04/02/23

Découverte d'une nouvelle planète de type Terre dans la zone tempérée autour d'une naine rouge


Une équipe d'astronomes vient de découvrir une exoplanète de masse terrestre en orbite dans la zone habitable de l'étoile naine rouge Wolf 1069. Bien que la rotation de cette planète soit probablement bloquée par effet de marée, montrant toujours la même face vers son étoile, elle pourrait offrir des conditions habitables durables sur une large zone de son côté jour et l'absence de toute activité stellaire apparente augmente les chances que Wolf 1069 b ait pu conserver une grande partie de son atmosphère, faisant d'elle une cible prometteuse pour la recherche de marqueurs d'habitabilité et de biosignatures. L'étude est publiée dans Astronomy&Astrophysics.

Sur les plus de 5 000 exoplanètes que les astronomes ont découvertes jusqu'à présent, seulement 1,5 % environ ont des masses inférieures à 2 masses terrestres. À peine une douzaine d'entre elles peuplent la soi-disant zone habitable circumstellaire, la zone d'un système planétaire où l'eau peut maintenir une forme liquide à la surface de la planète. Wolf 1069 b a été découverte par la méthode de la vitesse radiale, dans laquelle le mouvement de l'étoile est perturbé de manière infime par la présence d'une planète en orbite. Infime mais détectable. Et les chercheurs peuvent déterminer ensuite plusieurs paramètres physique concernant la planète. Celle-ci a une masse minimum de 1,26 +/- 0,21 masses terrestre (dépendant de l'angle d'inclinaison du système). Son rayon est estimé à environ 1,08 rayons terrestres. Elle tourne autour de son étoile 15,564 +/- 0,015 jours seulement, ce qui implique qu'elle se trouve à une distance (demi-grand axe) de 0,0672 +/- 0,0014 Unités Astronomiques de Wolf 1069. Elle est donc très proche de l'étoile, mais comme il s'agit d'une naine rouge de 3158 K de température qui possède une luminosité de 0,00294 fois la luminosité solaire, avec une masse de seulement 0,167 masse solaire (et un rayon de 0,18 rayon solaire), Diana Kossakowski (Max-Planck-Institut für Astronomie) et ses collègues calculent que le la puissance de rayonnement que reçoit Wolf 1069 n'est que d'un quinzième de la puissance reçue sur Terre par le rayonnement solaire, et que la température à la surface de cette planète tellurique doit être de 250 +/- 7 K (-23 + /- 7 °C). 
Et ce monde se trouve à 31 années-lumière de chez nous. Bien sûr, il faut plus que de l'eau liquide pour constituer une planète habitable. Comme sur Terre, une atmosphère qui provoque un effet de serre naturel peut contribuer à élever la température moyenne au-dessus des 250 Kelvin calculés pour Wolf 1069 b pour une simple planète rocheuse nue. En fait, Kossakowski et son équipe ont calculé que si elle avait une atmosphère semblable à la Terre, la température moyenne pourrait monter jusqu'à 286 K (+13 °C), gardant l'eau liquide sur une grande région du côté de la planète faisant face à l'étoile. Sur la base de simulations utilisant des modèles climatiques complexes, l'équipe conclut que la planète pourrait maintenir des températures modérées et de l'eau liquide de surface pour un large éventail de conditions atmosphériques et de types de surface.
De plus, une telle atmosphère protégerait contre les rayonnements électromagnétiques à haute énergie et les particules provenant soit de l'espace interstellaire, soit de l'étoile. Les étoiles naines rouges, en particulier, sont connues pour leur activité entraînant des vents stellaires massifs et un rayonnement UV intense. Semblables à ce que le Soleil a fait à Mars lorsqu'elle a perdu son champ magnétique, ils peuvent éroder l'atmosphère d'une planète, ce qui rend leurs surfaces stériles. Contrairement, par exemple, à Proxima Centauri qui apparaît très violente en terme d'éruptions de particules ionisantes, Wolf 1069 semble très calme. Les observations n'indiquent aucun type d'activité stellaire nuisible. Si Wolf 1069 b avait développé et maintenu une atmosphère très tôt, elle aurait dû la conserver jusqu'à aujourd'hui, surtout si la planète a un champ magnétique similaire, voire un peu plus faible que celui de la Terre, qui la protège des particules de vent stellaires chargées. Bien que cette idée soit un peu spéculative, le raisonnement de Kossakowski et ses collaborateurs paraît solide. Leurs simulations montrent qu'environ 5% de tous les systèmes planétaires en évolution autour d'étoiles de faible masse, telles que Wolf 1069, se retrouvent avec une seule planète détectable.  Les simulations révèlent également une étape de rencontres violentes avec des embryons planétaires lors de la construction du système planétaire, conduisant à des impacts catastrophiques occasionnels. Or, ces événements provoquent des échauffements intenses, ce qui implique que le noyau planétaire résultant devrait encore être chaud et liquide aujourd'hui, fournissant alors une dynamo qui produit un champ magnétique global similaire à la Terre. Wolf 1069 b semble être l'une de ces rares planètes solitaires. Sur la base de leurs mesures, les chercheurs excluent en effet des planètes supplémentaires qui auraient au moins une masse terrestre et des périodes orbitales de moins de dix jours. Mais ils ne peuvent pas exclure des planètes qui seraient sur des orbites plus larges. 
De par sa grande proximité à son étoile, Wolf 1069 b possède une propriété particulière qu'elle partage avec pratiquement toutes les planètes dans la zone "habitable" des étoiles naines rouges. Sa rotation est verrouillée par les effets de marées sur son orbite autour de l'étoile hôte. En d'autres termes, une rotation autour de son axe prend autant de temps qu'un tour complet autour de l'étoile (comme c'est le cas de la Lune autour de la Terre). Comme le même côté fait toujours face à l'étoile, il connaît un jour éternel, alors qu'il fait toujours nuit sur l'hémisphère opposé. L'efficacité du verrouillage de marée dépend de la distance de l'étoile et de sa masse. Pour les étoiles naines rouges, cette gamme coïncide largement avec l'emplacement de la zone habitable. En conséquence, les conditions potentiellement habitables sur ces planètes ne se produisent que dans une zone confinée du côté jour de la planète. Dans le cas de Wolf 1069 b, avec la présence d'une atmosphère terrestre, la zone qui aurait une température supérieure à 273 K (0°) s'étendrait entre -60° et 60° de latitude et entre -60° et +60° de longitude, ce qui fait plus de la moitié de la surface de l'hémisphère diurne.
Avec une distance de 31 années-lumière, Wolf 1069 b est donc la sixième planète de masse terrestre la plus proche dans la zone habitable de son étoile hôte, les 5 autres étant  Proxima Centauri b, GJ 1061 d,
Teegarden c, et GJ 1002 b et c. En raison de ses perspectives favorables en matière d'habitabilité, Wolf 1069b fait désormais partie du petit groupe de planètes, telles que Proxima Centauri b, TOI-700 d et TRAPPIST-1 e, qui seront des cibles pour la recherche future de biosignatures...

Source

The CARMENES search for exoplanets around M dwarfs. Wolf 1069 b: Earth-mass planet in the habitable zone of a nearby, very low-mass star
Diana Kossakowski et al
Astronomy&Astrophysics (february 2023)

Illustration

Carte de température calculée sur l'ensemble de la surface planétaire avec l'hypothèse d'une atmosphère de type terrestre (Diana Kossakowski et al.)

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