La
sonde Cassini arrivée autour de Saturne en juin 2004, s’est donc particulièrement
intéressée à cette lune saturnienne. Cassini a notamment fait une belle découverte
en 2006 en montrant l’existence de sortes de geysers au niveau du pôle sud de
Encélade.
Piqués par cette trouvaille
indécelable depuis la Terre, les planétologues ont voulu comprendre l’origine
du phénomène. La sonde Cassini a donc été utilisée spécifiquement pour
inspecter de très près Encélade et ses geysers. Et ce qu’elle a découvert est
très intéressant.
La surface de Encélade est
couverte de glace d’eau. Il serait tentant de savoir si sous cette eau solide
pourrait se trouver de l’eau liquide, et si ces geysers ne seraient pas simplement
des projections d’eau. Et il se trouve qu’effectivement, ces geysers sont
composés de vapeur à base organique, de l’eau sale en quelque sorte.
Les fissures bleutées qui apparaissent sur Encélade permettraient une évaporation d'un océan profond (crédit : Cassini Imaging Team/SSI/JPL/ESA/NASA) |
Lors de la 44ème Lunar
and Planetary Science Conférence, fameuse conférence de planétologie qui s’est
tenue cette année à Houston, les scientifiques responsables de la mission
Cassini en sont venus à presque pouvoir affirmer que sous sa glace, Encélade
cache en fait un vaste océan liquide. Presque, car les indices, bien que très
insistants, ne sont pas encore suffisamment solides pour que l’océan puisse
être admis par tous.
Ce qu’ont montré les
planétologues spécialistes des mondes saturniens exploitant Cassini est une
image d’Encélade montrant de multiples fissures, qui sont très similaires à des
fissures de banquise.
Un premier modèle expliquant les
geysers observés sans avoir besoin d’un océan liquide avait été élaboré il y a
quelques années. Selon ce modèle, les effets de marées produits par la géante
Saturne toute proche, faisaient se mouvoir quatre grandes fissures dans des
sens opposés, créant ainsi une friction induisant un échauffement qui faisait
fondre la glace, eau qui se trouvait ensuite vaporisée dans l’espace (Encélade
ne possède pas d’atmosphère digne de ce nom).
Mais Carolyn Porco, du Space Science Institute de Boulder
(Colorado) et ses collaborateurs viennent de présenter un tout autre modèle,
qui semble bien plus cohérent avec les dernières observations de Cassini :
les jets d’eau vaporisée tendent à apparaître et s’intensifier exactement là où
les effets de marée écartent les fissures et non lorsqu’ils produisent des
frictions. L’écartement des fissures dans la glace laisserait s’échapper dans
l’espace de l’eau liquide. Cette eau liquide se trouverait donc en abondance en
dessous de la couche de glace… Un véritable océan d’eau et une eau relativement
chaude.
Encélade et ses geysers étonnants (Cassini/JPL/NASA/ESA) |
Ce que les chercheurs exploitant
les données de Cassini ont pu montrer, c’est qu’il n’existait pas de points
chauds distribués sur toute la longueur des fissures, ce qu’on attendrait dans
le cas d’un phénomène de friction. Au contraire, de tout petits points chauds
sont mesurés par l’imageur infra-rouge de la sonde, pas plus grands qu’une
dizaine de mètres.
Ces données tendent à indiquer
des fissures très profondes produites par les effets de marée, et laissant
s’échapper localement l’eau océanique sous-jacente.
Le planétologue David Stevenson
du California Institute of Technology à Pasadena confesse :« Effectivement,
l’échauffement par friction ne semble pas marcher. A la place, on peut pomper
de la chaleur d’un océan, et il va maintenant falloir comprendre comment un tel phénomène peut exister depuis des
milliers ou des millions d’années. On avance... »
L’idée de la présence d’un océan
liquide sur Encélade, même sous plusieurs centaines de mètres de glace, associé
au fait que l’eau éjectée comporte des composés carbonés et en soi très
intéressant. Elle permet d’ouvrir quelques perspectives que certains vont
assurément s’empresser de développer. Il reste encore beaucoup à apprendre sur
notre environnement pas si lointain sans être pour autant très proche. La sonde
Cassini est un des meilleurs instruments pour le faire.
Reference:
R. Kerr
More Support for an Ocean in Enceladus
Science 12 April 2013: Vol. 340 no. 6129 p. 139
More Support for an Ocean in Enceladus
Science 12 April 2013: Vol. 340 no. 6129 p. 139
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire