques des pour savoir avec quelle probabilité une répartition qui serait purement aléatoire pourrait former les motifs qui sont observés. La probabilité que la distribution temporelle des sursauts radio de FRB121102 soit dûe à une apparition aléatoire est très faible d'après Rajwade et ses collaborateurs, même si elle n'est pas à exclure. Dans l'apparition de ces sursauts radio rapides, il y aurait une période de 157 jours. Et les chercheurs trouvent que la période active correspond à 56% du temps, contre 44% pour la période inactive. En d'autre termes, les périodes d'apparition des sursauts radio de FRB 121102 reviennent tous les 157 jours et durent 88 jours, puis sont suivies par une période silencieuse de 69 jours... 
Rajwade et ses collaborateurs indiquent que nous serions donc dans la phase calme de FRB121102 et que la prochaine plage de sursauts radio devrait arriver sous peu : environ le 2 juin pour durer jusqu'au 28 août 2020. Il était temps de publier cette étude pour que les radiotélescopes adaptés aux fréquences des FRB puissent faire un monitoring et confirmer la prédiction précise de Rajwade et son équipe.
Les chercheurs ont calculé ce qu'il faudrait pour détecter des périodes de ce type dans des signaux de FRB, des périodes comprises entre 10 et 150 jours. Avec une cadence d'observations comprise entre 2 fois par jour et tous les 3 jours, il faudrait au moins 100 heures de temps de télescope pour faire un monitoring efficace, ce qui devrait être accessible à la plupart des radiotélescopes à antenne unique ou aux réseaux interférométriques. Ils notent également que les observations qui ne détectent rien sont très importantes à prendre en compte pour tracer l'évolution de l'activité dans le temps d'un FRB. 

Si les périodes d'activité de 157 jours de FRB 121102 et de 16,3 jours de FRB 180916 se confirment, cela signifierait l'existence d'une large plage de périodes possibles pour ce phénomène FRB, remettant un peu plus de mystère dans l'affaire car montrant du mal à le réconcilier avec une des hypothèses qui étaient avancées, celle de la précession de magnétars. Comme souvent, de nombreuses autres observations devront être effectuées avant de pouvoir conclure sur une origine.


Source

Possible periodic activity in the repeating FRB 121102
K M Rajwade et al.
Monthly Notices of the Royal Astronomical Society (19 May 2020)


Illustrations

1) Le radiotélescpe de Jodrell Bank (Université de Manchester)

2) Distribution dans le temps des sursauts rapides de FRB121102 et en fonction de leur rapport signal sur bruit (K M Rajwade et al.)

1 commentaire :

Youx a dit…

Bonjour Eric,
Une focalisation aux pôles et un mouvement de précession?